Les récessions frappent toujours lorsque l’on ne s’y attend pas

Salima Barragan

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La saison des résultats sera décevante, avertit Garry Evans de BCA Research.

Retour de l’inflation, récession, année électorale sous haute tension: BCA Research se montre bien moins optimiste que les marchés qui intègrent, à l’heure d’écrire ces lignes, un atterrissage en douceur de l’économie et des premières baisses de taux d’intérêt en printemps.  Dans sa stratégie d’investissement, BCA favorise les TIPS et les portefeuilles Equity Long-Short. Garry Evans, Responsable de la stratégie d’allocation d’actifs globale, répond aux questions d’Allnews.

Le calendrier électoral lors de cette année s’annonce chargé. Quelles sont les implications pour les marchés?

Le coup d’envoi a été lancé avec les primaires dans l’État de l’Iowa: Biden est impopulaire, Trump est controversé; une situation propice à des incertitudes. Nous avons aussi des élections à Taïwan, en Russie et dans d’autres grands pays qui augmenteront aussi la volatilité des fondamentaux comme l’inflation et le GDP, qui à leur tour, attiseront la volatilité des marchés. Ce type d’environnement est idéal pour générer de l’alpha sur les stratégies Equity Long Short.

Les marchés ont-ils surestimé la rapidité des baisses des taux d’intérêt?

Ils tablent sur une réduction annuelle des taux de la Fed d’environ 150 points de base, à partir de mars. Des attentes très optimistes qui se reflètent dans la correction de janvier…

Quand la Fed baissera-t-elle ses taux?

Dans un scénario de récession, une baisse de taux de l’ordre de 350-400 points pourrait débuter dès la seconde partie de l’année, lorsque la survenue d’une récession deviendra claire. 

L’attention se concentrera sur les résultats des entreprises. Une saison décevante mènera à une correction lors des premiers mois.

Mais dans le cas d’un atterrissage en douceur, il n’y aura pas de baisse des taux avant le quatrième trimestre.

L'inflation pourrait-elle revenir sous certaines conditions?

Le risque d'une deuxième vague d'inflation demeure.

L'inflation pondérée par l'indice des prix à la consommation (IPC) reste largement supérieure à 2%, tandis que la croissance des salaires se maintient autour de 5%. Les salaires dans le secteur américain des soins de santé augmentent d'environ 6%, dans le sillage du COVID.

La Fed s'attend à ce que la PCE atteigne 2,4% d'ici la fin de l'année. En outre, l'inflation en glissement annuel reste bien supérieure à l'objectif de 2% de la Fed. Le FOMC s'attend également à ce que le taux de chômage ne dépasse pas 4,1%.

Si la Fed se montre trop dovish en coupant ses taux trop tôt, le renchérissement pourrait à nouveau s'accélérer.

Après le rallye de la fin de l’année précédente, comme les indices évolueront-ils ce semestre?

L’attention se concentrera sur les résultats des entreprises. Une saison décevante mènera à une correction lors des premiers mois, en raison des attentes trop hautes d’environ 11% de croissance des bénéfices aux États-Unis et 17% en Europe.

Comment investissez-vous dans ce contexte?

Nous sommes prudents et sous-pondérons les actions et le crédit. Les obligations d'État sont la meilleure protection contre une récession, mais, compte tenu de la récente baisse des rendements, elles ont perdu un peu d’attrait et nous réduisons notre surpondération sur la duration. 

Face au risque d’une Fed trop dovish, nous surpondérons notre couverture contre l’inflation via des TIPS: ces instruments constituent une protection bon marché. 

Selon la règle d'or de la BCA en matière d'investissement obligataire, les rendements des obligations d'État dépendent essentiellement de ce que la banque centrale surprend par son attitude hawkish. Or, la Fed ne sera pas en mesure d'effectuer les baisses de taux attendues par les investisseurs avant le prochain semestre.

De plus, nous prévoyons une récession d'ici mi-2024. Bien que le point d’entrée actuel ne soit pas idéal, les obligations d'État – dont les TIPS - restent aussi une bonne protection contre une récession qui enverra les rendements des bons du Trésor à 10 ans autour de 2 à 2, 5%.

Vous tablez sur une récession, alors que les marchés misent sur un atterrissage en douceur de l'économie. Pourtant, elles surviennent toujours au moment où l'on ne s'y attend pas…

Oui, le marché américain escompte une croissance des bénéfices trop généreuse, tandis que le marché du crédit table sur un taux de défaillance implicite des obligations à haut rendement de 4%, alors que ce chiffre dépasse les 10% en cas de récession.

Selon le consensus, les économistes ne prévoient en moyenne pas un seul trimestre de croissance négative du PIB cette année. Et un grand nombre d'articles parlent d'un atterrissage en douceur, comme c'est généralement le cas avant une récession.

D'ailleurs, nous n'avons pas connu de récession l'année dernière, en partie parce que tout le monde s'y attendait. Cette fois-ci, ce sera différent, car personne ne s'y attend plus.

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