L’immobilier est la variable qui pourrait faire ou défaire la force haussière, estime David Chao d’Invesco.
Depuis les sommets de février 2021 jusqu’au début du mois de mai 2022, les actions chinoises ont chuté de 33% durant 64 semaines, soit 6 de plus que la durée moyenne des précédents replis. Selon David Chao, Global Market Strategist Asia Pacific chez Invesco, les facteurs à l'origine de cette contre-performance pourraient être en train de s'inverser. Entretien
Les grandes villes de Chine déconfinent rapidement après la dernière vague Omicron. Après avoir atteint zéro cas en juin, Shanghai s’est totalement réouverte. A Pékin, le nombre de cas quotidiens est également tombé à un chiffre. Alors que les décideurs politiques continuent de poursuivre une politique de zéro COVID, le Congrès vient d’annoncer une série de mesures de stabilisation de la croissance pour soutenir les petites et moyennes entreprises ainsi que le marché du travail. Les mesures futures deviendront plus ciblées, afin d’éviter de fermer complètement des mégapoles, ce qui avait impacté les chaines logistiques.
Les données économiques mensuelles les plus récentes ont montré un rebond mesuré de l'activité commerciale avec l'assouplissement des restrictions COVID1. Si je continue de penser que l'économie est susceptible de rebondir au second semestre, la croissance ne sera pas suralimentée. Elle dépend en grande partie de la rapidité avec laquelle le marché immobilier peut être stabilisé. Une intervention plus décisive du gouvernement central pourrait être nécessaire pour rétablir la confiance dans le marché et empêcher les risques de se propager.
Après le récent rebond des actions chinoises A, ainsi que les actions asiatiques en général, je m’attends à une phase de consolidation durant laquelle les investisseurs mesurent les risques du deuxième semestre. L’assouplissement des mesures règlementaires sur le secteur technologique devrait permettre au marché de rattraper une partie des pertes accumulées. Mais du fait des incertitudes sur le marché immobilier qui péjore le sentiment des consommateurs, un mouvement haussier de la même ampleur que celui que nous avons vu semble improbable. Le thème de l’immobilier est la variable qui pourrait faire ou défaire la force haussière.
Oui, en particulier pour l’investisseur qui dispose d’un horizon de temps supérieur à un ou deux ans, du fait de la volatilité engendrée par la pandémie et l’immobilier. Les actions chinoises se négocient avec une prime de risque élevée qui intègre les risques économiques. Je maintiens une surpondération régionale sur la Chine. Les investisseurs à plus court terme peuvent investir sur le secteur technologique, car les mesures ont été en grande partie couvertes, ce qui offre une bouffée d’oxygène aux actions du secteur.
Je m’intéresse aux domaines qui seront soutenus par les politiques, tels que la manufacture high tech, le 5 G, les centres de données, les véhicules électriques, les marques de consommation domestique ainsi que l’énergie.
Le gouvernement fait son possible pour atteindre son objectif ambitieux de croissance annuelle de 5%, mais compte tenu d’un début d’année qui a vu les ventes et les exportations s’écrouler, et malgré des améliorations progressives trimestre après trimestre, le pays rattrapera difficilement cette cible. Je m’attends davantage à un 4%, qui dépendra aussi des mesures monétaires et du stimulus fiscal lancé au premier semestre. Leurs capitaux n’ont pas encore été déployés, notamment dans les infrastructures et ils impacteront l’économie réelle au second semestre.
Le marché immobilier demeurera un vent contraire en raison des difficultés qu’éprouvent les promoteurs pour accéder aux liquidités. De plus, de nombreux ménages ont arrêté de payer leurs hypothèques, mais je ne m’attends pas à une menace systémique, car le gouvernement devrait agir agressivement sur ce dossier. J’ajouterais enfin que contrairement aux autres grands pays du monde, la Chine n’a pas d’inflation. Mais il est évident qu’une mauvaise conjoncture mondiale est négative pour la demande et pourrait diminuer les exportations, ce qui impacterait la trajectoire économique chinoise.
Les investissements dans les infrastructures et les exportations devraient être les principaux moteurs de la croissance, tandis que la consommation et l'immobilier devraient être freinés. Cela pourrait limiter toute hausse potentielle des rendements obligataires à long terme et suggère que la demande de crédit du secteur privé pourrait ne pas s'accélérer au point de donner un coup de fouet aux actions à court terme. Néanmoins, pour les investisseurs ayant un horizon à plus long terme, je surpondère les actions chinoises à ces niveaux en raison des valorisations attrayantes et aussi parce que les perspectives de bénéfices pour 2023 semblent solides.