Le monde d’après – Première partie

Salima Barragan

2 minutes de lecture

Télétravail, dé-globalisation, surveillance; le monde post-coronavirus sera différent. Entretien avec Clément Maclou de Decalia.

Le confinement a précipité un certain nombre de tendances de fonds qui se dessinaient avant la crise. Dans l’urgence, les chefs d’entreprises et les chefs d’Etats ont été amenés à prendre des décisions inédites. Un bond irréversible qui marquera notre monde après le coronavirus. Dans une série d’interviews, nos interlocuteurs se prêtent au jeu des questions-réponses pour décrypter les principaux changements qui nous attendent.

Examinons en premier lieu l’évolution du monde du travail avec Clément Maclou, responsable des stratégies sur les tendances de consommation et spécialiste de l’économie circulaire chez DECALIA. Il conclut de ses observations que le télétravail aurait un niveau de productivité supérieur au travail de bureau.

Comment voyez-vous le monde professionnel évoluer après le coronavirus?

Le monde professionnel subit une double crise avec d’un côté un choc sur l’offre, et de l’autre un choc sur la demande. Le retour à la normale qui s’esquisse sera progressif. Ses modalités dépendront des pays, mais il s’accompagnera d’une reprise de la demande. En revanche, le choc sur l’offre est principalement lié à la mondialisation et à la délocalisation des centres d’approvisionnement et de production. Il y a fort à parier que nous nous appuierons davantage sur le marché local et le recyclage. Les entreprises devront ainsi revoir leurs chaînes de production depuis la conception et le design jusqu’à la fin de vie du produit en passant par son utilisation. Nous sommes convaincus que notre modèle économique linéaire qui consiste à prendre, fabriquer, consommer et jeter ne perdurera pas et que la transition vers l’économie circulaire (réduire, réemployer, réutiliser, recycler) va s’accélérer davantage. Les bouleversements que nous vivons actuellement sont si profonds et si soudains qu’il est évident que le monde d’après en sera modifié.

En télétravail, les entreprises auront également la possibilité
de recruter des employés au-delà des barrières géographiques.
Comment l’organisation du travail va-t-elle changer?

La pandémie a montré que le télétravail est une solution viable, même avec des enfants à la maison! Les outils technologiques, qu’il s’agisse de hardware ou de software, couplés à un internet de grande qualité en Suisse, permettent d’accéder facilement et de façon sécurisée aux réseaux des entreprises. De plus, les outils de téléconférence ont fait preuve d’une grande résilience, même en phase de forte hausse de la demande. La transition en cours du travail en entreprise vers le télétravail va s’accélérer une fois le confinement aboli. Les entreprises qui étaient encore hésitantes sont maintenant convaincues et les employés qui travaillent aujourd’hui depuis chez eux seront de plus en plus nombreux à vouloir poursuivre sur ce mode. Les avantages sont nombreux tant pour les employeurs que pour les employés. De plus, le coût ne sera pas un frein car les économies réalisées sur l’immobilier de bureau compenseront largement les dépenses en technologies de communication.

Le télétravail garantira-il une meilleure productivité?

Le télétravail souffre de nombreux préjugés mais en réalité il affiche un niveau de productivité supérieur au travail de bureau. Les employés sont généralement plus motivés et plus fidèles, ce qui améliore les résultats et réduit considérablement le taux de rotation du personnel, conduisant ainsi à diminuer les coûts en ressources humaines. En télétravail, les entreprises auront également la possibilité de recruter des employés au-delà des barrières géographiques, ce qui leur donnera accès à un bassin de talents bien plus large. Avoir les bons employés permettra aussi globalement d’augmenter la productivité des entreprises.

Travaillerons-nous dans un monde plus durable?

Le télétravail s’est révélé être un atout incroyable pour l’environnement. Dès les premières semaines de confinement, nous avons pu constater ses effets exceptionnels, surtout dans les zones les plus polluées comme la Chine ou le nord de l’Italie car il réduit significativement les émissions de gaz et la consommation d’énergie liées au transport pour se rendre sur le lieu de travail. Ainsi, l’émission de près de 54 millions de tonnes de gaz à effet de serre sera évitée si le télétravail se généralise. Les déplacements professionnels à l’étranger vont certainement être revus à la baisse par les entreprises. Leur empreinte carbone va donc très certainement s’améliorer après la crise du Coronavirus, pour un monde professionnel plus durable.

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