Rendez-vous phare de la finance durable, la 5e édition de Building Bridges réunira plus de 3000 participantes et participants cette semaine à Genève. Patrick Odier, président de Building Bridges et de Swiss Sustainable Finance (SSF), commente les points forts de l’édition de 2024 à l’occasion du coup d’envoi de la conférence qui a débuté lundi et qui se tient jusqu’à jeudi dans la ville du bout du lac.
Par rapport à 2019, lorsque s’est tenue la première édition de Building Bridges, quels ont été les principaux changements que vous avez observés en matière de finance durable et plus spécifiquement concernant l'événement lui-même?
La première chose qui s’est révélée être un pari juste, cela a été de dire que l’on avait besoin d’une plateforme pour échanger des points de vue, des expertises, des ressources. La demande pour une plateforme de dialogue ne fait qu’augmenter. Si je regarde l’intérêt qu’il y a pour la semaine Building Bridges de 2024 par rapport à celle de 2019, il n’y a pas de comparaison. C’est quatre fois plus. Ce n’est toutefois pas uniquement le nombre de participants ou d’experts qui est important mais aussi le type de thématiques. On sent qu’il y a un besoin de mettre l’accent sur les thématiques qui permettent de faire avancer les choses ensemble.
«La participation à Building Bridges cette année est constituée d’environ 30% de personnes qui travaillent dans le secteur financier et 70% restent des interlocuteurs provenant de divers domaines.»
En ce qui concerne les différentes thématiques abordées, il y a toujours plus de thèmes très spécialisés en lien avec la finance durable qui sont traités durant ces quatre jours. Building Bridges va-t-elle s’orienter vers toujours davantage de spécialisation – ou l’idée est-elle avant tout de maintenir un dialogue avec la société civile dans son ensemble?
Premier aspect à mentionner, la participation à Building Bridges cette année est constituée d’environ 30% de personnes qui travaillent dans le secteur financier et 70% restent des interlocuteurs provenant de divers domaines, à savoir des représentants d’ONG, de gouvernements, d’organisations internationales, des personnes issues du secteur académique et de la société civile en général.
Deuxième point, le programme qui peut vous paraître assez spécifique est un programme qui a été défini de manière extrêmement démocratique. La seule chose que Building Bridges a essayé de faire a été d’élargir le cercle des personnes qui allaient prendre des décisions à propos de ce programme de la façon la plus objective possible, puis de définir les critères de qualité des thématiques à aborder. Il y a eu beaucoup plus de thèmes qui ont été proposés.
Il y a un intérêt qui croît de la part de la société civile. La spécialisation ne vient pas de la finance. La thématique de la durabilité est complexe. Il y a certes parfois de la complexité, même dans le titre des sujets abordés. Mais chaque catégorie d’acteurs s’exprime aussi de sa propre manière : un financier va parler d’une certaine manière, tout comme cela sera aussi le cas pour un scientique, un entrepreneur ou un start-upper. L’important est que ces voix s’échangent. C’est l’objectif de Building Bridges.
Pour les investisseurs institutionnels, quels sont les thèmes qui les intéressent le plus en ce moment?
Il y a un grand nombre de thématiques qui intéressent les investisseurs. Il y a beaucoup d’intérêt pour tout ce qui touche l’infrastructure. Il y a aussi beaucoup de choses qui se sont développées dans le domaine de l’énergie. C’est là qu’on voit le plus clairement des intérêts se manifester.
On observe aussi beaucoup d’intérêt pour la notion d’impact. Mais il ne s’agit ici pas seulement de l’impact au sens étroit comme on le définit traditionnellement, à savoir des placements non liquides, de petite taille et spécialisés géographiquement. Il s'agit de l’impact comme mesure à ajouter à la décision d’investissement par rapport à celle constituée par le risque ou la performance. Il y a une demande pour être plus précis à ce niveau car il y a beaucoup d’intérêt à ce sujet de la part des futures personnes retraitées ou des bénéficiaires des caisses de pension. Elles veulent savoir comment attribuer leur épargne de manière à avoir un impact à la fois sur le climat, sur la nature.
Comment faut-il appréhender le concept de nature en matière d’investissement durable?
Il s’agit ici bien sûr de la nature comme solution, et non pas considérée comme étant une pure ressource d’investissement, ce qui peut d'ailleurs parfois l’amener à sa destruction.