Les prix des maisons individuelles atteignent des records. Mais les ménages prêts à faire des compromis trouveront encore des objets abordables dans certains endroits.
L’annonce de prix records sur le marché de la propriété devient lentement mais sûrement une tradition. Tous les trimestres, le prix à payer pour acquérir un toit atteint de nouveaux sommets. Cette fois-ci, nous pouvons annoncer une nouvelle valeur record, mais aussi la plus forte hausse des prix des maisons individuelles, de +4,4% (!), depuis le lancement de notre indice des prix des transactions. Or, ne vous y trompez pas, la fin n’est pas en vue: tous les indicateurs prédisent une forte demande et une offre limitée, si bien que ce nouveau record sera bientôt battu.
Malgré ces niveaux records, il se trouve encore des maisons individuelles abordables en Suisse. Mais hélas pas aux emplacements les plus prisés. Dans les communes présentant des caractéristiques de qualité inférieures à la moyenne, les maisons restent souvent invendables. C’est aux bons emplacements que tout se joue et à cet égard, les Suisses sont intraitables même face à la flambée des prix. Le slogan éprouvé «Emplacement, emplacement, emplacement!» reste d’actualité malgré les tendances au télétravail et à l’e-commerce. Notre analyse montre ce que nous sommes prêts à payer pour une minute de trajet en moins vers la ville. Conclusion: le temps continue de valoir beaucoup d’argent. Dans un contexte de prix très élevés, peut-être qu’à l’avenir, l’argent finira par l’emporter sur le temps.
Au même titre que les prix records, depuis 2008, nous étions habitués à la publication annuelle en septembre d’une nouvelle hausse du taux de vacance. Or, cette tradition a été rompue en 2021, et de façon très nette, puisqu’il a diminué, passant de 1,72% à 1,54%. Certes, le renversement de tendance se dessinait depuis un certain temps, mais son intensité a créé la surprise. Nous nous perdons en conjectures quant aux causes de la chute de l’indicateur le plus connu du marché immobilier. Ce qui est certain, c’est que le marché du locatif est entré dans la phase suivante de son atterrissage qui devrait s’effectuer en douceur.
Cette année, le taux de vacance des logements locatifs connaît une baisse généralisée, à l’exception des villes. D’une part, le recul de l’immigration y a réduit la demande, car les étrangers s’établissent généralement d’abord en ville. D’autre part, les premiers effets de la large démocratisation du télétravail et du shopping en ligne se font sentir. Les emplacements urbains ont donc perdu de leur attrait relatif. Et pourtant, nous réfutons la thèse souvent colportée de l’exode provoqué par le coronavirus. Bien qu’il ait récemment augmenté dans les villes, le taux de vacance reste faible dans les centres. La ville demeure très attrayante et c’est d’ailleurs pour fuir ses frais de logement élevés induits par cet attrait qu’on s’en éloigne.
Le télétravail n’est pas encore tout à fait entré dans les moeurs, car la plupart d’entre nous l’ont découvert il y a un an et demi. Et pourtant, il fait désormais partie de notre quotidien professionnel. Certes, la recommandation du Conseil fédéral de privilégier le télétravail est toujours en vigueur, mais le retour en présentiel est sensible. Certains regrettaient les avantages du travail au bureau et y retournent donc volontairement, du moins quelques jours par semaine. D’autres doivent être plus souvent au bureau car leur supérieur les y contraint. Quoi qu’il en soit, une image un peu plus précise de l’avenir se dessine. Dans beaucoup de cas, il s’agira d’une combinaison entre télétravail et présence au bureau. Faire ce grand écart vise à conserver le meilleur des deux mondes, même après la pandémie. Ce sont surtout les grandes entreprises qui profiteront des possibilités de réduire le nombre de postes de travail avec des concepts de postes de travail flexibles grâce au maintien d’un faible taux d’occupation en présentiel. Cela leur permet d’augmenter le taux d’occupation actuellement très faible et d’économiser des loyers. L’inertie des processus décisionnels et les contrats de bail à long terme continuent de protéger les bailleurs de surfaces de bureau de résiliations à grande échelle. Mais ils vont ressentir la baisse de la demande, car le retour croissant au bureau ne suffira pas à compenser les économies de surfaces.
Un autre phénomène relativement nouveau est la location de courte durée de logements via Airbnb et des plateformes similaires. Après une croissance extrêmement dynamique, ce marché s’est désormais établi, car même avant le déclenchement de la pandémie, il se trouvait déjà en phase de saturation et le coronavirus et l’effondrement du tourisme international n’ont fait qu’aggraver la situation. En l’absence de clients, de nombreux logements ont de nouveau disparu de la plateforme, surtout dans les villes. De nombreuses communes touristiques ont même enregistré une hausse du taux d’occupation des lits car même avant la crise, c’est surtout là qu’Airbnb était attrayant pour les investisseurs. Dans les villes, c’est le marché locatif classique qui demeure plus intéressant.
Depuis toujours, le marché immobilier et le secteur du bâtiment entretiennent une relation symbiotique. Dans notre gros plan, nous présentons les interactions entre ces deux pans importants de l’économie. La hausse des prix de l’immobilier entraîne une frénésie de la construction. Malgré une solide demande induite par la construction de logements, une forte lutte concurrentielle dans le secteur maintient les marges du secteur du bâtiment à un niveau très bas. Les demandes de permis de construire révèlent un repli notable, augurant d’un renforcement de la lutte concurrentielle déjà rude dans le secteur.
En raison de la pénurie de terrains, notamment aux emplacements avec une demande élevé en logements, la construction de logements consiste de plus en plus en des travaux de transformation et de remplacement. De moins en moins de logements sont construits sur des terrains non encore bâtis. On construit de moins de moins de maisons individuelles, qui requièrent beaucoup de terrain, et les immeubles de logements locatifs sont de plus en plus hauts. Ainsi, la planification du territoire plus stricte montre progressivement les effets escomptés: bien que rare, notre sol est de plus en plus densément construit.