Worldline boucle dans le rouge une année noire

AWP

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«2023 a été une année de contraste pour Worldline», a pudiquement résumé le directeur général du groupe, Gilles Grapinet.

Pannes, dégringolade en Bourse, décès du président, fronde d’un fonds activiste... rien n’aura été épargné l’an dernier au prestataire français du paiement Worldline, qui a annoncé mercredi une perte nette pour 2023 de plus de 800 millions d’euros.

2023 «a été une année de contraste pour Worldline», a pudiquement résumé le directeur général du groupe, Gilles Grapinet, lors d’une conférence de presse, en se souvenant d’un premier semestre pas si mal engagé.

Mais il a vite laissé place à une deuxième partie d’année où la «dégradation marquée de la consommation en Europe» a fortement pénalisé la rentabilité de Worldline, contraint de déprécier son activité principale, les services aux commerçants, de 1,15 milliard d’euros, soit environ 10% de sa valeur.

Le début d’année 2024 n’est pas plus joyeux: Worldline a annoncé le 7 février un plan de suppressions de postes, touchant jusqu’à 8% de ses 18.000 collaborateurs dans le monde, soit environ 1.400 personnes, dont 330 en France. La CFTC du groupe s’est dite le 16 février «écoeurée» par le nouveau plan stratégique. Le syndicat déplore déjà des situations de sous-effectif et des équipes sous tension.

M. Grapinet a expliqué en marge des résultats que la forte inflation (4,9% en France l’an dernier selon l’Insee, plus encore sur d’autres marchés du groupe) avait engendré «un fort ralentissement des volumes de vente chez les commerçants et des arbitrages (...) de certaines catégories de consommateurs, délaissant le petit commerce au profit du grand commerce».

Or Worldline réalise une meilleure marge sur sa myriade de «petits» clients que sur les plus gros, comme les acteurs du hard discount par exemple, qui négocient grâce à leur volume d’affaires des coûts très réduits auprès de leurs prestataires de paiements.

«Ces dynamiques (...) structurellement défavorables à des échelles importantes (...) se sont confirmées voire approfondies au cours du quatrième trimestre» de 2023 «et restent pour l’instant celles que nous observons» début 2024, a expliqué M. Grapinet.

Prudence de rigueur

Worldline affiche pour 2023 une perte nette de 817 millions d’euros sur ses opérations poursuivies. La société avait déjà traversé 2021 dans le rouge (751 millions d’euros de perte nette), du fait de la baisse de la valeur d’Ingenico, acquis l’année précédente.

Hors éléments exceptionnels, dont l’ajustement comptable de 1,15 milliard d’euros, le résultat net part du groupe ressort positif, avec un bénéfice net de 521 millions d’euros, toutefois en baisse de 4,3% sur un an, a précisé la société.

Worldline affiche désormais un objectif «prudent» de croissance d’au moins 3% de son chiffre d’affaires pour 2024, et vise une hausse entre 5 et 9% à partir de 2025, grâce à son activité de services aux commerçants.

La révision en baisse de la prévision de croissance du chiffre d’affaires pour 2023 (6 à 7% au lieu de 8 à 10%) avait effrayé les investisseurs et déclenché le 25 octobre dernier une chute historique du cours de Bourse de Worldline, de l’ordre de 60%, précipitant le titre hors du CAC40 quelques semaines plus tard.

Le chiffre d’affaires 2023, en hausse de 6% à 4,61 milliards d’euros, se situe finalement bien dans la fourchette actualisée. Il est en ligne avec les attentes des analystes sondés par l’agence financière Bloomberg.

Dans le détail, les services aux commerçants ont généré plus de 3,3 milliards d’euros de chiffre d’affaires (+8,9% sur un an) et les services financiers ont vu le leur baisser de 1,3% à 944 millions d’euros. Les services web transactionnels sont restés stables à 342 millions d’euros.

Pression sur la gouvernance

Worldline, dont la banque Crédit Agricole a acquis 7% du capital, s’est attiré les foudres d’un fonds activiste, Bluebell Capital, qui a redit dans un courrier daté du 23 février tout le mal qu’il pensait de la gouvernance du géant français des paiements.

Après avoir critiqué l’ex-président du conseil d’administration Bernard Bourigeaud (décédé le 14 décembre), le fonds s’en prend désormais à celui par intérim, Georges Pauget, ainsi qu’au directeur général.

«Le conseil d’administration avance (...) activement sur l’adaptation de la gouvernance de Worldline», a indiqué M. Grapinet.

Le futur conseil comptera au maximum 13 membres, plus deux administrateurs salariés. Leurs noms comme celui du président devraient être communiqués d’ici à fin mars.

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