Deutsche Bank et Commerzbank parlent d’une fusion

AWP

2 minutes de lecture

Les deux banques francfortoises en difficulté sont sous la pression non officielle de Berlin pour qu’elles s’unissent.

Les principales banques allemandes, Deutsche Bank et Commerzbank ont annoncé dimanche le début de discussions en vue d’une éventuelle fusion, selon un projet poussé en coulisse depuis des mois par Berlin pour créer «un champion national».

Cela ne faisait pas mystère que le gouvernement de la chancelière Angel Merkel était à la manoeuvre pour exhorter les deux banques francfortoises en difficulté à se pencher sur une fusion, afin d’éviter que l’une ou l’autre ne soit engloutie par un concurrent étranger.

Berlin, qui détient 15% de Commerzbank depuis qu’il a dû la sauver en pleine crise financière, voudrait par ailleurs voir l’Allemagne se doter d’un acteur plus musclé pour accompagner ses entreprises tournées vers l’international.

Encore empêtrées dans des restructurations douloureuses rendues nécessaires après des années de recettes et de rentabilité en berne, ces deux établissements ont longtemps été l’objet de rumeurs sur leur union.

Maintenant que ces pourparlers ont été officialisés, le ministère des Finances a laconiquement pris note dimanche, dans un communiqué, de la décision des deux banques de «discuter des possibilités d’une coopération plus étroite».

«Nous sommes en contact régulier avec tous les participants», a-t-il ajouté.

«Opportunités»

Le directoire de Deutsche Bank a décidé d’examiner des options stratégiques «au vu des opportunités qui se présentent» qui comprennent «des discussions en cours avec Commerzbank», avait annoncé auparavant la première banque allemande. Celle-ci prévenait aussi qu’il n’y avait «aucune garantie» de résultat.

Si les pourparlers devaient aboutir, ils créeraient un géant bancaire européen avec un total de 1.800 milliards d’euros d’actifs, proche de la plus grande banque française, BNP Paribas.

Mais en termes de capitalisation boursière, Deutsche Bank ne pèse que 16,1 milliards d’euros, en ayant perdu plus de 50% de sa valeur en 2018. Commerzbank vaut elle à peine 9 milliards d’euros.

La comparaison est ici nettement défavorable face aux rivaux européens, avec BNP Paribas valant quelque 55 milliards d’euros ou la britannique HSBC, 125 milliards de livres (147 milliards d’euros), sans parler des mastodontes de Wall Street comme JP Morgan, qui culmine à 360 milliards de dollars (318 milliards d’euros).

Selon Deutsche Bank, il s’agit désormais de discuter d’options en voyant si elles «renforceront la croissance et la rentabilité de la Banque».

Cette dernière a fortement souffert depuis la crise financière et n’a dégagé qu’un modeste bénéfice net en 2018, après trois années de lourdes pertes sur fond de recettes en recul et de milliards d’amendes liées à ses scories judiciaires. Et le premier trimestre de l’année en cours, le plus fort traditionnellement, s’annonce déjà sous de mauvais auspices, sur fond d’une économie allemande tournant au ralenti.

Les deux banques, en comptant chacune environ 20 millions de clients, pourraient déjà se renforcer dans la banque de détail en Allemagne, au sein d’un marché qui resterait toutefois dominé par les caisses d’épargne publiques. Telle base servirait également de tremplin international, pour se développer dans la banque des entreprises et d’investissement ainsi que la gestion d’actifs.

«Porteurs de béquilles»

Mais les détracteurs du projet ne manquent pas. «Deux porteurs de béquilles réunis ne font pas un sprinter», ironisait en janvier Markus Kienle, avocat représentant l’association de minoritaires SdK.

Et en guise de «champion national», le futur ensemble ferait émerger une banque «bien plus attractive pour une prise de contrôle +hostile+, venue par exemple de France», craint de son côté le puissant syndicat des services Verdi, dans une prise de position transmise à l’AFP cette semaine.

Par ailleurs, sur le front de l’emploi, même si les deux banques ont fait partir des milliers de salariés l’an passé, elles comptent encore environ 133.000 salariés dans le monde, dont près de 80.000 en Allemagne.

Aussi, au moins 10.000 emplois seraient «gravement menacés», et bien plus si les résultats attendus par cette fusion n’étaient pas au rendez-vous, selon Verdi.

Dans un message adressé dimanche aux salariés, Christian Sewing, le patron de Deutsche Bank, les a exhortés à se «concentrer» sur les affaires quotidiennes et «d’être au service» des clients.

A lire aussi...