Credit Suisse a essuyé une perte de 4 milliards au troisième trimestre

AWP

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Il s’agit de la quatrième perte trimestrielle d’affilée pour la deuxième banque helvétique et elle est largement supérieure aux prévisions des analystes, qui tablaient en moyenne sur -602 millions.

Credit Suisse a essuyé une perte nette de 4,03 milliards de francs au troisième trimestre, à comparer avec un bénéfice de 434 millions un an plus tôt. Il s’agit de la quatrième perte trimestrielle d’affilée pour la deuxième banque helvétique et elle est largement pire que pronostiqué par les analystes, qui tablaient en moyenne sur un déficit 602 millions.

La perte nette s’explique par une provision de 3,7 milliards pour dépréciation relative aux actifs d’impôts différés et en lien avec le programme de restructuration en cours, précise un communiqué paru jeudi.

«Le troisième trimestre a souffert de conditions de marché et macroéconomiques difficiles, qui ont mené la banque d’affaires en particulier à inscrire une plus faible performance», a expliqué Ulrich Körner, directeur général (CEO) de Credit Suisse, admettant des résultats «décevants pour les investisseurs».

La perte avant impôts s’inscrit à 342 millions, en raison d’une activité banque d’affaires très déficitaire. La division a essuyé une perte avant impôts de 666 millions, tandis que les autres principales divisions ont toutes terminé le trimestre dans les chiffres noirs.

La gestion de fortune a enregistré un gain avant impôts de 21 millions, les activités en Suisse un bénéfice de 383 millions et la gestion d’actifs a inscrit un excédent 90 millions, soit plus que les prévisions des analystes.

Le ratio de fonds propres durs (CET1) a diminué 12,6%, après 13,5% à fin juin.

Le produit d’exploitation a atteint 3,80 milliards de francs, en ligne avec les pronostics et en baisse de 30% sur un an en raison des divisions Banque d’affaires et Gestion de fortune. Les charges se sont inscrites en baisse de 10% à 4,13 milliards, en raison de bonus (-16%) et de coûts administratifs (-5%) en baisse.

Les provisions pour risque de crédit ont désenflé à 21 millions tandis que les provisions pour litiges ont atteint 245 millions.

Le ratio coûts sur revenus s’est établi à 108%, après 130% au trimestre précédent et 84% à la même période il y a un an.

Importants reflux

L’argent nouveau a accusé un important reflux, de 12,9 milliards, après -7,7 milliards il y a un an. La banque a été confrontée à des retraits de liquidités début octobre de la part de clients dans les divisions gestion de fortune et Swiss Bank en raison de «rumeurs incorrectes» circulant dans la presse et sur les réseaux sociaux.

Les avoirs sous gestion sont ressortis à 1401 milliards à fin septembre, après 1454 milliards à fin juin.

Une large restructruration doit permettre à la banque de sortir la tête de l’eau. En plus d’une augmentation de capital de 4 milliards, qui devrait permettre au ratio CET1 de revenir aux alentours de 14%, une réduction de 15% de la base de coûts est ciblée, via notamment la suppression de 9000 postes d’ici 2025.

Sans préciser l’importance de la perte totale attendue au quatrième trimestre, la banque table sur un débours de 75 millions de francs environ en raison du désengagement de Allfunds, dans laquelle la banque détenait une part de 8,6%. Des coûts de restructuration de 250 millions devraient également être inscrits. Les reflux d’argent frais devraient de leur côté rester «significatifs».

Les analystes de Vontobel relève que l’annonce du nouveau plan est une première étape dans un long processus pour restaurer la crédibilité et regagner la confiance des actionnaires. Il faudra désormais veiller à sa bonne exécution.

Vers 10h12, le titre Credit Suisse reculait de 11% à 4,24 francs, tandis que le SMI lâchait 0,49%.

 

Vaste plan de restructuration, 9000 emplois à la trappe

Credit Suisse, empêtrée dans de nombreux déboires, a annoncé jeudi un vaste plan de relance comprenant une «restructuration radicale» de sa banque d’affaires et une réduction des coûts se soldant par 9000 emplois supprimés. Une importante levée de fonds permettra de gagner un actionnaire saoudien comme nouvel investisseur.

«Pendant de long mois, le conseil d’administration et la direction ont évalué notre avenir et lors de ce processus nous avons retourné ciel et terre», a lancé le président Axel Lehmann, cité dans un communiqué, évoquant une «stratégie radicale» permettant de regagner la «confiance et la fierté».

Concrètement, les dirigeants du numéro deux bancaire helvétique veulent se focaliser sur la gestion de fortune et le marché historique suisse, tout en misant sur une solide franchise dans la gestion d’actifs et de marchés. De nombreuses mesures doivent permettre de réallouer les capitaux à ces deux unités désormais centrales, perçues comme plus stables et moins gourmandes en fonds propres.

Concernant sa banque d’affaires en difficultés, la direction s’est engagée à «prendre des mesures décisives pour restructurer» cette entité qui doit désormais se concentrer sur son cœur de métier. Ces mesures doivent permettre de réduire les actifs risqués de 40% d’ici trois ans.

La nouvelle entité créée, qui reprend l’ancien nom CS First Boston, comprenant les activités de marchés des capitaux et de conseil, doit quant à elle agir de manière autonome et attirer de nouveaux capitaux. L’administrateur Michael Klein, qui va quitter le conseil d’administration, doit devenir l’année prochaine le directeur général CS First Boston, dont le siège sera à New York. Cette entité doit dégager des recettes nettes supérieures à 2,5 milliards de dollars.

Le groupe veut également créer une unité de défaisance pour ses activités déficitaires, la Capital Release Unit (CRU), comprenant les activités de produits titrisés, Prime Services, des activités de prêts dans certains pays émergents et la présence de l’établissement dans certains pays. L’unité sera dirigée par Louise Kitchen.

Credit Suisse a par ailleurs conclu un accord pour transférer un partie importante de son unité en charge de la titrisation, Securitized Products Group (SPG), à un groupe d’investisseurs dirigés par les américains Apollo Global Management et Pimco. Cet accord doit être finalisé au premier semestre 2023.

Le patron de la banque d’affaires Christian Meissner quitte quant à lui l’établissement avec effet immédiat.

Impact sur l’emploi

Credit Suisse compte par ailleurs réduire ses coûts de 15% ou 2,5 milliards de francs afin de ramener ses frais de fonctionnement à quelque 14,5 milliards d’ici 2025. De ce montant, 1,2 milliard doivent être économisés l’année prochaine. Dans l’immédiat, ces mesures se traduiront par des dépréciations de 3,7 milliards au 3e trimestre et des coûts de 2,9 milliards supplémentaires cumulés entre fin 2022 et 2024.

Ces mesures d’économies auront un impact sur l’emploi, la banque comptant réduire ses effectifs de 9000 postes d’ici le troisième trimestre 2025. La suppression de 2700 équivalents temps plein est actuellement en cours. La banque compte aussi réduire de 50% ses coûts de consultants et de 30% ses dépenses auprès des sous-traitants.

L’établissement entend lever quelque 4 milliards de francs par l’émission de nouvelles actions, notamment auprès de Saudi National Bank qui s’est engagé à hauteur de 1,5 milliard ou 9,9% du capital-actions. Cette mesure devrait permettre de relever le ratio de fonds propres durs (CET1) de 12,6% actuellement à environ 14,0%.

Saudi National Bank deviendra ainsi le premier actionnaire de Credit Suisse, devant Harris Associates (5,17%) Blackrock (5,06%) et Qatar Investment Authority (5,026%).

Pour le directeur général Ulrich Körner, il s’agit «d’un moment historique pour Credit Suisse», qui doit devenir «une nouvelle banque plus simple (et) plus stable».

Nombreux déboires

La banque a fait face ces dernières années à de nombreuses difficultés, avec notamment un chamboulement continu de sa direction.

L’établissement a aussi cumulé d’autres soucis. La débâcle du fond spéculatif américain Archegos a coûté plus de 5 milliards de francs à la grande banque. Cette dernière est également empêtrée dans la liquidation des fonds Greensill, du nom de la société britannique d’affacturage en faillite, où elle était initialement exposée à hauteur de 10 milliards de dollars.

L’année dernière, Credit Suisse avait souffert en particulier de ces deux scandales, subissant une perte nette de 1,6 milliard de francs. Au troisième trimestre 2022, la banque a essuyé une perte nette de 4,03 milliards.

Dans l’immédiat, ces nouvelles étaient mal accueillies par les investisseurs. Le titre Credit Suisse chutait de 7,2% à 4,42 francs dans le marché avant-Bourse.

 

 L’Association suisse des employés de banque exige plus de clarté sur les suppressions de postes

L’Association suisse des employés de banque (Aseb) a exigé jeudi des précisions sur les suppressions de postes envisagées par Credit Suisse dans le cadre de son plan de restructuration. La faîtière réclame que les emplois dans la Confédération soient protégés. La banque prévoit d’élaguer 2000 emplois dans le pays.

L’Aseb évoque dans un communiqué des «suppressions de postes massives» en raison «des erreurs» dans la gestion de l’entreprise et estime «totalement flou» l’impact de ces mesures sur les activités suisses et de fonction centrale du groupe.

L’association demande à la direction de la banque zurichoise «des précisions quant à ses projets pour la Suisse» et réclame de renforcer «les activités rentables» dans le pays.

Ces trois prochaines années, le nombre de postes en Suisse devrait être réduit d’environ 2000 à 14’000 emplois, a indiqué le président Axel Lehmann dans un entretien à la chaîne SRF. Ces réductions d’emploi «seront principalement réalisées par des fluctuations naturelles et les employés pourront chercher de nouveaux postes au sein de la société», a-t-il ajouté.

Dans le cadre de son plan de transformation, Credit Suisse compte réduire ses coûts de 15% ou 2,5 milliards de francs afin de ramener ses frais de fonctionnement à quelque 14,5 milliards d’ici 2025. De ce montant, 1,2 milliard doivent être économisés l’année prochaine. Dans l’immédiat, ces mesures se traduiront par des dépréciations de 3,7 milliards au troisième trimestre et des coûts de 2,9 milliards supplémentaires cumulés entre fin 2022 et 2024.

Ces mesures d’économies auront un impact sur l’emploi, la banque comptant réduire ses effectifs de 9000 postes d’ici le troisième trimestre 2025. La suppression de 2700 équivalents temps plein est actuellement en cours. La banque compte aussi réduire de 50% ses coûts de consultants et de 30% ses dépenses auprès des sous-traitants.

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