Les retraités risquent moins la précarité

Emmanuel Garessus

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De 2000 à 2020, le pourcentage de rentiers en précarité est tombé de 37,7 à 31,29%, selon une étude présentée par Cronos Finance.

© Keystone

La part des retraités à bas revenu tend à diminuer, si l’on en croit l’étude de Lokman Ben Fraj, étudiant auprès de la faculté des HEC de l’Université de Lausanne, sous la direction du professeur Rafael Lalive, et présentée mardi à Lausanne lors du THINK TANK 2023, une manifestation soutenue par Cronos Finance.

La part des retraités avec un bas revenu (soit 40% de la médiane, laquelle est d’environ 6500 francs par mois) est passée entre 2000 et 2020 de 37,7 à 31,29%, soit un recul de 6,41 points de pour-cent, selon ce travail de recherche. La baisse vaut pour les femmes (de 41,2 à 33,22%) et pour les hommes de 34,22 à 29,18%.

Dans cette étude, la pauvreté est définie comme le 20e percentile des ménages, correspondant à 40% du revenu disponible du ménage (environ 2600 francs par mois). A l’inverse de la situation au sein des retraités, l’auteur note que la part des travailleurs à bas revenu est restée constante à environ 12% entre 2000 et 2020.

«Osons un cocorico. La situation des retraités s’est grandement améliorée, même si des lacunes demeurent et qu’il s’agira d’y répondre sans employer des outils aux effets d’arrosoir», déclare Laurent Wehrli, conseiller national PLR, lors de la table ronde qui s’est tenu après la présentation de l’étude. Marco Taddei, de l’Union Patronale Suisse, pense que l’étude «tord le cou au narratif des syndicats, mais il convient dorénavant de s’attaquer aux lacunes qui frappent les bas revenus, les temps partiels et les indépendants».

Les femmes ont environ 24% de risques supplémentaires d’être confrontées à la pauvreté à la retraite.

A l’inverse, Aldo Ferrari, président du conseil de fondation de la Caisse Inter-Entreprises de Prévoyance Professionnelle (CIEPP), répond par une statistique: «Une femme sans interruption de carrière et qui a fait toute sa carrière au salaire médian n’obtient qu’une rente de 3727 francs (AVS + LPP)». Léonore Porchet, conseillère nationale Les Vert.e.s souligne aussi les nombreuses lacunes qui pénalisent les personnes défavorisées non seulement à la retraite mais durant toute leur vie active. Elle souligne notamment le risque croissant pour les personnes actives de devoir financer la retraite de leurs parents.

Bruno Parnisari, directeur suppléant à l’OFAS, se félicite d’être parvenu à réduire la précarité. Il explique ce progrès par la réduction de la taille du ménage, inférieure pour les retraités, et l’âge, dans la mesure où de plus en plus de personnes ont pu cotiser à un 2e pilier au cours des années.

L’auteur s’intéresse, dans son étude, au revenu à la retraite et en particulier aux variables qui influencent ce dernier selon le type de ménage. Il s’appuie sur une analyse qualitative du revenu disponible des ménages retraités en fonction du genre, de l’activité professionnelle et du type de ménage et sur un analyse quantitative des individus lors de la transition de la vie active à la retraite. Les données proviennent de données SESAM et du Panel suisse des ménages, soit de deux enquêtes, avec le risque de biais et de réponses subjectives liées à ce procédé.

 Plusieurs facteurs jouent un rôle clé en matière de précarité. «Les femmes ont environ 24% de risques supplémentaires d’être confrontées à la pauvreté à la retraite par rapport aux hommes», selon l’auteur. L’âge est un autre facteur important corrélé au risque de précarité, ainsi que le travail à temps partiel, l’état civil (moindre probabilité pour les personnes mariées), et le fait d’être indépendant.

Le passage à la retraite est de plus en plus le fait d’un procédé à analyser sur plusieurs années. Loqman Ben Fraj observe qu’avant la retraite, les revenus du travail diminuent progressivement, surtout auprès des femmes. Les rentes de la prévoyance professionnelle sont alors la part la plus importante du revenu disponible des hommes retraités, alors que ce sont les rentes AVS pour les femmes retraitées.

Au fil des ans, l’auteur constate une augmentation des départs volontaires à la retraite (en raison d’offres attrayantes financièrement, des obligations familiales et du désir de se lancer dans une activité indépendante), et une diminution des départs involontaires. Il en ressort aussi que le revenu disponible est environ 13% plus élevé lorsque le départ à la retraite est anticipé. Cette situation traduit l’existence de moyens financiers supérieurs pour ces derniers.

Concernant les différences de revenus selon les types de ménage. Les personnes seules ont un revenu disponible médian plus faible que les couples sans enfant, les parents seuls avec enfants et les couples avec enfants.

L’électorat devra se prononcer l’an prochain sur trois objets liés à la prévoyance, probablement en mars 2024 sur l’initiative des jeunes PLR, qui prévoit un relèvement de l’âge de la retraite et ensuite son adaptation en fonction de l’espérance de vie, et sur l’initiative pour une 13e rente AVS, et en juin sur la réforme de la LPP.

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