Energie solaire, à quand le «Post tenebras lux»?

Olivier Robert, BCGE

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Au moyen d’une vision critique du passé, d’une connaissance approfondie des cycles, l’investisseur peut escompter tirer profit de cette nouvelle économie.

© Loris von Siebenthal

 

Plus ancienne que la devise genevoise «Post tenebras lux», l’énergie solaire et son utilisation dans la vie de la cité remonte à la genèse de notre civilisation moderne. La légendaire parabole solaire, source de la flamme Olympique n’en est qu’un maigre exemple. En 1901, Emile Zola, dans son ouvrage le «Travail» répand la vision moderne, d’une énergie «moteur universel» en remplacement probant des énergies fossiles. Néanmoins, et à l’exception notable de la période de la Guerre froide et de son épique conquête de l’espace, les budgets alloués au développement de l’énergie solaire font pâle figure, face aux richesses créées par le charbon, le gaz et le pétrole. Nonobstant l’affirmation du GIEC selon laquelle le XXIe sera le siècle des énergies renouvelable ou ne sera pas, les budgets R&D mondiaux, certes en croissance (+5,1% en 2022), restent à de faibles niveaux avec un total de 43,7 milliards de dollars, dont 14,9 pour la seule Chine.

Dans ces circonstance, l’exploitation de l’énergie solaire à grande échelle ne restera-t-elle qu’un mirage?

Premier constat, le solaire a de nombreux avantages: rapidité de mise en place, efficience capitalistique et besoin de mains d’œuvre qualifié faible. Mais l’avantage premier, le nerf de la guerre, est son coût. A l’image des derniers développements provenant de Chine, particulièrement en avance dans le domaine, le solaire en 2025 devrait être la source d’électricité la moins onéreuse à produire.

Deuxième constat, les Etats ont mis en place des plans de développement des énergies renouvelables (dont l’énergie solaire). Les raisons en sont multiples: changements climatiques, indépendance énergétique (guerre en Ukraine), ou récupération d’une partie des 4'000 milliards de dollars de profits des sociétés fossiles mondiales. Le déblocage des milliards d’aide publique, IRA aux Etats-Unis, Green deal en Europe, Green transformation au Japon, 14th Five-Year Plan en Chine entre autres, accélèrent les investissements. De 1'300 milliards de dollars en 2021 ces derniers passeront à 2'100 milliards en 2030. Mais la transition sera toutefois complexe car elle nécessitera le développement d’un réseau moderne et décentralisé, la gestion complexe des flux de production, le développement du stockage énergétique et les probables tensions industrielles et géopolitiques qui pourraient survenir.

Cependant, l’histoire est belle et les profits intéressants. Au regard de l’histoire, les investisseurs devront favoriser l’expertise d’une sélection de qualité, basée sur l’analyse des fondamentaux et des risques plutôt qu’un investissement émotionnel et moutonnier. A la vue des performances passées, les sociétés liées au solaire représentent un risque certain. En 2005, au balbutiement de cette nouvelle économie, leur cours s’est apprécié de plus de 100% par an de 2005 à 2007: trois années d’euphorie avant les chutes brutales. En 2020, les cours s’emballent aussi avec une hausse de +331% en moins d’une année. A chaque envolée le réveil est difficile pour les investisseurs et pour les nombreux employés de sociétés tombées en faillite.

Au moyen d’une vision critique du passé, d’une connaissance approfondie des cycles, l’investisseur raisonné peut néanmoins escompter tirer profit de cette nouvelle économie du solaire. Actuellement, le monde du solaire vit une nouvelle période difficile avec une contraction de l’ordre de 40% depuis le début de 2023. Les changements de législations, les coûts de financement plus onéreux, les retards des grands projets dans l’attente de déblocage des subventions étatiques, la concurrence déflationniste, les difficultés d’approvisionnement en semiconducteur retardant les livraisons en sont les principales raisons. A l’inverse des crises passées, la visibilité des investissements reste claire, la technologie est efficiente et les parcs solaires sont rentables.

Dans ce contexte, quelques opportunités se dessinent. Shoals Technologies Group est un nom qui mérite l’attention. Peu connu du grand public, cette société est en quelque sorte le «Geberit du solaire». Par une technologie brevetée, cette société américaine, facilite le câblage, avec une version «plug-and-play», qui permet de se passer d’électriciens qualifiés, évitant des coûts et le manque de main d’œuvre qui retarde de nombreux projets. Par l’innovation, cette société a augmenté ses ventes de 238% en 5 ans. Le gain de coût pour le développeur, permet d’obtenir un pricing power confortable. Ce dernier se reflète par le gain des parts de marché malgré un accroissement de ses tarifs. Avec des marges opérationnelles de l’ordre de 16,2% et d’un levier opérationnel intact, une forte croissance de la profitabilité est à prévoir. De plus, après avoir fait son nid aux US, cette dernière à l’ambition de conquérir l’Europe. Au final, de l’appétit du gain des investisseurs aux politiques structurelles mise en place, la lumière sortira certainement des ténèbres.

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