Atterrissage en douceur aux Etats-Unis

Steven Bell, Columbia Threadneedle Investments

2 minutes de lecture

La zone euro et le Royaume-Uni peuvent-ils en faire de même?

  • Les chiffres de l'inflation américaine sont en baisse et le consensus est que la récession devrait être évitée.
  • Les données économiques européennes ont été épouvantables, mais nous pensons que les chiffres ne donnent pas une image complète de la situation. La confiance des consommateurs s'améliore.
  • L'inflation britannique diminue, mais la structure du marché immobilier britannique rend l'économie beaucoup plus vulnérable à des taux d'intérêt plus élevés.
  • L'avenir est très incertain, mais les marchés semblent indiquer qu'un atterrissage en douceur pourrait se reproduire au Royaume-Uni et dans la zone euro.
  • Nous sommes probablement proches du pic des taux d'intérêt, mais au-delà des États-Unis, il ne faut pas s'attendre à des baisses avant 2024.

Une série de données en provenance des États-Unis suggère que l’inflation pourrait se rapprocher de l’objectif de 2% de la Réserve fédérale sans qu’une récession soit nécessaire. C’est ce que nous entendons par «atterrissage en douceur». Jusqu’à présent, les mesures de l’inflation des prix à la consommation (IPC) ont diminué de manière significative et plus que prévu. Les derniers chiffres de l’IPC montrent que l’inflation est tombée à seulement 3% en juin. L’inflation des salaires a également ralenti selon des données clés publiées la semaine dernière et il existe une réelle possibilité que la spirale des prix salariaux fonctionne à l’envers. Tout cela s’est produit alors que le taux de chômage reste très bas. Un atterrissage en douceur des États-Unis n’est pas du tout certain, mais c’est une issue qui semble désormais faire consensus. Il s’agit d’un changement important, une bonne nouvelle pour les actifs à risque aux États-Unis et au-delà.

Cela soulève également la question de savoir si le Royaume-Uni et la zone euro peuvent répliquer le succès des États-Unis. Nous pensons que c’est tout à fait possible, mais cela prendra du temps et une période difficile nous attend.

Commençons par la zone euro. Les données économiques récentes ont été épouvantables, avec des chiffres faibles – et plus faibles que prévu. Les indices des directeurs d’achat, très surveillés, ont plongé en territoire négatif. Les enquêtes sur les prêts bancaires montrent que les conditions de crédit se sont durcies et que la demande de crédit s’est effondrée. La situation n’est peut-être pas aussi grave que les gros titres de journaux le laissent entendre. Il existe un fossé entre le nord et le sud: le volume des ventes au détail en Allemagne a été faible, la croissance d’une année sur l’autre devenant tout juste positive, tandis que l’Espagne a bénéficié d’un boom de la consommation. Il existe également un clivage sectoriel: l’industrie manufacturière est faible, les services sont forts, un phénomène qui se manifeste presque partout. Nous disposons de beaucoup plus de données sur l’Allemagne et l’industrie manufacturière, ce qui fausse le tableau: la situation n’est donc pas aussi mauvaise que ne le laissent présager les gros titres. De plus, le chômage continue de baisser – il a atteint un niveau record dans la zone euro.

La confiance des consommateurs s’est nettement améliorée et l’épargne non dépensée se traduit par une augmentation des dépenses. Mais l’inflation reste élevée, deux fois plus qu’aux États-Unis, ce qui se traduit par une pression à la hausse sur les salaires. L’Europe a peut-être moins d’indexation que par le passé, mais elle en a toujours beaucoup plus que les États-Unis, de sorte que la spirale des prix salariaux continue d’aller dans le mauvais sens. Le soulagement viendra lorsque l’inflation globale baissera, mais il faudra attendre plusieurs mois avant que la baisse ne se poursuive.

Le Royaume-Uni quant à lui présente des facteurs spécifiques. La structure du marché immobilier britannique rend l’économie britannique plus vulnérable à la hausse des taux d’intérêt que celle de la zone euro ou des États-Unis. La récente augmentation de 10% du salaire minimum au Royaume-Uni est bienvenue d’un point de vue social, mais elle a stimulé l’inflation des salaires. Il s’agit d’une mesure ponctuelle qui ne se répétera pas l’année prochaine. La faiblesse de la livre sterling l’année dernière ajoute jusqu’à 2 points de pourcentage à l’inflation actuelle: cette tendance devrait s’estomper puis s’inverser en réponse à la récente vigueur de la livre sterling. La dernière série de données sur l’inflation a montré une nette amélioration et s’améliorera encore à mesure que les factures d’énergie des ménages (qui ont augmenté de 200% dans les derniers chiffres, diminueront de 17% le mois prochain et baisseront encore en octobre).

Mais comme dans le reste de l’Europe, le point de départ de l’inflation est plus élevé et la voie vers un atterrissage en douceur plus incertaine.

La bonne nouvelle, c’est que les marchés financiers ont accordé à l’Europe le bénéfice du doute après avoir constaté l’atterrissage en douceur des États-Unis. C’est le point de vue que je partage.

A lire aussi...