Produits structurés, attention aux biais comportementaux

Dominique Boehler, Société Générale

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La diversité d’options offerte par les produits structurés est source d’opportunités mais confronte l’investisseur à des biais qui peuvent altérer son jugement du marché.

La polyvalence des produits structurés est incontestable. Ils se présentent sous de multiples formes et permettent par exemple de garantir un rendement minimum ou d'accroître l'effet de levier. La façon dont les caractéristiques du produit sont conçues ou structurées varie également. De plus, ils peuvent donner accès à une multitude d'actifs sous-jacents autrement peu disponibles.

Cependant, cette diversité de choix ne risque-t-elle pas de détourner les investisseurs d’un prérequis essentiel: disposer d'une solide appréciation du marché du ou des sous-jacents du produit structuré en question?

La multitude de structures existantes présente des avantages indéniables et offre à l'investisseur une grande flexibilité. Toutefois, si les investisseurs n'ont pas une vision claire du marché, certains d'entre eux pourraient être tentés par des produits structurés portant sur des actifs sous-jacents dont ils n'ont pas une appréciation objective. Trois biais de la finance comportementale peuvent expliquer ce cas de figure: l'aversion aux pertes, le comportement grégaire et le biais rétrospectif. Tout investisseur souhaitant s’orienter vers les produits structurés doit être pleinement conscient de ces biais. 

Le biais rétrospectif est lié à la disponibilité d’informations à propos du résultat d’un événement passé, sur lesquelles une personne se basera pour prendre une décision.

Le concept d'aversion aux pertes désigne la tendance qu'ont les individus à préférer éviter les pertes plutôt que de réaliser des gains. La promesse de protection du capital de certains produits structurés peut donc prêter à confusion et inciter les investisseurs à prendre des positions sur des sous-jacents qui ne correspondent pas nécessairement à leur profil de risque ou à leur portefeuille.

L’instinct grégaire, aussi appelé comportement moutonnier, désigne le phénomène qui consiste pour un grand nombre de personnes à agir de la même manière au même moment. Les tendances des marchés boursiers, les bulles et les krachs peuvent résulter de ce phénomène. L’instinct grégaire peut également expliquer certaines tendances dans le secteur des crypto-monnaies. Les produits structurés, qui offrent aux investisseurs une exposition à des actifs sous-jacents autrement moins accessibles, peuvent également encourager ce type de comportements. 

Enfin, le biais rétrospectif est lié à la disponibilité d’informations à propos du résultat d’un événement passé, sur lesquelles une personne se basera pour prendre une décision. Initialement documenté par Fischhoff (1975), le biais rétrospectif tend à modifier la perception de l'inévitabilité d'un événement lorsque son résultat est déjà connu. Fischhoff a constaté que le fait de rapporter l'occurrence du résultat d'un événement augmente la probabilité perçue de sa survenance dans le futur. Ainsi, dans la mesure où certains produits structurés reposent en partie sur des résultats passés, la perception de la probabilité d’occurrence peut être biaisée en faveur de la répétition du même résultat.

Ces biais comportementaux peuvent constituer trois obstacles à l’appréciation objective du marché par les investisseurs, les empêchant par là même d’identifier les actifs sous-jacents qui correspondent le mieux à leur stratégie d’investissement.

Les produits structurés offrent une souplesse d'investissement sans précédent, ce qui est particulièrement précieux. Toutefois, les investisseurs doivent veiller à ne pas se laisser tenter par un placement qui ne serait pas pleinement réfléchi. En effet, lorsqu’une trop grande attention est portée à la structuration du produit au détriment de son ou ses sous-jacents, ce type de décision peut conduire à une inadéquation entre le véhicule sélectionné et le besoin réel d'investissement.

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