La chronique des marchés de Vontobel au 27 mars

Jean Frédéric Nussbaumer, Vontobel

3 minutes de lecture

Nasdaq +0,71%, SPX +0,72%, Dow +0,55%, Russell +1,01%, SOX +1,01%, Eurostoxx +0,58%, SMI +0,90%.

 

Wall-Street a parfois ses raisons que la raison ignore. C’est une curieuse séance que vivent les marchés hier, marquée par l’absence d’actualité significative. Les rares nouvelles économiques du jour sont franchement décevantes. Les mises en chantier et les permis de construire ressortent tous deux en-dessous des attentes au mois de février alors que la confiance des consommateurs s’est effritée en mars. Accordons tout de même le bénéfice du doute au consommateur américain car le chiffre de février avait effectué un bond inhabituel, réagissant à la réouverture des administrations après le «shutdown». Rien de nouveau sur le front des négociations commerciales entre Pékin et Washington alors que les publications de résultats de sociétés se tarissent. Au chapitre brulant de la courbe des taux, l’écart entre le 2 et le 10 ans US se stabilise et reste en faveur du 10 ans, qui cote à 2,39% ce matin.

Pour en revenir au marché, l’indice S&P500 (SPX) revient au-dessus des 2800 points mais clôture nettement en-dessous de son plus haut du jour. La volatilité recule, l’indice VIX en baisse de 10% à 14,54, quelle belle opportunité de couverture pour ceux qui ne l’ont pas déjà mise en place! Le dollar repart fortement à la hausse, le dollar index DXY est presque de retour à 97 alors que la paire euro/dollar revient à 1,1255, prochain support 1,1177 (le bas en séance du 7 mars). Le pétrole rebondit vigoureusement après que la Russie a fait savoir qu’elle appliquerait de façon disciplinée les coupes de production décidées avec les pays de l’Opep, le WTI Light Crude à 59,90 dollars le baril ce matin.

Au registre des secteurs, les médias poursuivent leur hausse. Viacom (+7,6%) et CBS (+3,4%) bondissent après des informations du New York Post évoquant une prochaine reprise des négociations de fusion entre les deux groupes US de divertissement et de médias. Les bancaires font enfin l’objet d’achats à bon compte (bottom fishing) et les biotechs se réjouissent du nouveau rebond de Biogen, qui s’adjuge 5,75% après avoir annoncé vouloir racheter 5 milliards de dollars de sa propre action. Bed Bath & Beyond (BBBY +21%) flambe après un article du Wall-Street Journal affirmant que trois fonds activistes, Legion, Macellum et Ancora, ont acquis ensemble 5% du capital du groupe. Ils auraient initié une campagne afin de faire révoquer la totalité du conseil d’administration et le CEO du groupe, dont le cours a chuté de 75% en 5 ans et dont les marges bénéficiaires sont en recul. Après un gain d'environ 1% en séance, Apple inverse la tendance pour finir en baisse de 1%. Une juge de la Commission du commerce international des Etats-Unis a donné partiellement raison, mardi, à Qualcomm (QCOM +2,4%) qui accuse notamment Apple d'avoir violé trois de ses brevets. La juge a recommandé en conséquence l’interdiction d’importer certains modèles aux Etats-Unis. Elle n'a pas précisé quels modèles d'iPhones seraient concernés par cette interdiction qui, a priori, ne devrait pas concerner des modèles récents.

En regardant les écrans ce matin, on serait tenté de se dire que tout va bien dans le meilleur des mondes. En regardant les écrans des marchés d’actions certes. Mais il y en a un qui garde toujours la tête froide, un peu notre Jiminy Cricket à nous, c’est le marché obligataire. Voyez le 10 ans US, dont le rendement a encore baissé un peu hier, il est considéré comme une valeur refuge et fait l’objet d’une demande croissante depuis quelques temps. Pareil en Allemagne où le rendement du 10 ans Bund est désormais clairement en territoire négatif. Méfions-nous donc de l’indécrottable exubérance des marchés actions. Méfions-nous mais ne boudons pas la hausse, pourquoi donc s’en priver? Rester sur cette vague haussière est une bonne idée mais il faut se couvrir, c’est important. D’ailleurs des économistes ont mis en garde hier contre des conclusions trop hâtives que les indices d’actions semblent tirer. Goldman Sachs a notamment jugé que les risques de récession était «assez bas», dans la mesure ou seule une petite partie de la courbe des taux s'est inversée. La baisse des taux long est due à des facteurs extérieurs aux Etats-Unis, a aussi souligné la banque d'affaires. De son côté, Mary Daly, la patronne de la Fed de San Francisco a affirmé qu'elle n'était «pas effrayée» par la récente inversion de la courbe des taux souverains américains, estimant que cela n'était pas forcément un signe de récession.

Mario Draghi vient de s’exprimer en indiquant que les risques pesant sur les perspectives économiques de la zone euro restent orientés à la baisse et la reprise de l'inflation est retardée, ce qui justifie le maintien d'une politique monétaire accommodante comprenant des taux d'intérêt négatifs. «Si nécessaire, nous devons réfléchir à d’éventuelles mesures susceptibles de préserver les implications favorables de taux négatifs pour l’économie, tout en atténuant les éventuels effets secondaires», indique-t-il. «Cela dit, la faible rentabilité des banques n'est pas une conséquence inévitable des taux négatifs». L’euro tente de rebondir suit au discours du patron de la BCE alors que le future Eurostoxx glisse quelque peu.

Ce soir le pataquès anglais se poursuit avec une séance du parlement britannique, les députés devant examiner pas moins de huit scenarii (good luck chaps). Comme les Brexiteers commencent à avoir peur d'un changement de cap, certains seraient finalement prêts à voter l'accord négocié par Theresa May, sur le mode «un mauvais accord vaut mieux que pas d'accord et un maintien dans l'UE». Mettre la frange dure de son propre parti au pied du mur, telle était justement la stratégie de la Première ministre ces derniers jours. Il semblerait qu'elle soit en passe de réussir. Mais en contrepartie de la volte-face, le départ de May serait exigé. Si cette hypothèse se confirmait, le Royaume-Uni quitterait l'UE le 22 mai de façon ordonnée.

Et ce n’est pas tout, aujourd’hui nous suivrons aussi les inventaires hebdomadaires du département américain de l’énergie, le discours d’Esther George, patronne de la Fed de Kansas City, la balance commerciale américaine et la confiance des consommateurs en Italie.

Selon le Financial Times, Renault veut reprendre les discussions en vue d'une fusion avec Nissan sous un an et envisage de la croissance externe, avec Fiat Chrysler en ligne de mire. Le quotidien britannique a appris que Carlos Ghosn aurait déjà discuté avec FCA il y a deux ou trois ans, mais le gouvernement français aurait mis le holà. Dow Inc remplacera DowDuPont dans le Dow Jones le 2 avril, après la décision du groupe de se scinder en trois. La société remplacera à la même date Brighthouse Financial dans le S&P500. General Electric Capital accepte de verser 49 millions de dollars à deux fonds pour mettre fin à sa mise en cause dans le dossier du Ponzi de Petters.

Notre recherche réduit son objectif de cours sur Crédit Suisse de 12,5 francs à 11,50 francs, sur Julius Baer de 40 francs à 38 francs et sur UBS de 16 à 15 francs. Nous restons à l’achat sur UBS et sommes neutres sur les deux autres valeurs.

Cette nuit et ce matin, les bourses asiatiques clôturent en ordre dispersé avec Tokyo en recul de 0,23% et Shanghai en progression de 0,85%. En Europe, les marchés ouvrent autour de l’équilibre alors que le future S&P500 progresse de 5 points. Nestlé semble s’essouffler quelque peu dans les niveaux de 95 – 95,50 francs, actuellement en recul de 0,4% à 94,80 francs, à suivre.

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