La chronique des marchés de Vontobel au 25 mars

Jean Frédéric Nussbaumer, Vontobel

3 minutes de lecture

Dow -1,77%, S&P 500 -1,90%, Nasdaq -2,50%, Russell 2000 -3,62%, Eurostoxx -1,8%, SMI -1,4%.

 

Wall-Street trébuche, déprimée par la publication d'indicateurs d'activité très décevants en Europe et fragiles aux Etats-Unis, qui font craindre un ralentissement économique plus prononcé que prévu. Les indices avaient pourtant atteint jeudi leur plus haut niveau en 5 mois (pour le S&P 500 (SPX) et le Nasdaq), grâce à la politique monétaire plus accommodante de la Fed. Mais vendredi, une brève chute des taux à 10 ans américains sous ceux à 2 ans, relance les craintes de récession. En effet, en temps normal, les taux à court terme sont inférieurs aux taux à long terme, l'inverse étant considéré par les économistes comme le signe d'anticipation d'une récession. Cependant, il faut pour cela que le phénomène d'inversion se produise de façon durable, et non ponctuelle, comme ce fut le cas ce vendredi. Sur la semaine, le Dow, le SPX et le Nasdaq reculent respectivement de 1,3%, 0,77% et 0,6%. Le rendement de l’emprunt US à 10 ans revient à 2,46%, plongeant de 10 points de base et au plus bas depuis plus d'un an. Le signal de la baisse est venu d'Europe, où les indicateurs «flash» PMI manufacturiers de mars ont particulièrement déçu, faisant chuter les marchés boursiers européens (-1,8% pour l'Euro Stoxx 50). L'indice PMI composite américain ressort aussi inférieur aux attentes, mais il reste fermement dans la zone d'expansion, alors que les chiffres des reventes de logements s'affichent robustes aux Etats-Unis.

La volatilité monte encore un peu, l’indice VIX en hausse de 7% à 17,62, l’or fait du surplace à 1317 dollars par once, ce qui indique par ailleurs que les investisseurs gardent la tête froide. Ils achètent des bons du trésor certes mais ne se ruent pas sans discernement dans tous les actifs dits «valeurs refuges». Le pétrole recule quelque peu, le WTI Light Crude à 58,69 dollars le baril ce matin. Le dollar reprend des couleurs, le dollar index DXY à 96,69. C’est probablement surtout la faiblesse de l’euro qui soutient le billet vert, l’euro/dollar à 1,1310 ce matin.

Rappelons que jeudi, les marchés boursiers s'étaient hissés au plus haut depuis 5 mois dans le sillage des annonces plus «colombes» que prévu de la Fed à l'issue de sa réunion de mardi et mercredi. La banque centrale US n'a ainsi plus l'intention de relever ses taux directeurs en 2019, et n'envisage plus qu'un seul tour de vis en 2020. En outre, la Fed a indiqué mercredi qu'elle mettrait fin en septembre à son programme de réduction du bilan, ce qui revient indirectement à assouplir sa politique monétaire.

Aux Etats-Unis, Donald Trump pérore. Le procureur spécial Robert Mueller n'a trouvé aucune preuve pour relier le Président américain à la Russie. «Aucune collusion, aucune obstruction, exonération complète et totale», s'est réjoui l'intéressé sur Twitter. L'enquête russe a toutefois entraîné l'inculpation de 34 personnes, dont des ex-proches du dirigeant. En France, Emmanuel Macron reçoit. Le président chinois Xi Jinping est en visite en Europe, et depuis hier en France. Mardi, il discutera avec le Président français, Angela Merkel et Jean-Claude Juncker. Au Royaume-Uni, Theresa May vacille. L'édition dominicale du 'Times' affirme qu'une fronde gouvernementale est en cours pour faire tomber Theresa May. Onze membres du cabinet seraient favorables à son départ, qui sera acté d'ici une dizaine de jours, selon l'un d'eux. L'intérim pourrait se jouer entre David Lidington (ministre et chef du cabinet de Theresa May), Michael Gove (ministre de l'environnement) et Jeremy Hunt (ministre des affaires étrangères).

En Chine, les négociations patinent. Robert Lighthizer et Steve Mnuchin doivent se rendre le 28 mars à Pékin pour reprendre les négociations commerciales sino-américaines. Mais plusieurs rumeurs, dont une émanant du 'Financial Times', laissent penser qu'une grosse pierre d'achoppement demeure au niveau du numérique. Les Etats-Unis estiment que la Chine ne fait pas assez d'efforts sur cette partie stratégique, qui concerne notamment les restrictions imposées par Pékin sur le stockage ou les transferts de données. La Chine aurait fait une proposition sur le commerce en ligne, finalement retoquée.

Alpiq s'inquiète de la sécurité d'approvisionnement de la Suisse en électricité, si aucun accord n'est conclu avec l'UE. S&P a réduit de «BBB+» à «BBB» la notation crédit long terme de Carrefour (-1,2%), pendant que Moody's a abaissé de «BAA2» à «BAA3» celle de Valeo (-0,65%). Apple Stream? Tout porte à croire qu'Apple va dévoiler aujourd'hui un service de vidéo en streaming, afin de concurrencer quelques stars, comme Netflix et Amazon. La «keynote» est prévue à 20h00 heure de Genève. Boeing devrait soumettre à l'agence de l'aviation civile américaine en ce début de semaine le logiciel de correction du système anti-décrochage des B737MAX, avec pour objectif d'obtenir le plus rapidement possible le retour en exploitation du monocouloir. Mais la situation est complexe car des autorités supérieures s'interrogent sur le processus de certification initial, qui certains jugent bâclé. On voit mal la FAA hâter son jugement alors qu'elle est sous le feu des critiques. Smart en danger? Daimler s'interroge sur l'avenir de sa marque Smart, selon le Handelsblatt. Le constructeur allemand serait à la recherche d'un partenaire en Asie, mais pourrait aussi renoncer à l'exploitation en cas d'échec. Merrill Lynch dégrade Bayer à Neutral, le titre en baisse de 2,6%, notez que Barron’s publie un article prudent sur Bayer. Crédit Suisse réduit Hermes à Neutral, l’action en recul de 1,2%. Kepler relève UBS à Hold, le titre en retrait de 1,2% Terminons par une note moins sombre avec Baron’s qui est positif sur Google.

Cette semaine sera marquée par l’événement d’Apple ce soir, des discours de membres de la Fed, la poursuite de la saga Boeing, du dossier du Brexit et des négociations sur le commerce entre chinois et américains. Nous aurons encore droit à quelques résultats de sociétés mais le marché n’en a cure, en ce moment il voudrait se rassurer au sujet de la croissance mondiale. A ce sujet, il faudra suivre de près l’évolution des taux à 10 ans aux Etats-Unis (inversion de la courbe ou pas inversion?) et aussi en Allemagne où le rendement du 10 ans Bund est passé négatif…

Et cela démarre plutôt bien avec l’indice IFO, du climat des affaires en Allemagne au mois de mars, qui ressort en hausse et au-dessus des attentes. Les futures US et européens réagissent très bien à la nouvelle, l’Eurostoxx et le future SPX sont tous deux revenus à l’équilibre, affaire à suivre…

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