La BoJ muscle ses rachats d’actifs face au coronavirus

AWP

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La BoJ n’a pas modifié son taux sur les dépôts des banques auprès d’elle, déjà négatif (-0,1%). Mais elle a nettement augmenté ses objectifs annuels pour certains de ses rachats d’actifs.

La Banque du Japon (BoJ) a nettement renforcé lundi sa politique de rachats d’actifs pour tenter de contenir l’impact de la pandémie du nouveau coronavirus sur l’économie nationale, mais sans parvenir à calmer la Bourse de Tokyo dans l’immédiat.

Dans la foulée d’une nouvelle intervention surprise de la Réserve fédérale américaine (Fed) dimanche, la BoJ avait avancé à la dernière minute sa décision de politique monétaire, alors qu’elle était initialement prévue jeudi.

Conformément aux attentes, l’institution monétaire n’a pas modifié son taux sur les dépôts des banques auprès d’elle, rivé à un niveau négatif (-0,1%) depuis janvier 2016. Creuser ce taux encore davantage risquait d’être contreproductif pour les banques, et donc in fine pour les épargnants.

La BoJ a donc renforcé d’autres outils monétaires où sa marge de manoeuvre est plus importante: ses rachats d’actifs, visant à stabiliser les marchés financiers et veiller à ce qu’ils ne manquent pas de liquidités.

Elle a notamment doublé son plafond annuel de rachats de fonds négociés en Bourse (ETF), porté à 12.000 milliards de yens (101 milliards d’euros) contre 6.000 milliards de yens précédemment.

L’institution a aussi doublé son objectif annuel de rachats de fonds communs immobiliers japonais (J-REIT), relevé à 180 milliards de yens.

Ses rachats de titres de créances d’entreprises de court et long termes vont par ailleurs passer à 7.400 milliards de yens maximum par an, contre 5.400 milliards de yens jusqu’à présent.

Le Nikkei en berne

Toujours pour garantir des liquidités abondantes, la BoJ a également annoncé un nouveau dispositif de prêts de court terme (d’une maturité d’un an maximum) et à taux zéro, actif jusqu’en septembre. Ces prêts seront octroyés en échange de titres de dette d’entreprises comme collatéraux.

L’institution n’a en revanche pas modifié son plafond annuel de rachats d’obligations publiques japonaises, maintenu à 80.000 milliards de yens, pour faire en sorte que les rendements des obligations à dix ans demeurent autour de zéro.

Dimanche, les six principales banques centrales mondiales, dont la Fed, la Banque centrale européenne (BCE) et la BoJ, ont par ailleurs assoupli les conditions auxquelles elles s’échangent des devises entre elles, afin de sécuriser l’approvisionnement des marchés financiers en dollar américain.

Cependant cette panoplie de mesures n’a pas suffi à ramener l’optimisme à la Bourse de Tokyo, très nerveuse tout au long de la séance.

Après s’être apprécié juste après les annonces de la BoJ, l’indice vedette Nikkei est brutalement reparti en baisse pour finir sur un repli de 2,46% à 17.002,04 points, son plus bas niveau de clôture depuis début novembre 2016.

Le Nikkei avait déjà lâché 6% vendredi dernier et 16% sur l’ensemble de la semaine écoulée, où les Bourses mondiales se sont effondrées, tout comme les prix du pétrole.

«Bricolage à la marge»

«C’est le mieux que la BoJ ait pu faire à l’heure actuelle. La BoJ avait toujours prouvé qu’elle avait suffisamment d’outils en en sortant de nouveaux, mais cette fois-ci il n’y avait rien de neuf», a réagi Masaaki Kanno, économiste en chef chez Sony Financial Holdings cité par l’agence Bloomberg.

Les mesures dévoilées par la BoJ «manquent de mordant», a aussi déploré Marcel Thieliant de Capital Economics, selon lequel l’institution s’est contentée d’un «bricolage à la marge».

La BoJ a déjà racheté des ETF en grandes quantités ces derniers jours, sans que cela ait pu empêcher la Bourse de Tokyo de s’écraser, faisait encore remarquer M. Thieliant dans sa note.

Les politiques monétaires accommodantes et les mesures d’aide budgétaire des gouvernements «ne sont pas un remède direct à la pandémie», qui peut encore empirer, a déclaré à l’AFP Mutsumi Kagawa, stratégiste chez Rakuten Securities.

«Il y a des incertitudes significatives sur les conséquences de l’épidémie du Covid-19 ainsi que sur l’ampleur et la durée de leurs impacts sur l’économie nationale et mondiale», a même rappelé la BoJ dans son communiqué lundi.

«Il y a tellement de facteurs incertains. Il est nécessaire de continuer à surveiller» l’évolution de l’économie japonaise et mondiale, a ajouté son gouverneur Haruhiko Kuroda lors d’une conférence de presse à Tokyo.

«Coronavirus ou pas, s’il y a des pressions sur l’économie et les prix, nous envisagerons des mesures additionnelles d’assouplissement monétaire pour y faire face», a-t-il assuré.

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