Le bitcoin, un actif refuge en temps de crise?

Stéphane Ifrah, Napoleon Group

2 minutes de lecture

Chronique blockchain. Il est possible de définir la valeur intrinsèque du bitcoin. Reste que seule l’adoption de masse lui permettra de décoller.

Nous sommes en train de vivre une période historique sur les marchés financiers. Ce que nous observons aujourd’hui restera dans la mémoire collective très longtemps. Dans ce contexte, les cryptomonnaies ne semblent pas pouvoir réellement échapper à ce mouvement de liquidation planétaire à court terme. Il est très difficile d’imaginer le monde financier de demain alors que la crise ne fait que commencer. C’est lors des crises profondes que les cartes peuvent être rebattues de manière drastique et inattendue.

Pour savoir si les cryptomonnaies ont une chance d’émerger dans les années à venir, il faudra vérifier un certain nombre d’hypothèses. En premier lieu, cette crise pourrait être l’avènement des monnaies digitales. Le cash risque de disparaitre car c’est un vecteur de transmission de maladies et cela fait longtemps que les gouvernements veulent l’éradiquer. Ensuite, il se pourrait qu’il y ait une défiance envers les banques centrales car c’est en partie suite à leurs largesses que nous nous retrouvons là où nous sommes. Bien-sûr, elles ne sont pas coupables de la pandémie qui gagne la planète, mais elles ont conduit à une très mauvaise allocation du capital suite à leurs programmes d’assouplissement monétaire et à leurs politiques de taux agressives.

On pourrait imaginer revenir à un système monétaire basé sur l’or,
même si cela ne serait pas très pratique pour les échanges commerciaux.

Dans un scénario très catastrophique, on pourrait imaginer revenir à un système monétaire basé sur l’or, même si cela ne serait pas très pratique pour les échanges commerciaux. Une monnaie digitale décentralisée pourrait alors tout à fait gagner la confiance des usagers. Pour cela, arriver à donner une valeur intrinsèque sera un élément essentiel dans l’adoption ou non d’une nouvelle monnaie.

En ce qui concerne le Bitcoin, quatre approches complémentaires peuvent être utilisées pour essayer d’en estimer la valeur intrinsèque:

  1. Modèle de vélocité: comme le Bitcoin peut être assimilé à une devise compte tenu de sa nature, il est alors possible d’utiliser l’équation MV = PQ pour en estimer la valeur. PQ représente alors la valeur totale des transactions, V représente la vélocité et M est la capitalisation du marché du Bitcoin. Les derniers chiffres sur CoinmarketCap font état de volumes de transactions journaliers autour de 35 milliards de dollars. Avec une vélocité de 10x, cela donnerait un prix du BTC à 50,000 USD.
  2. Modèle «stock to flow»: Par analogie avec les métaux précieux, cette méthode permet de situer un actif sur une courbe qui relie le prix avec le nombre d’années nécessaire à production constante pour doubler le stock existant. Avec le halving à venir, ce prix se situerait aux alentours des 100,000 USD. Il est à noter que cette méthode possède un R-factor de près de 90% avec le prix, ce qui en fait un candidat très sérieux.
  3. Modèle de réseau: il s’agit d’un modèle plus intuitif et qui fait l’analogie avec l’émergence des modèles type réseaux sociaux. En effet, ces derniers ne produisaient aucune valeur au début et pour autant étaient valorisés en milliards de USD. Et puis un beau jour, un business modèle à émergé et cela a donné naissance à quelques-unes des plus grosses capitalisations boursières (ex: Facebook). La valeur du réseau Bitcoin pourrait alors résider dans sa capacité à devenir une devise d’échange planétaire.
  4. Modèle du coût de production: pour produire 1 Bitcoin, les mineurs doivent dépenser des sommes très importantes. En effet, il faut acheter de nombreuses capacités de calcul, les stocker dans des data centers ultra contrôlés, alimenter le tout en électricité et enfin revendre ses Bitcoins pour couvrir tous ces coûts et espérer une marge. Il est estimé que le cout de production s’élève à 5-6,000 USD par Bitcoin avant le halving. Il ne serait pas déraisonnable d’avoir un prix 2 à 3 fois supérieur à ces coûts là à minima. En effet, il faut aussi couvrir le risque d’obsolescence et la volatilité du revenu pour assurer un profit aux mineurs.

Comme on peut le voir, contrairement à un certain nombre d’idées préconçues, il y a plusieurs méthodes de valorisation assez sérieuses sur ce nouvel actif. L’adoption de masse restera le point majeur pour voir sa valeur décoller. Mais la crise qui est juste en train de démarrer pourrait tout à fait servir d’accélérateur. Son aspect décorrélant sur ces dernières années pourrait également être un atout dans un cadre où l’on assisterait à une baisse généralisée des actifs plus traditionnels sur une longue période. Seul l’avenir nous le dira.

A lire aussi...