Les nouvelles tendances émergent souvent des Etats-Unis. Si le programme immobilier de Zohran Mamdani qui a gagné les primaires démocrates à New York devait être mis en œuvre, l’expérience aura valeur de test pour le secteur dans de nombreuses autres régions du monde.
Le démocrate est né en Ouganda, flls d’intellectuels de gauche qui ont migré à New York quand il avait 7 ans,. Il se place à la gauche de son parti et promeut le boycott d’Israël. Le démocrate de gauche a fait campagne pour un gel des loyers et promeut un vaste programme d’investissements dans des logements publics. Sa victoire a tellement surpris le Wall Street Journal que le quotidien de la finance a titré: «La crise immobilière est si grave que le prochain maire devrait être socialiste».
La situation new-yorkaise mérite donc une analyse sous l’angle économique. Mais l’agenda de la nouvelle star démocrate est aussi politique. Il comprend plusieurs mesures dignes des économies planifiées, des promesses de bus gratuits, de gardes d’enfant gratuits et des magasins d'alimentation appartenant à l’État.
Un secteur sous contrôle
L’immobilier new-yorkais est déjà très contrôlé et… très cher. Le loyer d’un appartement new-yorkais de deux pièces coûte 5560 dollars après une hausse de 17,5% en un an, selon le WSJ qui cite une étude de l’agence Zumer. Le système de «stabilisation des loyers», initié en 1969, qui limite l’augmentation annuelle des loyers, est actuellement en vigueur pour la moitié du parc de la ville. Il suppose que le ménage dépense plus du tiers de son revenu au loyer. L’offre n’augmente guère. A New York, le taux de vacance est tombé au plus bas depuis 1968, à 1,4%. En 2019, la ville a rendu plus difficile la hausse de loyers de plus d’un million d’appartements régulés.
Comme sur d’autres marchés immobiliers du monde, les contrôles étatiques réduisent l’offre et augmentent les prix. Selon le dernier rapport trimestriel du Real Estate Board of New York, au premier trimestre 2025, on a dénombré 332 dépôts de demandes de permis de construire de nouveaux bâtiments. Cela représente une baisse de 42% par rapport à la moyenne historique (depuis 2008).
«De plus en plus de résidents cherchent à quitter la ville, notamment au profit de la Floride.»
La situation financière de la capitale de la finance mondiale n’arrange rien, même si sa note est de Aa2 auprès de l’agence Moody’s. Le pourcentage de recettes fiscales de New York dédié au service de la dette est passé de 9,6% en 2022 à 10,2% en 2023, selon le rapport 2024 du «Comptroller» de la ville.
La Floride profite des malheurs de New York
Un regard plus macro souligne les méfaits de l’expérience new yorkaise. De plus en plus de résidents cherchent à quitter la ville, notamment au profit de la Floride.
Daniel Mitchell, sur son site International Liberty, note que l’écart de dépenses publiques par habitant entre New York et la Floride est passé de 30% en 2000 à à 133% en 2024, citant une étude de l’Economic Policy Innovation Center.
La Floride et New York ont une population de taille similaire, 23 millions pour la première et 20 millions pour la seconde, mais le budget de New York est le double de celui de la Floride, critique l’essayiste Fared Zakaria, un centriste qui a voté pour Barack Obama en 2008, dans le Washington Post.
L’écart de dépenses entre New York et la Floride s’explique en particulier par l’emploi différent du programme Medicaid, mais aussi par le fait que New York dépense 35'000 dollars par étudiant et par an, – le niveau le plus élevé du pays –, contre 13'000 dollars en Floride, malgré des résultats de formation bien meilleurs en Floride. L’augmentation des dépenses ne s’est nullement traduite par une amélioration des services de l’Etat, juge Fareed Zakaria. Logiquement, de nombreux citoyens new-yorkais partent pour la Floride.
La tendance risquerait de s’accélérer si Mamdani était élu maire de New York cet automne. Et le programme immobilier de Mamdani n’est pas le seul point qui incite au départ. Sur de nombreux points, le candidat à la mairie, un proche de Bernie Sanders, a pris des positions pro-palestiniennes qui font parfois peur aux membres de certaines communautés. Pour certains «Juifs new-yorkais, le triomphe d'un candidat musulman qui a refusé de désavouer l'expression «mondialiser l'intifada» a suscité des doutes quant à leur place dans la ville», analyse le Wall Street Journal.
Les milieux immobiliers new-yorkais ne sont pas les seuls à s’inquiéter pour l’avenir de New York. L’interventionnisme accru risque pourtant de donner des idées dans d’autres coins du monde.
Un discours qui s’étend à l’Europe
En Suisse, certaines associations de locataires reprennent des thèses similaires. A Berlin, une initiative de la coalition rouge (SPD) et noire (CDU) a été lancée pour autoriser les expropriations, par exemple pour des raisons climatiques, indique la NZZ. Le projet porte le nom de «Vergesellschaftungsrahmengesetz» et devrait être débattu cette année au parlement du Land. Les autorités notent que les loyers berlinois ont doublé entre 2015 et 2024. L’interventionnisme berlinois des dernières années a conduit à une raréfaction de l’offre et une hausse des prix. Pour la gauche, l’interventionnisme n’a pas été suffisant. Comprenne qui pourra. La règle interventionnisme compte aussi quelques exceptions. La plus connue est celle de l’Argentine où Javier Milei a mis fin à de nombreux contrôles et procède à un vaste programme de libéralisation. L’offre de logements s’est accrue de 170% et les loyers réels sont en baisse de 40% depuis octobre dernier, selon Ryan Dubé et le Wall Street Journal. Cette thérapie de choc semble fonctionner sans réduire la popularité du président libéral. Mais elle n’est qu’une exception sur la carte immobilière.