Synthétiser le dividende pour mieux le gérer

Levi-Sergio Mutemba

2 minutes de lecture

Les indices à décréments permettent de réduire le risque de non-versement des dividendes, mais posent des risques supplémentaires.

©Keystone

Les produits d’optimisation du rendement, tels que l’«autocallable» et le «barrier reverse convertibles» (BRC), figurent parmi les produits les plus demandés par les investisseurs. Mais la capacité de l’émetteur à payer à l’investisseur le rendement du produit ayant des actions comme sous-jacents dépend dans une large mesure du niveau des dividendes versé par l’indice boursier en question. Or, afin de couvrir sa position, un émetteur est amené à acheter l’indice lui-même (ou l’action individuelle), s’exposant ainsi au risque de dividende. Plus les dividendes sont faibles, moins le produit est attractif.

Le succès des indices à décrément est relativement récent et s’explique surtout par la crise du covid-19, qui a forcé l’ensemble du marché à réduire de façon considérable le niveau des dividendes. D’où l’idée de lancer des indices dits «à décrément» ou de «dividendes synthétiques». Qui consistent à soustraire d’un indice de rendement total une valeur correspondant à un dividende prédéfini.

«La banque émettrice conserve le dividende qu’elle reçoit, afin d’être en mesure de financer les futures versements sur le produit.»

«Ce décrément reflète le réinvestissement des dividendes de l’indice à un taux inférieur au taux de rendement du dividende des constituants de l’indice de base», explique Norbert van Veldhuizen, Head of Equity Index Product EMEA, chez FTSE Russell, dans une présentation à but éducatif. «Ce décrément peut être calculé de différentes façons. Soit en appliquant un nombre fixe de points de dividende, soit en appliquant un pourcentage également constant», poursuit l’expert.

De cette manière, du point de vue de la banque émettrice, le risque de non-versement des dividendes est considérablement réduit. Tandis que l’investisseur bénéfice d’un niveau de coupons plus élevé. «Les conditions offertes à l’investisseur reflètent le coût pou l’émetteur de sa couverture contre le risque de dividende», ajoute Norbert van Veldhuizen. «La banque émettrice conserve le dividende qu’elle reçoit, afin d’être en mesure de financer les futures versements sur le produit.»

D’après la base de données de Structured Retail Products (SRP), la France est le marché le plus actif en termes d’émissions de produits structurés utilisant des indices à décréments. En Suisse, la SIX a lancé une douzaine d’indices à décrément (six calculés en pourcents et six en points d’indice) depuis le 7 janvier 2022, couvrant les blue chips du Swiss Market Index.

D’après les experts de SIX Group, la demande de structurés adossés à des indices à décréments devrait rester robuste. Même en période de taux d’intérêt sensiblement plus élevés. La question se pose en effet, dans la mesure où, outre la réduction du risque de non-versement du dividende, le succès des indices à décréments s’explique également par la nécessité de surmonter les coûts liés à la faiblesse des taux d’intérêt qui a longtemps prévalu au lendemain de la Grande Crise Financière de 2008.

La demande devrait rester robuste, même en période de taux d’intérêt plus élevés.

Dans le cas d’un produit d’optimisation du rendement, consistant en la combinaison d’une obligation zéro-coupon et d’un dérivé (typiquement une option), il coûte davantage à l’émetteur d’en construire dans un environnement de taux faibles. La valeur présente du montant de remboursement futur du produit est en effet plus élevée lorsque les taux sont bas.

«Toutefois, si l’on prend en compte l’inflation, les taux réels dans la plupart des marchés demeurent négatifs. La demande pour les produits structurés offrant des coupons attractifs devrait par conséquent rester élevée», soutiennent les experts de SIX Group, dans une note introductive publiée sur son site.

Enfin, comme c’est le cas pour la plupart des innovations financières, les indices à décréments comportent un risque supplémentaire pour les investisseurs. «En effet, si le dividende synthétique est supérieur au dividende réellement versé par l’action, alors le sous-jacent à décrément réalisera une moins bonne performance que l’action classique», préviennent les experts d’Eavest, cabinet de conseil français en produits structurés. «Cependant, si le décrément est inférieur au dividende versé par l’action, alors l’indice à décrément réalisera une meilleure performance que l’action classique.»

A lire aussi...