Zone euro - La dynamique budgétaire prend le pas sur celle monétaire

Arthur Jurus, ODDO BHF

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Les contraintes budgétaires et l'augmentation des rendements des obligations d'Etat françaises montrent une perception accrue du risque par les investisseurs.

La campagne électorale en France est marquée par de nombreuses promesses de différents partis. Gabriel Attal, soutenu par Emmanuel Macron, veut réduire les factures d'énergie des Français de 15% l'hiver prochain et exonérer de frais de notaire les primo-accédants immobiliers pour les biens de moins de 250'000 euros. Le Nouveau Front Populaire (NPF) promet de plafonner les prix des biens de première nécessité, de réintroduire un impôt sur la fortune, d'augmenter les droits de succession et de taxer plus durement les «bénéfices excédentaires». Le Rassemblement National (RN) propose de réduire l'âge de la retraite à 60 ans et de baisser la TVA sur l'énergie de 20% à 5,5%. Chaque parti présente des propositions qui nécessitent une augmentation des dépenses publiques.

De fait, les implications des récentes élections législatives sont surtout budgétaires. Le budget français pour 2023 présente des recettes de 1453 milliards d’euros contre des dépenses de 1607 milliards d’euros, créant un déficit de 154 milliards d'euros. Bruno Le Maire, l'ancien ministre des Finances, prévoyait de réduire ce déficit de 20 milliards d'euros pour atteindre 134 milliards d'euros d'ici 2029. En 2017, lorsque Macron a pris ses fonctions, le déficit était de 68 milliards d’euros. Depuis, le déficit budgétaire a fluctué, atteignant 2,3% du PIB en 2018, près de 9% en 2020 en raison de la pandémie de Covid-19, et 5,5% en 2023, bien au-dessus de la limite de 3% fixée par le traité de Maastricht. Selon les prévisions, ce taux devrait tomber à 3,9% d'ici 2029. La dette nationale, quant à elle, est passée de 98,1% du PIB en 2017 à 110,6% fin 2023, avec une projection de 115,2% d’ici 2029. Les dépenses sociales représentent une part importante du budget : en 2023, 40,8% des dépenses publiques étaient consacrées à la Sécurité sociale, 15,6% à la Santé, 9% à l'Éducation et 3,1% à la Défense.

Les contraintes budgétaires et l'augmentation des rendements des obligations d'État françaises (OAT), passés de 2,7% à 3,3% cette année, montrent ainsi une perception accrue du risque par les investisseurs. En comparaison, les rendements des Bunds allemands sont passés de 2,1% à moins de 2,6%. Le rendement des OAT a ainsi augmenté d'environ 60 points de base depuis le début de l'année, tandis que celui des Bunds a progressé d'environ 50 points de base. Les marchés boursiers ont également connu des fluctuations. Le CAC 40, principal indice de la Bourse de Paris, a perdu 5,4% au cours des quatre dernières semaines, mais est en hausse de 2,2% depuis le début de l'année. En comparaison, le DAX allemand a chuté de 1,1% ces quatre dernières semaines, mais affiche une hausse de 9,2% depuis le début de l'année. La perspective d'un gouvernement dirigé par le NPF est particulièrement préoccupante pour les marchés financiers, en raison des potentielles augmentations des dépenses et de la dette publique. Cette pression sur les taux est un risque négatif sur la croissance économique et qui pourrait conduire la BCE à réduire davantage les taux directeurs qu'une fois durant le reste de l'année. Les perspectives sur l'EUR restent neutres mais les facteurs de risque sont baissiers à court-terme.

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