Un T2 calme laisse entrevoir des opportunités sur les ABS à l’automne

Kevin Law, TwentyFour Asset Management

2 minutes de lecture

L’activité primaire des ABS européens a été modeste ces derniers mois.

Avec un volume de nouvelles émissions tout juste supérieur à 12 milliards d'euros, le T2 2022 a été le deuxième trimestre le plus calme de la dernière décennie, devancé seulement par le T2 2020, en pleine pandémie. Face à un contexte géopolitique et économique extraordinaire, les émetteurs ont dû s’adapter aux conditions de marché volatiles et au recul de la demande des investisseurs.

Le second trimestre avait pris un bon départ

À la suite d’une brève pause due à l’invasion de l’Ukraine par la Russie, 14 RMBS et ABS automobiles en France, Allemagne, Irlande, Pays-Bas et Royaume-Uni ont constitué l’essentiel du volume d’émission, tandis qu’un CMBS transfrontalier et des ABS de consommation en Italie et en Espagne ont contribué avec d’autres aux 7,6 milliards d'euros émis durant le mois. Toutefois, à mesure que les craintes d’inflation et de récession s’intensifiaient, les spreads ABS se sont élargis à l’unisson de l’univers obligataire général alors que l’activité sur le marché primaire s’est enlisée face à l’élargissement brutal des spreads. Ainsi, la majorité des émissions du trimestre se sont concentrées sur le mois d’avril, alors que les mois de mai et juin n’ont totalisé à deux que 4,6 milliards d'euros.

Émergence de points communs

Malgré les conditions de marché difficiles, plusieurs émetteurs ont effectué des placements, lesquels présentent certains points communs. Premièrement, certains émetteurs et chefs de file se sont tournés vers un processus de commercialisation plus privé. Toutes les transactions placées depuis mai à l’exception de deux ont été proposées en privé aux investisseurs potentiels avant d’être annoncées publiquement comme «pré-placées» une fois les modalités convenues. Dans de telles conditions, les investisseurs régulièrement actifs sur l’ensemble de la structure de capital des ABS profitent du fait que les émetteurs tendent à se tourner vers leurs contreparties favorites pour garantir la certitude d’exécution. Les émetteurs peuvent ainsi éviter d’annuler ou de reporter des transactions qui auraient pu ne pas susciter suffisamment de demande si elles avaient été commercialisées publiquement. Pour les investisseurs, la transparence réduite de la syndication est compensée par des fixations de prix et des allocations plus favorables ainsi que par un dialogue plus direct avec l’émetteur qui leur permet d’exercer une plus grande influence sur la transaction en elle-même.

Les réactions des investisseurs ont également été un facteur déterminant dans la composition des structures de financement.
Des structures renforcées

Deuxièmement, les structures de financement ont été renforcées face à l’élargissement des spreads de crédit. La hausse des marges obligataires a durci les exigences des agences de notation avec davantage de rehaussement de crédit, mais les réactions des investisseurs ont également été un facteur déterminant dans la composition des structures de financement. Par exemple, Paratus, qui émet régulièrement des RMBS axés sur l’investissement locatif au Royaume-Uni, a choisi, pour sa nouvelle transaction commercialisée il y a tout juste deux semaines, d’augmenter les «step-up» et le rehaussement de crédit au détriment de l’effet de levier des fonds propres à la suite des échanges menés avec les investisseurs.

Pouvoir communiquer directement avec les émetteurs permet aux investisseurs de conduire des changements structurels visant à fournir une protection mieux adaptée aux détenteurs d’obligations. Les nouvelles transactions comportent désormais davantage de caractéristiques favorables aux investisseurs telles que des «step-up» plus élevés, l’amortissement accéléré et les fonds de réserve sans amortissement.

Placement en format «loan note» favorable à l’utilisation du capital

Troisièmement, la structure de certaines transactions prévoit le placement de la tranche senior sous un format «loan note» favorable à l’utilisation du capital qui permet aux banques de déployer leurs portefeuilles de prêts sous-utilisés afin de participer à de nouvelles transactions à des niveaux qui semblent actuellement très intéressants par rapport à d’autres opportunités de prêt en complément de leurs opérations de trésorerie habituelles.

Ce nouveau format semble intéressant pour les investisseurs réguliers en ABS européens et devrait compléter les fondamentaux déjà solides des structures ABS européennes.

Le marché primaire passe à l’heure d’été

Mais dans la mesure où de nombreux émetteurs réguliers se sont abstenus au T2, les investisseurs pourraient profiter d’un vaste éventail d’opportunités si les conditions de marché permettent à l’activité primaire de rebondir comme c’est traditionnellement le cas en septembre. Les émetteurs appréciés du marché devraient annoncer des transactions dotées de structures plus favorables aux investisseurs et avec des rendements bien plus élevés que la dernière fois où ils ont vendu des obligations. Si l’on ajoute à cela le fait que les ABS européens, qui sont presque exclusivement à taux variable, sont considérés par les investisseurs obligataires comme l’une des meilleures couvertures dans un environnement de taux haussier, nombre d’entre eux y verront l’opportunité de verrouiller ces rendements plus élevés et de profiter de l’élargissement des spreads de crédit.

A lire aussi...