Pour Didier Borowski, chef de la recherche chez Amundi, le ralentissement attendu de l’économie mondiale s’accompagnera de prix toujours élevés en 2023.
Marquée par une performance négative dans la plupart des classes d’actifs, à l’exception des matières premières et du dollar, 2022 a été l’année du «grand repricing», comme l’a formulé Amundi à l’occasion de la présentation de ses perspectives pour 2023. A quoi faut-il s’attendre pour l’année en cours? Selon Didier Borowski, responsable de la recherche macroéconomique globale chez Amundi, l’attention des marchés continuera à se concentrer sur l’inflation au cours des prochains trimestres. Les attentes pour 2023 d’Amundi peuvent se résumer comme suit: un atterrissage en douceur pour l’économie globale avec une inflation qui restera élevée.
Côté croissance, le produit intérieur brut (PIB) mondial ne devrait plus croître que de 2,1% en 2023, après 3,4% en 2022. Aux Etats-Unis, la croissance du PIB sera divisée par deux à 0,9% cette année (contre 2% en 2022). Dans la zone euro, le PIB devrait même se contracter de 0,7%, après une croissance de 3,2% estimée pour 2022. «L’épicentre de la crise sera dans la zone euro, pas aux Etats-Unis», a souligné Didier Borowski qui s’exprimait lors d’une présentation devant les médias à Zurich à la mi-janvier.
Bénéficiant de la réouverture de son économie, la Chine devrait, elle, évoluer à contre-courant des autres grandes économies mondiales avec une progression estimée à 4,4% cette année, contre seulement 3% l’an dernier. Dans l’ensemble, les économies des pays développés frôleront la récession (+0,3%) cette année, après une croissance de 2,6% estimée pour 2022.
Plus que la croissance, c’est l’inflation qui sera placée au cœur des préoccupations des investisseurs. Aux Etats-Unis, le renchérissement devrait être quasiment divisé par deux, passant de 8,1% en 2022 à 4,3% cette année, avant de redescendre à 2,3% en 2024, ce qui resterait encore supérieur à l’objectif de 2% visé par les banques centrales. Dans la zone euro, l’inflation ne diminuera qu’encore plus lentement, passant de 8,7% en 2022, à 7,5% cette année avant de retomber à 3,2% en 2024. «L’inflation sous-jacente ne va pas redescendre si rapidement», anticipe Didier Borowski. C’est pourquoi il ne s’attend pas à un assouplissement des politiques monétaires menées par les banques centrales, même si cycle actuel des taux d’intérêt est proche de son achèvement. «On assiste à une décélération de l’inflation – mais celle-ci demeure encore élevée. Les banques centrales n’ont aucune volonté de baisser leurs taux. Il ne faut pas non plus s’attendre à des baisses des taux d’intérêt aux Etats-Unis où les données du marché du travail demeurent robustes», observe le responsable de la recherche d’Amundi.
Dans son scénario principal (70% de probabilités) pour les marchés, le premier gérant d’actifs européen anticipe une situation de pat dans la guerre en Ukraine. Sur le plan politique, il pourrait y avoir des tensions croissantes entre les décideurs de la zone euro si les soutiens apportés par les politiques budgétaire s’avèrent inflationnistes. En matière de politique monétaire, la Fed va peu à peu réduire la taille de ses relèvements de taux, alors que la BCE va, elle, encore continuer à augmenter ses taux. Le ralentissement de l’économie mondiale finira ainsi par se traduire par une récession des bénéfices d’entreprises durant le premier semestre 2023, avant qu’une reprise n’intervienne. «Il serait prématuré de parier déjà sur une reprise. Les investisseurs sont excessivement optimistes à propos de 2023», considère Didier Borowski.
Quelle attitude faut-il alors adopter au cours des prochains trimestres? Pour Amundi, les implications de ce scénario de base pour les investissements seront les suivantes. Premièrement, les obligations sont de retour. Si durant le premier trimestre, les emprunts d’Etat et les obligations de degré investissement (IG) sont à privilégier, l’accent pourra être placé sur obligations d’entreprise de haute qualité durant le deuxième trimestre, avant que le crédit à haut rendement (high yield) ne prenne le relais plus tard dans l’année. Quant aux actions, les investisseurs seront à la recherche de points d’entrée favorable. La prudence, qui a dominé jusqu’en fin d’année dernière, pourra faire place à des achats dans les actions globales à partir du deuxième trimestre. Ce n’est qu’en second moitié d’année qu’il faudra s’intéresser aux opportunités qui se présentent parmi les valeurs cycliques, les petites capitalisations ou certaines valeurs des marchés émergents.