Retardataires de la compétitivité verte, réveillez-vous

Anne Barrat

2 minutes de lecture

Les gagnants de la transition énergétique seront les producteurs et exportateurs d’énergies renouvelables. Avis aux retardataires, avec Michael Urban de Lombard Odier.

Les résultats d’une étude réalisée par Lombard Odier et la Smith School of Enterprise and the Environment (SSEE) de l’université d’Oxford ont été présentés hier dans le cadre de Building Bridges. Ils sont fondés sur une méthode de calcul originale développée conjointement par les parties prenantes, qui combine deux approches pour donner une idée précise du degré d’avancement et du potentiel d’un pays dans la course aux énergies durables, défini comme sa compétitivité verte. La première est une photo à l’instant t du volume et de la complexité des produits verts exportés par un pays, autrement dit sa «compétitivité verte» mesurée par le Global Complexity Index (GCI) sur les 25 dernières années. La seconde, le Global Complexity Potential (GCP) est un indicateur avancé qui mesure le potentiel d’un pays à acquérir ou améliorer sa compétitivité verte sur la base de sa proximité moyenne avec des produits verts complexes qu’il n’exporte pas ou pas encore. Au premières place du palmarès de ces quelque 268 produits verts complexes figurent l’éolien et le solaire.

«Les pays forts sur des points stratégiques de la chaîne de valeur des énergies renouvelables seront en position de force pour exporter.»
Prime aux producteurs et exportateurs: Chine, Etats-Unis et Allemagne

Les premiers entrants se sont construit une position solide et durable depuis 1995. «Les pays qui ont été les premiers à investir dans la mise en place d’infrastructures et la production de technologies liées aux énergies renouvelables, souvent complexes et à forte valeur ajoutée, feront partie des grands gagnants de la transition énergétique, explique Michael Urban. Les pays forts sur des points stratégiques de la chaîne de valeur des énergies renouvelables, solaire et éolienne notamment, seront en position de force pour exporter. C’est là l'un des principaux enseignements de l’étude publié par Lombard Odier et la Smith School of Enterprise and the Environment (SSEE) à l’Université d’Oxford hier.» Dans le top 5 des gagnants d’un score fondé sur une combinaison du GCI et du GCP, qui tient compte des acquis, de l’évolution et du potentiel d’une nation en termes de compétitivité verte, figurent la Chine, les Etats-Unis et l’Allemagne. Si la première ne cesse de confirmer sa croissance et son leadership, les seconds tendent à marquer le pas. Tant et si bien que des suiveurs pourraient gagner du terrain. En Europe par exemple, où l’Espagne et l’Italie ont multiplié leurs efforts pour se profiler en première ligne des pays exportateurs d’énergies vertes forts de leurs capacités manufacturières et technologies écologiques. 

Les derniers ne seront pas les premiers mais…

Ainsi, même s’il sera difficile pour les retardataires de combler l’écart, rien n’est impossible ni écrit dans le marbre. L’étude souligne ainsi que les politiques de relance économique mises en œuvre dans le cadre du COVID ont créé des écarts d’investissement susceptible de redistribuer les cartes  voire de creuser les écarts. Le volet environnemental du plan Biden «Build Back Better», encore en discussion, pourrait renforcer les Etats-Unis dans son bras de fer avec la Chine. L’Italie et les Pays-Bas, qui affichent un GCI élevé pourraient perdre du terrain parce qu’elles ont investi moins de 0,1% de leur PIC dans la relance verte, contre 1% dans le cas de l’Allemagne, de la chine et des Etats-Unis. L’Australie et les Emirats Arabes Unis pourraient au contraire gagner du terrain grâce aux efforts qu’elles déploient pour intensifier leur capacité de production. Si les jeux ne sont pas faits, rien ne sert d’attendre. Le cas de la Suisse est à cet égard iconique. 

«Si la Confédération n’a pas mis l’accent sur la production d’énergie solaire et éolienne, elle a favorisé la montée en puissance de la Suisse dans la finance durable.»

«La Suisse est passée du 5e rang en 1995 au 23e rang aujourd’hui dans le classement du commerce mondial des produits verts (Green Complexity Index), relève Michael Urban. Un déclin certes important, mais qui mérite d’être nuancé: si la Confédération n’a pas mis l’accent sur la production d’énergie solaire et éolienne, elle a favorisé la montée en puissance de la Suisse dans la finance durable. La place financière helvétique est un acteur majeur de la finance durable.» Et d’ajouter que la situation géopolitique de la Suisse, au centre de l’Europe, la place en position de choix pour exporter des produits tels que le biogaz ou les équipements ferroviaires sur lesquels elle a un véritable savoir-faire vert.

Quelles leçons pour les investisseurs?

Investir dans la compétitivité verte revient à se concentrer sur le solaire et l’éolien. Dans un univers coté, les sociétés chinoises et américaines se taillent la part du lion. Les marchés de la dette privée sont également à prendre en compte. «La quantité d’énergie éolienne et solaire devrait quadrupler d’ici la fin de la décennie en cours. C’est pourquoi nous déployons, chez Lombard Odier, tous les efforts possibles pour développer des solutions d’investissement qui répondent à cette tendance majeure ainsi qu’aux besoins de nos clients. L’économie verte est en bonne voie, nous en avons la conviction, le verdissement des portefeuilles figure en haut de la liste de nos priorités, conclut Michael Urban.»

A lire aussi...