Présidence Trump: trois scénarios pour les marchés

Mary-Therese Barton, Pictet Asset Management

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Un mandat basé sur la négociation est une possibilité que les marchés n’ont pas anticipée. Elle présente une certaine valeur pour les investisseurs.

Avant l’élection présidentielle américaine, les marchés obligataires et monétaires anticipaient une victoire de Donald Trump. A présent, les investisseurs doivent trouver réponse à la question de leur avenir sous une nouvelle présidence Trump. Il existe selon nous trois options possibles, qui ont chacune des implications différentes pour les marchés.

Tout d’abord, il y a la présidence Trump «classique», celle que le marché anticipait, et qui comprend des droits de douane agressifs, des réductions fiscales pour les entreprises et une tendance à la déréglementation.  

Ensuite, il y a la présidence Trump  dite «imprévisible», sans direction fixe. Elle entraînerait une volatilité accrue, qui apparaîtrait dans certains actifs, mais pas tous.

Enfin, il y a la présidence Trump basée sur la négociation, qui va chercher à obtenir des accords bénéfiques pour les Etats-Unis en utilisant les positions extrêmes présentées lors de sa campagne comme points de départ. Cette dernière version est celle que les marchés n’ont pas anticipée, présentant ainsi une certaine valeur pour les investisseurs.

Défis des taux

La tâche des investisseurs obligataires est en outre encore compliquée par la réaction de la Réserve fédérale américaine aux résultats électoraux. Le contrôle républicain de l’exécutif et du législatif ouvre la porte aux politiques trumpiennes de réduction des impôts et d’augmentation des déficits, influençant la courbe des taux.

Face à une conjoncture solide, les investisseurs ont déjà revu leurs attentes concernant le cycle des taux actuel. La Fed devrait encore les réduire, mais moins que prévu. Les politiques de Trump en matière de douane et d’immigration, ainsi que des dépenses budgétaires plus élevées et des impôts inférieurs, risquent d’être inflationnistes. Ces deux tendances pourraient faire grimper le taux terminal des fonds fédéraux – le niveau auquel le taux d’intérêt directeur est susceptible de se stabiliser – ainsi que la trajectoire qui y conduit.

Pour les investisseurs obligataires, une composante inflationniste plus élevée de la courbe des taux d’intérêt pourrait être aggravée par une augmentation des primes à terme – c’est-à-dire des primes de risque associées à la détention d’obligations d’échéance longue – et ce à cause des risques associés au déficit américain croissant.

Fléchissement du dollar?

Les droits de douane tendent à renforcer la monnaie du pays qui les impose. Bien qu’on puisse débattre si Trump appliquera réellement les 60% de droits sur la Chine, promis lors de sa campagne, le marché anticipe des mesures commerciales significatives. Alors que le dollar profitait déjà de la situation économique, Trump lui a offert un deuxième coup de pouce.

Néanmoins, si, comme nous le pensons, Trump finit par retenir ses coups contre le commerce, le billet vert pourrait finir par rendre une partie de ses gains.

Un dollar fort pénalise la dette des marchés émergents, car les pays qui empruntent en dollars doivent rembourser davantage au regard de leur propre monnaie et de leur production. La Chine pourrait toutefois atténuer ce phénomène en augmentant ses mesures de relance économique. Pékin y a déjà injecté 2 000 milliards de RMB (soit 1,6% du PIB) et permis l’émission de 10’000 milliards de RMB de dette sur cinq, indiquant que d’autres mesures budgétaires étaient envisagées. Si le gouvernement estime qu’il doit faire plus en réponse à la proposition de Trump de réduire les importations chinoises, il dispose de la marge de manœuvre budgétaire pour le faire. Une relance chinoise majeure serait bénéfique pour les autres économies des marchés émergents, en particulier celles de ses voisins proches.

Parallèlement, la Banque centrale européenne devrait réagir à la fois à la menace des droits de douane américains et à la faiblesse de l’économie de la zone euro en assouplissant davantage sa politique monétaire. Nous pensons que la BCE devra abaisser ses taux en dessous leur niveau naturel.

Énigmes géopolitiques

Les effets économiques cachés de la présidence Trump à court et moyen terme sont liés directement à l'incertitude géopolitique qui règne aujourd’hui. Cette incertitude pourrait ajouter une prime de risque supplémentaire aux prix des actifs, une prime de risque trumpienne que les marchés n’ont pas entièrement intégrée. Peu importe le chemin que suivra son administration, nous devons nous attendre à de nombreuses surprises.

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