Opportunités et risques liés aux emprunts verts

Kunal Mehta & Loubna Moudanib, Vanguard

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Les principes de placement établis sont tout aussi importants pour les emprunts verts que pour les autres types d’investissement.

L’intérêt pour les placements ESG (intégrant des facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance) progresse très rapidement depuis des années: des investisseurs toujours plus nombreux veulent réduire les risques ESG et apporter, par leur participation, une contribution positive. Les obligations vertes ou green bonds font partie de la catégorie des emprunts conformes ESG, et financent des projets présentant une utilité écologique claire.

Une définition unitaire des emprunts ESG fait toutefois défaut. Il est également difficile pour les investisseurs de vérifier s’ils respectent véritablement leur promesse de durabilité.

Un univers de placement étendu

L’offre d’obligations vertes croît rapidement: une analyse de Morgan Stanley révèle que le volume d’émission des emprunts verts a atteint, dès le premier trimestre 2021, 50% du volume total de l’année précédente. Parmi les émetteurs de green bonds, on compte aussi toujours plus souvent des gouvernements: en 2020, les chefs d’Etats et de gouvernements de l’UE se sont accordés sur un plan de relance sous forme d’aides et de crédits pour un montant de 750 milliards d’euros, afin de venir à bout de la pandémie. Ce programme est financé notamment par des emprunts verts. Les entreprises suivent l’exemple des émetteurs publics et exploitent les coûts de financement généralement bas de ces obligations. Dans le même temps, elles peuvent ainsi renforcer leur profil de durabilité et profiter de la demande croissante à l’égard des green bonds.

La capitalisation totale du Bloomberg Barclays MSCI Global Green Bond Index
est passée de 15 milliards de dollars en 2014 à environ 600 milliards.

En 2014, Bloomberg Barclays et MSCI ont créé le Bloomberg Barclays MSCI Global Green Bond Index qui représente l’univers des Green bonds. A l’origine, l’indice se limitait à quelques rares banques de développement et organisations supranationales. Aujourd’hui, l’indice comprend de nombreuses entreprises. La capitalisation de marché des composantes de l’indice, qui s’élevait à 15 mil-liards de dollars en 2014, a progressé à environ 600 milliards.

Quels rendements par rapport aux emprunts traditionnels?

Lors de nouvelles émissions, il existe effectivement des indications évoquant une prime par rapport aux emprunts traditionnels, car les spreads des obligations vertes sont généralement plus faibles. Pour convaincre les investisseurs, on vend souvent les nouveaux emprunts avec un rendement plus élevé que celui des emprunts déjà négociés. En raison d’une forte demande, les emprunts verts sont désormais souvent sursouscrits, en Europe, au cours des quatre dernières an-nées, leurs spreads ont baissé de 23 points de base entre le moment de la fixation du prix et celui de l’émission (contre une baisse de seulement 19 points de base pour les emprunts traditionnels. Toutefois, selon le secteur et l’émetteur, les spreads peuvent varier fortement.

A part les spreads, nous ne voyons toutefois aucun signe de rendements supplémentaires durables des obligations vertes par rapport aux vanilla bonds. Selon notre analyse, les périodes d’un et de cinq ans présentent un rendement corrigé du risque à peu près similaire. Il n’est pas non plus possible de déduire des résultats que les emprunts verts protègent mieux ou moins bien un portefeuille contre les pertes liées aux hausses de taux, aux déclassements ou aux bouleversements économiques.

L’analyse de crédit conserve son importance

Les emprunts verts sont «pari passu», c’est-à-dire qu’ils sont assimilés à d’autres emprunts dans la structure de capital et que le risque de crédit vient de l’émetteur et est identique pour les deux types d’emprunts.

Les investisseurs doivent rester vigilants quant au «greenwashing».

Mais tous les green bonds ne sont pas identiques: comme les emprunts traditionnels, ils se distinguent aussi par leur qualité de crédit, leur devise, leur durée et leur structure. L’analyse fondamentale pour les évaluer reste donc la même dans les deux cas. De plus, les investisseurs doivent rester vigilants quant au «greenwashing». En effet, certaines entreprises émettrices sont plus soucieuses de leur réputation que de l’environnement.

Et bien que le marché des emprunts verts connaisse une croissance rapide, les investisseurs ont toujours beaucoup de mal à exploiter les avantages de la diversification, en particulier pour les emprunts d’entreprises.

Au vu de la surpondération de certains secteurs, émetteurs et devises par rapport au marché, et jusqu’à ce que l’univers des green bonds ait atteint une certaine taille et une certaine diversification, l’analyse fondamentale conserve une grande importance.

Le marché progresse, mais il reste des questions

Le marché des obligations vertes a connu une forte croissance, tout en en n’étant cependant qu’aux balbutiements par rapport à d’autres marchés obligataires. Il va continuer à se développer. Dans le même temps, de nouvelles lois et de nouveaux progrès en matière de normalisation (notamment via les Green Bond Principles de l’International Capital Market Association), la taxonomie de l’Union européenne pour une économie verte et les Green Bond Standards) apporteront selon toute probabilité davantage de transparence et d’obligations de rendre des comptes.

Les investisseurs s’intéresseront à des coûts les plus faibles possible, un horizon à long terme et la diversification. En effet, les principes de placement établis sont tout aussi importants pour les emprunts verts que pour les autres types d’investissement. La part des obligations vertes augmente dans d’importants indices obligataires. En conséquence, une compréhension précise de leurs carac-téristiques de risque intrinsèques constitue une condition importante pour la gestion de portefeuilles obligataires.

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