Les prix de l’avenir

Wilfrid Galand, Montpensier Finance

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Tout en scrutant la reprise et les tweets de Trump, les marchés actions se focalisent sur la fin de l’année et surtout sur 2021.

Partout, les marchés semblent évoluer sur une autre planète: depuis les plus bas du 18 mars, les grands indices actions mondiaux ont repris plus de 20%. Aux Etats-Unis, le Nasdaq est désormais en hausse depuis le début de l’année, proche de ses plus hauts historiques de mi-février. Pendant ce temps, plus de 40 millions d’américains se sont inscrits au chômage et la contraction de l’activité en Europe au deuxième trimestre pourrait atteindre 20%. Alors hors-sols ou visionnaires? 

La réalité est plus complexe. Le rôle des marchés est donner un prix au risque mais surtout au temps. Ils évaluent l’avenir et non la situation présente. A cet égard, les marchés actions font un choix clair: ils enjambent le deuxième, voire le troisième trimestre 2020 et se focalisent sur la fin de l’année et surtout sur 2021. Le scénario central des investisseurs est celui d’une reprise rapide de l’activité, en particulier en Chine et aux Etats-Unis, dynamisée par les plans de soutiens massifs et historiquement sans égal, tant des banques centrales que des Etats.

Les indicateurs les plus avancés repartent Outre-Atlantique.

Optimistes? Assurément. Mais pas sans fondement. Ni sans discernement. Déjà, les indicateurs les plus avancés repartent Outre-Atlantique: les indices de mobilités mesurés par Apple et Google ont nettement rebondi depuis fin avril et les réservations de restaurants sont de retour sur le site OpenTable au Texas et en Floride. En Chine, la consommation d’énergie est proche des niveaux d’avant crise et le trafic à Pékin et Shanghai est de retour à la normale. L’industrie allemande accélère elle aussi après une période de léthargie.

Mais les marchés savent aussi faire le tri entre les secteurs les plus susceptibles de rebondir rapidement – technologie, luxe, industrie – et ceux durablement affectés par des vents contraires – automobile, finance, tourisme – qui n’ont que peu profité du rebond. Pas d’euphorie généralisée et indistincte. 

Les indices de volatilité, des deux côtés de l’Atlantique,
demeurent ancrés autour du seuil de 30.

Les investisseurs savent que la reprise ne sera pas uniforme et qu’il faut faire preuve de vigilance. Les marchés obligataires ont certes permis ces dernières semaines de spectaculaires opérations de financement, à l’image des 56 milliards d’euros proposés le 28 mai au Trésor français dans le cadre d’une adjudication à 20 ans.  Mais les spreads de taux demandés aux entreprises, tant pour la dette à haut rendement que pour celle de qualité, sont loin d’être de retour à la normale.

Même sur les marchés actions, la nervosité reste de mise: les indices de volatilité, des deux côtés de l’Atlantique, demeurent ancrés autour du seuil de 30, souvent considéré comme décisif pour mesurer le degré de sérénité des intervenants. Rien d’étonnant avec le retour des tensions sino-américaines: un œil sur la reprise, un œil sur les tweets de Trump, voilà la nouvelle gymnastique des marchés!

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