Les marchés du crédit ont davantage de marge de manœuvre

Felipe Villarroel, TwentyFour AM

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Compte tenu de la tendance observée depuis le mois de mars, il est temps de réévaluer la valeur restante sur les marchés des titres à revenu fixe.

Notre opinion sur les taux sans risque est de manière générale que ces obligations ont fait leur travail, et qu’en l’absence de taux négatifs aux Etats-Unis, en Australie et au Royaume-Uni, il n’y a guère plus à faire. Toutefois, pour le crédit, notre point de vue est tout à fait différent.

Certaines obligations sur les marchés du crédit, notamment les obligations de meilleure qualité, revoient leurs niveaux les plus élevés en termes de prix (et par conséquent leurs rendements les plus bas) sur une base annuelle. Il est toujours tentant pour les investisseurs de faire des profits lorsque les prix reviennent au niveau «où ils étaient» avant un krach comme celui que nous avons connu en mars. Certains pourraient être particulièrement tentés cette fois-ci étant donné l’énorme incertitude qui nous attend encore, qui s’applique non seulement aux perspectives économiques, mais aussi aux tentatives mises en œuvre actuellement pour contenir le virus et assurer le développement potentiel d’un vaccin, des domaines dans lesquels les investisseurs ont peu compétence.

Les investisseurs sont «encouragés» à acheter des actifs plus risqués.
Il faut plutôt regarder les spreads

Avec nos «casquettes» d’investisseur de crédit, nous préférons regarder les spreads plutôt que les rendements absolus car l’environnement des taux a changé de façon spectaculaire. L’image ici est assez différente. La plupart des décisions d’investissement dans des titres financiers sont prises sur une base de valeur relative, et non sur une base absolue. En fait, l’une des principales voies par lesquelles les programmes d’assouplissement quantitatif (QE) sont censés fonctionner n’est autre que l’effet de portefeuille. En d’autres termes, cela signifie qu’à mesure que les rendements ou les rendements futurs des actifs sans risque diminuent et que la confiance revient à la suite d’une politique monétaire très accommodante, les investisseurs sont «encouragés» à acheter des actifs plus risqués. En bref, la valeur relative de ces actifs plus risqués devient plus attrayante.

Ainsi, lorsque nous examinons les écarts dans la plupart des classes d’actifs aujourd’hui, nous sommes loin des niveaux les plus bas. Nous pouvons voir de nombreux exemples de cela juste au niveau de l’indice (en utilisant des indices ICE). Les écarts de rendement élevés aux États-Unis sont à 600 pb, toujours plus larges que le quatrième trimestre de 2018. Les écarts de rendement élevé en euro se situent à 550 pb, encore plus larges que le quatrième trimestre de 2018 et similaires à d’autres périodes volatiles comme le premier trimestre de 2016. Les écarts des sociétés émergentes sont à un peu plus de 400 pb (rappel important: la note moyenne au niveau de l’indice est l’«investment grade»), assez éloignée du quatrième trimestre 2018 et similaire au premier trimestre 2016. L’indice CoCo dresse un tableau similaire. Ces dernières années, l’achat de produits de spread avec une vision à moyen terme à ce genre de niveaux s’est révélé être un investissement enregistrant un retour à deux chiffres quelques trimestres plus tard.

L’affirmation «cette fois, la situation est différente» est aussi dangereuse.
Les prix des obligations vont bien au-delà de leurs records

L’histoire ne se répète pas exactement, et cette fois, nous avons des facteurs que nous n’avions pas lors des précédents ralentissements économiques. Néanmoins, l’affirmation «cette fois, la situation est différente» est aussi dangereuse. Pour nous, les spreads gagneront le débat. Nous entendons par là que, malgré des niveaux de rendements absolus inférieurs pour un niveau de spread donné, ce qui se traduit par des rendements optiquement bas en crédit, les spreads ont encore de la marge pour continuer à se reprendre de manière significative. Mathématiquement, cela signifierait que les prix des obligations du crédit dépasseraient largement leurs records passés, à condition que les rendements des obligations d’État n’augmentent pas sensiblement (ce que nous considérons comme étant peu probable).

Il ne serait donc pas surprenant de voir plus de volatilité dans les mois à venir, compte tenu des circonstances que nous venons de vivre et de l’incertitude susmentionnée liée au virus. Toutefois, avec une vision à moyen terme et en particulier pour les investisseurs à la recherche de revenus, nous pensons que les marchés du crédit restent très attractifs.

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