La transmission ou cession d’une entreprise constitue une étape structurante pour tout dirigeant et ne se résume pas à une opération technique: elle engage des dimensions juridiques, fiscales, patrimoniales et bien sûr humaines. Comment faire d’une transmission d’entreprise en Suisse une réussite durable? Retour sur les éléments essentiels à considérer afin de gérer au mieux ce projet d’une vie.
35’000 entreprises vont changer de propriétaire et être vendues hors du cercle familial au cours de ces cinq prochaines années en Suisse. La grande majorité des propriétaires n’ont jamais effectué cet exercice et ne le referont peut-être jamais plus après.
Une question d’anticipation et de psychologie
La décision de céder sa société est souvent empreinte d'émotions. Fréquemment, les entrepreneurs familiaux ressentent le désir de transmettre leur entreprise, qu’il s’agisse de passer à une nouvelle étape de leur vie, d'explorer de nouveaux horizons ou même de prendre un repos bien mérité. Cependant, il convient de distinguer l’envie du degré de préparation, qu’il soit émotionnel ou factuel. Une transmission réussie nécessite une préparation solide. Bien plus qu'un simple souhait, cela nécessite une réflexion approfondie et une anticipation sur les plans stratégique, personnel et familial.
En tant qu’entrepreneur, il est essentiel de s’interroger sur le degré d’indépendance de son entreprise. Une société qui s’apprête à être cédée doit reposer sur des processus solides et une organisation claire, sans être trop liée à ses propriétaires. Cette dépendance pourrait limiter la faisabilité d’une transaction ou sa valorisation. Pour autant que cela soit possible, une situation préalable idéale est de commencer ou de réaliser la passation de la direction à des personnes clés en amont du projet de cession.
Sur le plan personnel, la cession de son entreprise peut être vécue comme un bouleversement. Prendre le temps de réfléchir à cette nouvelle étape de vie et à se projeter dans d’éventuels après la cession peut aider à atténuer le stress lié à cette transition. Il convient de ne pas sous-estimer l’enjeu psychologique d’une telle expérience.
La famille de l’entrepreneur joue également un rôle important dans ce processus. Un processus de cession ou de transmission d’entreprise est bien souvent indissociable d’une formalisation, au préalable, des implications pour la famille du propriétaire cédant. Que cela soit pour des questions de donations et d’héritage mais aussi de préservation de la gouvernance. Des discussions coordonnées entre membres de la famille ainsi que la formalisation d’une charte familiale sont des éléments importants à évoquer en amont. La notion d’équité est également centrale. En cas de transmission à un enfant ou à un collaborateur, la perception du principe d’équité par les autres parties prenantes nécessite une fine gestion. L’unité familiale ou managériale peut être mise à mal. A relever que dans les cas de rachats dans le cadre de la famille, une décote de 30 à 40% est fréquente, alors qu’elle est généralement de 20 à 30% lorsque l’entreprise est transmise à des cadres de l’entreprise.
Une autre question à aborder est l’échéance à laquelle un entrepreneur souhaite remettre son entreprise. Avoir le temps de préparer sa cession d’entreprise est un élément déterminant afin d’optimiser la valorisation intrinsèque de sa société. La maîtrise du timing, en agissant de manière proactive et pragmatique selon les conditions de marché, est un autre facteur clé de réussite. Dit autrement: se projeter à moyen terme, c’est mettre le plus de chances de son côté.
Structurer avant de transmettre son entreprise
100% des PMEs, même leaders dans leur domaine, ont besoin de mettre en ordre certains processus, éléments comptables, reportings financiers ou contrats avant de se lancer dans un exercice de vente. Les éléments de structure actionnariale et l’existence d’un pacte d’actionnaires ainsi que la définition du périmètre adéquat à transmettre sont également des éléments à considérer.
Il n’est pas rare que les entrepreneurs ne fassent pas de distinction entre la valeur et le prix de leur entreprise. Or, il s’agit de deux éléments qui peuvent être fondamentalement éloignés. La valeur est une notion théorique basée sur des éléments quantitatifs, calculables grâce à différentes méthodes de valorisation. Quant au prix de vente, il représente une valeur sur laquelle un acheteur et un vendeur trouvent une entente. Ce prix peut dévier de la valeur théorique du fait d’éléments qualitatifs tels que la qualité des contrats et des relations clients / fournisseurs, la position concurrentielle de l’entreprise, l’environnement des acquéreurs (stratégiques ou financiers) ou encore l’environnement économique général.
Par ailleurs, transmettre en toute transparence un message cohérent aux acquéreurs sur les raisons de la vente et sur le potentiel de la société étayé par un historique robuste permettra de valoriser au mieux le business lors de la transmission.
Confidentialité et professionnalisme
Le projet de cession d’entreprise nécessite de maintenir un subtil équilibre entre le besoin de créer un engouement auprès de plusieurs acquéreurs potentiels, tout en maîtrisant les aspects de confidentialité indispensables. Dans ce processus, un conseiller de confiance apporte une grande valeur ajoutée: il est garant de la discrétion relative au projet par la signature d’accords de confidentialité et le respect d’un calendrier rythmé.
Pour conclure, les entrepreneurs sous-estiment souvent la complexité que représente une transmission d’entreprise. Une cession d’entreprise obéit en effet à un processus qui nécessite des techniques et des connaissances spécifiques. D’où l’importance de se faire accompagner par des experts afin d’optimiser les conditions de transmission, mais également de préserver les relations entre cédant(s) et repreneur(s) lors des négociations, le conseiller jouant le rôle de médiateur entre les parties.