Les banques suisses prêtes à prendre le virage des cryptomonnaies

Yves Hulmann

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Plus de la moitié des instituts sondés par EY prévoient de lancer une offre en crypto-actifs, selon le baromètre des banques 2022 présenté par Patrick Schwaller.

Après le passage à vide de 2020, les banques suisses font à nouveau preuve d’un optimisme sans faille. Près de neuf établissements bancaires suisses sur dix (87%) qui ont été interrogés par le cabinet de conseil Ernst & Young (EY) anticipent une hausse de leur résultat opérationnel pour l’exercice 2021, soit une nette augmentation par rapport à l’an précédant où cette part n’était que de 53%. De plus, près de quatre banques sur dix (39%) anticipent même une hausse de plus de 10% de leur résultat opérationnel des six à douze derniers mois, indique le dernier Baromètre des banques 2022 d’EY publié mardi. Il y a un an, cette part se limitait à 12%.

De l’optimisme mais pas d’euphorie 

La plupart des 90 banques sondées par EY se montrent tout aussi optimistes pour l’avenir: en effet, 86% des établissements interrogées anticipent une évolution «plutôt positive» (hausse de leur résultat opérationnel entre 0 et 10%) ou «positive» (hausse supérieure à 10%) de leurs activités opérationnelles à long terme, soit à un horizon de plus de trois ans. Il faut remonter à 2018 pour trouver une proportion aussi élevée, située alors à 87%. «Les banques ont bien surmonté la crise. Elles font preuve d’optimisme sans que l’on puisse parler d’euphorie – car les défis restent encore trop importants», a résumé Patrick Schwaller, responsable de l'audit pour le secteur financier et associé chez EY Suisse, cité dans le rapport du cabinet de conseil.

On constate toutefois des différences importantes en fonction des catégories d’établissements. Ainsi, les banques privées se montrent très optimistes à long terme, avec 32% d’entre elles qui ont des attentes soit «positives», soit 68% «plutôt positives» envers leurs activités opérationnelles. En comparaison, les banques régionales et cantonales se montrent plus prudentes quant à leurs perspectives à long terme, même si ces établissements sont à nouveau plus optimistes quant à l’évolution de leurs résultats opérationnels au cours des trois prochaines années.

Vive concurrence des assureurs attendue dans les hypothèques.

Si les banques suisses ne s’inquiètent pas outre mesure de l’inflation – deux tiers des établissements sondés ne prévoient pas un renchérissement dépassant les 2% en Suisse à moyen et long terme -, elles ne négligent pas pour autant complètement le danger potentiel que représenterait une hausse forte et rapide des taux d’intérêt. Ainsi, 26% des instituts sondés, soit le double de l’an précédent, estiment qu’un tel scénario représente le défi le plus important dans la gestion des risques de taux pour les banques.

En outre, les banques suisses s’attendent à voir leurs parts de marché dans les hypothèques s’éroder au profit des assurances et des caisses de pension. Ainsi, plus de quatre banques sondées sur dix (41%) prévoient que les assurances continuent de gagner des parts de marché avec la clientèle privée au cours des cinq prochaines années, tandis que 37% d’entre elles estiment que sont les caisses de pension qui obtiendront une plus grande part du gâteau. En comparaison, seuls 28% des établissements bancaires interrogés estiment que ce seront les banques qui gagneront des parts de marché dans les affaires hypothécaires ces cinq prochaines années.

Cryptomonnaies: bientôt des placements comme les autres

Si les banques suisses s’étaient montrées jusqu’à présent plutôt prudentes à l’idée de proposer des placements dans les cryptomonnaies, plus de la moitié d’entre elles (55%) se montrent désormais prêtes à lancer des offres dans ce domaine – et cela déjà au cours des trois prochaines années. C’est le cas de plus des deux tiers des banques privées (68%), tandis que seule une banque cantonale sur deux envisage de proposer des possibilités de placement dans ce domaine et alors que cette part tombe à 48% chez les établissements régionaux.

Par ailleurs, plus de la moitié (55%) de l’ensemble des banques interrogées pensent que les cryptomonnaies vont s’établir sur le long terme comme une catégorie de placements classique, au même titre que les actions et les obligations. Ici, ce sont les banques étrangères (68%) et les établissements de gestion de fortune (64%) qui soutiennent le plus cette affirmation.

Des chances à saisir grâce la numérisation – des craintes face aux cyberattaques.

Autre thème d’actualité: la numérisation. Les offres numériques proposées par les banques, ou qui le seront à l’avenir, contribueront en particulier à apporter une amélioration de l’«expérience client» aux yeux de 83% des établissements sondés, tandis que la numérisation apportera aussi des avantages aux clients en termes d’accès à de nouveaux produits (36%) et de réduction des coûts (34%), estiment les banques sondées.

Pour autant, 83% des établissements bancaires interrogés estiment que le conseil personnalisé à la clientèle, par exemple en matière de placements, de prévoyance ou de financement demeurera la principale source de valeur ajoutée pour laquelle les clients continueront d’être prêts à payer une prime.

Si la numérisation n’est pas perçue comme une menace pour leur modèle d’affaires, les banques s’inquiètent des risques pouvant résulter de cyber-attaques. Plus de la moitié (55%) des établissements sondés estiment que le niveau de menace a significativement augmenté au cours des douze derniers mois. Cette part grimpe même à 70% chez les banques régionales qui se montrent les plus inquiètes à ce sujet. Pour prévenir de telles cyber-attaques, les établissements interrogés que la sensibilisation du personnel (78%) à ces questions est le moyen d’action le plus efficace, autant que les investissements dans la technologie et l’infrastructure.

Les placements ESG continuent de gagner en importance

Autre thème incontournable du moment, les placements durables sont considérés par près de la moitié des banques interrogées (45%) comme la plus grande chance pour elles de contribuer à une protection efficace du climat, suivie par l’octroi de crédits en tenant compte des critères de durabilité (27%).

Comme l’an précédant, plus de la moitié (51%) des établissements sondés estimaient en 2021 que les questions de durabilité doivent être intégrés dans le conseil en matière de placements ou qu’ils sont une part intégrante du processus de conseil. Ici, ce sont désormais les banques cantonales (69%), avant même les établissements de gestion de fortune (54%), qui misent le plus sur les placements durables dans le cadre de leur activité de conseil.

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