L'environnement restera plutôt difficile

Gilles Prince, Edmond de Rothschild (Suisse)

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«Un ralentissement est à prévoir mais nous n’anticipons toutefois pas de récession pour 2019».

Le 6 février 2018 sonnait le glas d'un environnement protégé par des politiques monétaires accomodantes et d'une hausse exceptionnelle de la valorisation des actifs financiers. La volatilité était de retour. Le reste de l'année a été ponctué de coups de théâtre politiques qui ont nourri un climat d'incertitudes inconfortable pour les investisseurs. Guerre commerciale entre les Etats-Unis et la Chine, douloureux divorce de l'Union européenne et de la Grande-Bretagne, bras de fer budgétaire entre l'UE et l'Italie, retour des sanctions contre l'Iran, quel sera le sort des marchés en 2019? Les réponses de Gilles Prince, membre de l'Association des Stratégistes d'Investissement de Genève (ISAG) aux quatre questions d’Allnews.

Quel scénario pour 2019?

«L’eau est tiède, mais juste pas assez chaude pour se sentir bien.» Nous nous attendons à ce que l’environnement financier difficile vécu en 2018 se poursuive en 2019. Les fondamentaux économiques resteront bien orientés bien qu’un ralentissement de la croissance économique globale soit à prévoir. Nous n’anticipons toutefois pas de récession pour 2019. Les incertitudes tant économiques que politiques seront à nouveau source de volatilité et de renversements de tendance, ce qui impactera l’allocation d’actifs. Une attention particulière est à donner aux développements économiques en Chine, dont les politiques monétaire et fiscale pourraient significativement influencer les marchés financiers mondiaux. Nous nous attendons donc à ce que les rendements des principales classes d’actifs soient en moyenne faibles, mais elles oscilleront de manière significative. Des opportunités subsistent toutefois au sein de chaque classe d’actifs, certains segments ayant exagérément soufferts en 2018.

Pour vous quel est l’événement à surveiller l'an prochain?

En Europe, hors Brexit, nous surveillerons en mai les élections au Parlement Européen sur fonds de négociation du budget italien, ainsi que la succession de Mario Draghi à la tête de la Banque Centrale Européenne en novembre. Du fait des élections, il est envisageable que l’incertitude liée au budget italien perdure pendant la plus grande partie de 2019 impliquant de facto une prime de risque coûteuse pour les banques italiennes et des écarts de taux en moyenne élevés. De l’autre côté de l’Atlantique, nous suivrons au mois de mars 2019 les négociations du relèvement du plafond  de la dette. Des taux d’intérêt américains plus volatils sont à attendre à mesure que l’on s’approche de cette échéance.

Les hedge funds, de manière sélective, devraient à nouveau
bénéficier d’un environnement de marché favorable.
Le Brexit est-il un sujet de préoccupation pour l'année à venir?

Que ce soit des points de vue économique, politique ou social, le Brexit marquera l’histoire européenne. Le 29 mars 2019, le Royaume-Uni quittera officiellement le bloc européen, c’est du  moins le scénario le plus probable! Le chemin jusqu’au traité de sortie reste tortueux alors que le temps presse. Les perspectives d’une sortie sans «deal» seraient peu réjouissantes pour le gouvernement actuel et l’économie britannique. Les conséquences du Brexit ne doivent pas être sous-estimées et se feront d’ores et déjà sentir pendant la période de transition, laquelle pourrait être étendue au-delà de 2020. Les investisseurs n’appréciant guère l’incertitude, il est fort probable que les actifs financiers britanniques, la devise anglaise en particulier, restent volatils en fonction du flux de nouvelles. Le Brexit est donc un sujet non seulement pour 2019, mais également au-delà.

Quelle allocation d’actifs dans un contexte de bear market?

Les investisseurs ayant le dollar américain comme devise de référence considéreront les placements monétaires comme un outil important de leur allocation d’actifs. Il permettra de réduire la volatilité du portefeuille et fournira un rendement positif intéressant relativement aux obligations. Les hedge funds, de manière sélective, devraient à nouveau bénéficier d’un environnement de marché favorable en lien notamment avec une volatilité plus élevée. Pour les actions, une croissance des bénéfices plus faibles, des taux d’intérêts et une prime de risque généralement plus élevés ne nous laissent pas envisager des rendements ajustés au risque aussi attractifs que par les passé. Une allocation aux actions prudente semble faire du sens dans un environnement de fin de cycle économique sans toutefois correspondre à un scénario de récession et donc de bear market.

 

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