Le pire n’est pas certain

Laurent Denize, ODDO BHF AM

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Il est urgent d’attendre une stabilisation des facteurs de risque, et surtout des signaux clairs du côté de l’inflation.

©Keystone

Avouons-le, la violence de la récente correction des marchés actions nous rend perplexe. Certes, la volatilité des actifs risqués était amenée à remonter avec la normalisation monétaire, mais aujourd’hui nous peinons à comprendre certains mouvements, tant les rotations sectorielles ou de style sont extrêmes. Les facteurs «croissance» et «momentum» en vogue jusqu’alors ont été délaissés et le facteur «value» ne remplit pas son rôle de balancier en raison des risques liés au Brexit ou au budget italien.
 

Quel est le constat aujourd’hui? 

Une croissance mondiale solide mais qui devrait être révisée à la baisse à 3,3% en 2019 quoi qu’en dise le FMI
Des bénéfices à l’échelle mondiale qui vont croitre d’environ 15% en 2018 et 10% en 2019 
Un dynamisme du marché de l’emploi et du crédit laissant peu de place à une quelconque récession 
Des taux d’épargne reconstitués et revus à la hausse aussi bien aux Etats-Unis (de 2,5% du revenu disponible en septembre 2005 à 6,6 % aujourd’hui), qu’en zone euro (stable autour de 10%) 
Moins de liquidité, notamment en USD (baisse du bilan de la Fed de 50 milliards de dollars par mois dès le mois prochain, et arrêt des achats nets d’obligations par la BCE fin décembre 2018) 
Des taux en hausse et un durcissement des conditions financières global 
Un fléchissement du commerce mondial et un risque marqué de dysfonctionnement des chaines d’approvisionnement 
Une hausse du prix du baril de pétrole qui déstabilise les équilibres politiques et de consommation
Une hausse du risque politique (Etats-Unis, Europe, Moyen Orient)

En Europe, les investisseurs avaient déjà largement intégré ces risques avec des performances nulles ou négatives (avant la baisse de la semaine dernière) malgré une croissance des bénéfices solides. 

«Face à cette correction à multiples facettes,
nous diminuons nos expositions aux actions.»

Que faut-il faire aujourd’hui? Face à cette correction à multiples facettes, nous diminuons nos expositions aux actions. Il est urgent d’attendre une stabilisation des facteurs de risque, et surtout des signaux clairs du côté de l’inflation. Car ne nous trompons pas, le vrai risque est une forte poussée des taux qui provoquerait une réaction en chaine sur les actifs risqués. Pour le moment, aucun indicateur avancé ne nous permet d’anticiper une forte pression inflationniste. Auquel cas, si les taux se stabilisent (notre scénario), il faudra revenir sur les actions. 

Reste à savoir quand renforcer son positionnement sur les actions européennes au détriment des actions américaines. Pour le moment il ne faut surtout pas se précipiter. Un P/E estimé à 12,5 dans 12 mois même s’il parait attractif recèle d’énormes disparités avec une partie de la cote à moins de 7 de P/E et l’autre autour de 30. Entre croissance et value, il faudra choisir son camp. Si la croissance ne fléchit pas trop, un retour à la moyenne est à attendre sur des sociétés aujourd’hui fortement décotées. En cas de bonnes nouvelles sur le front anglais et italien, nous pourrions assister à un rally de fin d’année. Le pire n’est jamais certain…

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