Le modèle 60/40 semble dépassé

Maria Sala, BlackRock

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Face au nouveau régime, les investisseurs institutionnels doivent repenser la construction des portefeuilles et se diversifier davantage.

Une plus grande exposition aux obligations indexées sur l'inflation, aux matières premières, ainsi qu'aux marchés privés en particulier aux infrastructures pourraient garantir la résilience des portefeuilles face à l'inflation et aux vents contraires de l'économie.

Enregistrant des pertes en 2022, le modèle de construction de portefeuilles 60% actions / 40% obligations (60/40) semble dépassé. La forte volatilité des marchés et des variables macroéconomiques ont fait plonger de 11% en moyenne les portefeuilles traditionnels 60/40. La persistance d'une inflation élevée et la crainte d'une faible croissance économique ont pesé sur les marchés financiers en 2022. En effet, les investisseurs ont connu le pire début d'année depuis un demi-siècle, enregistrant une baisse des marchés actions de 16,68% et de 16,12% pour les obligations.

L'inflation élevée relance le débat sur la pertinence du modèle de portefeuille 60/40. Peut-il faire un retour en force ou le nouveau régime de marché exige-t-il une plus grande diversification? Dans un contexte de bouleversements sismiques des marchés, les investisseurs confrontés à une inflation plus élevée, à une hausse des taux et à une croissance plus faible doivent réévaluer la construction de leurs portefeuilles.
Pendant la «grande modération», période caractérisée par une croissance et une inflation exceptionnellement stables, les investisseurs pouvaient compter sur l’intervention des banques centrales en cas de crise de croissance. En baissant les rendements, elles faisaient des obligations une couverture fantastique en cas de baisse des actions. Cette «corrélation négative» entre obligations et actions était la pierre angulaire des portefeuilles 60/40. Dans le nouveau régime caractérisé par une volatilité plus élevée, une inflation plus forte et des contraintes d'approvisionnement, les obligations ne fonctionneront plus comme stabilisateur de portefeuilles. Ceux-ci doivent être construits différemment.

Plusieurs investisseurs, y compris les gestionnaires d'actifs, les banques privées et de détail à travers l'Europe, adaptent la façon dont ils gèrent leurs portefeuilles en raison du nouvel environnement macroéconomique.

Compte-tenu du contexte macroéconomique actuel, il est important de refléter deux thèmes clés au niveau de l'allocation d'actifs stratégique. Premièrement, la résilience du portefeuille à l'inflation: en pratique, cela signifie une exposition plus importante que par le passé aux actifs tels que les obligations indexées sur l'inflation, les matières premières et les infrastructures. Deuxièmement, l'importance des marchés privés: compte tenu de l'incertitude macroéconomique, avec potentiellement plus de vents contraires à la croissance, les marchés privés sont devenus encore plus pertinents comme moyen d'accéder à des entreprises dotées de technologies innovantes dans des domaines de croissance structurelle, comme la numérisation et la transition énergétique.

Des investisseurs changent leur approche

Nous constatons que plusieurs investisseurs, y compris les gestionnaires d'actifs, les banques privées et de détail à travers l'Europe, adaptent la façon dont ils gèrent leurs portefeuilles en raison du nouvel environnement macroéconomique.

En premier lieu, ils reconsidèrent une adoption accrue aux indices. La croissance de l'investissement indiciel dans la région EMEA a continué de progresser, avec un taux de croissance annuel composé (TCAC) de 18,1% au cours des 10 dernières années.

De plus, ils poursuivent leur engagement en faveur de l'investissement durable. Les investisseurs européens continuent de comprendre que le risque climatique est un risque d'investissement. Une récente enquête menée auprès de 170 investisseurs a révélé que 63% d'entre eux n'ont pas modifié leur volonté d'investir de manière durable, malgré l'environnement de marché plus complexe de 2022. Vingt-trois pour cent ont affirmé qu'ils étaient plus susceptibles d'investir dans des stratégies durables en conséquence.

En outre, les investisseurs doivent élargir de plus en plus l'éventail des classes d'actifs détenues dans leurs portefeuilles au cours des cinq dernières années pour atteindre en permanence leurs objectifs d'investissement.  Les investisseurs Suisses suivent également ces tendances.

Le besoin des investisseurs de mieux contrôler leurs résultats se traduit par un recours plus important aux indices et par l'augmentation du nombre de «briques» de construction des portefeuilles. Nous considérons l'évolution des choix de mise en œuvre comme le reflet du désir des investisseurs de mieux gérer la baisse mais aussi de saisir de nouvelles opportunités lorsque des dislocations du marché se produisent, dans un environnement global qui leur demande d'être de plus en plus dynamiques et sélectifs.

Les investisseurs doivent adopter une approche globale du portefeuille et considérer les différents éléments constitutifs de leur portefeuille; comment ils interagissent, se complètent et se neutralisent potentiellement. Cela est particulièrement important dans un environnement marqué par la volatilité macroéconomique, où le comportement des taux ou l'exposition à l'inflation seront des facteurs déterminants pour les résultats globaux du portefeuille.

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