Le confinement informatique

Yves Longchamp, SEBA Bank

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Chronique blockchain. Un des enseignements de la crise du coronavirus est la nécessité d’avoir une bonne connexion internet.

Depuis quelques semaines, notre vie a basculé. Plus personne ne parle de cours de yoga, du dernier restaurant à la mode ou de la prochaine destination de vacances. Ce qui nous intéresse, avec la progression du coronavirus, est de rester en bonne santé et d’assouvir nos besoins vitaux comme en témoignent dans les magasins les rayons vides de pâtes, levure, sauce tomate… et papier toilette. Pas de blockchain jusqu’ici.

Ce qui a basculé, c'est notre rapport à la pyramide de Maslow, qui stratifient nos besoins des plus essentiels aux plus nobles, des besoins physiologiques aux besoins de réalisation de soi. Alors qu’il y a peu de temps encore, nous concentrions notre énergie sur les étages les plus élevés de la pyramide, nous sommes redescendus les étages à toute vitesse pour nous concentrer sur le rez-de-chaussée.

Une fois nos besoins physiologiques assurés, le confinement répond au besoin de sécurité. Pour les besoins supérieurs tels que les besoins d’appartenance et d’amour, besoin d’estime et finalement besoin de réalisation, une bonne partie de ceux-ci est réalisée de manière digitale.

Une partie de nos besoins physiologiques et de sécurité
est également comblée grâce à internet.

L’application de vidéo conférence zoom palie au manque de liens sociaux et résout en partie le besoin d’appartenance et d’amour, les réseaux sociaux permettent de combler le besoin d’estime et, finalement, la réalisation de soi peut se faire au travers de la participation à des cours digitaux, dont l'offre variée est souvent d'excellente qualité, allant de l’apprentissage du chinois, des cours de remise en forme en passant par les cours de cuisine et de peinture.

Même au premier échelon de la pyramide de Maslow, une partie de nos besoins physiologiques et de sécurité est également comblée grâce à internet. Livraisons de biens de première nécessité, de repas à domicile, de commandes de médicaments, tout cela se fait grâce à nos téléphones portables intelligents et est validé par nos empreintes digitales.

Un des enseignements de la crise du coronavirus est la nécessité d’avoir une bonne connexion internet. Certains prétendent même que la pyramide de Maslow repose aujourd’hui sur des fondations digitales qui s’expriment par le besoin de wifi.

Depuis que nous sommes confinés, notre quotidien privé, social et professionnel est dépendant de cette infrastructure. Ce n’est pas un hasard si Netflix et Youtube ont été invités à offrir leurs services en qualité normale plutôt qu'en haute définition afin de libérer de la bande passante et de favoriser les activités prioritaires.

Internet traverse donc tous les échelons de la pyramide de Maslow et, par symétrie, l’entièreté de notre pyramide de Maslow est disponible sur le web. Ceci implique que ne nous ne possédons pas nos données, c’est-à-dire notre identité digitale au sens large. Or, ceci a deux implications. D’abord, c’est une mine d’information qui est donnée gratuitement aux acteurs du web. Comme l’adage le dit, si c’est gratuit, c’est que vous êtes le produit! Deuxièmement, nous ne savons pas où et dans quelles conditions nos données sont stockées. On ne peut donc pas affirmer que ces dernières soient en sécurité puisque nous n'en contrôlons par l'accès.

Pour éviter le confinement informatique, la blockchain offre un moyen
d’organiser les données sensibles de manière robuste.

Alors, comment vivrions-nous la crise du coronavirus si internet n’était pas là? Je pense que nous la vivrions très mal car elle nous éloignerait encore plus les uns des autres et nous empêcherait, pour ceux qui en ont la possibilité, de travailler. Internet nous permet donc de vivre plus normalement cette situation anormale.

Alors que le COVID-19 représente un danger mortel et demande des mesures exceptionnelles, quel serait l’impact d’un virus de la même virulence qui s’attaquerait à internet. Imaginez un nouveau type de virus dont on ne connaît pas l’anti-virus et qui se propage rapidement à tous les échelons d'internet, paralysant la transmission de données, une sorte de pandémie informatique en soi. Si sa propagation n’est pas maîtrisée, nous perdrions potentiellement toutes nos données: celles stockées sur nos disques durs, l’ensemble des connaissances de Wikipedia, nos données bancaires, etc. Nous ne pourrions plus non plus communiquer par email et par messagerie. Pour limiter la propagation, le confinement informatique serait requis: pas plus de 5 sites internet consultés par jour et uniquement certains. Les conséquences seraient terribles pour l’économie et la société en général. Ce virus étant virtuel, il ne tuerait personne contrairement à celui qui nous tourmente aujourd’hui. Ses conséquences économiques et financières seraient toutefois majeures.

Pas de blockchain jusqu’ici. Et pourtant, c’est bien cette organisation décentralisée des données qui pourrait être la première ligne de défense en cas de pandémie informatique. Cela peut surprendre au premier abord, mais une blockchain est globale et locale à la fois. Il n’y a pas un fournisseur de service global qui détient les données, il y a un réseau global de de fournisseurs locaux (redondance) qui offrent des services et conservent nos données de manière sécurisée (cryptographique) afin que nous en ayons la propriété. Cette organisation est constituée d’une multitude de producteurs répartis dans le monde et auxquels chaque utilisateur a accès par opposition à un producteur global. En période de crise, la proximité et l’accès direct sont des valeurs prisées. C’est cette organisation décentralisée qui rend le système robuste.

Notre vie réelle et notre vie virtuelle se confondent chaque jour un peu plus. Pour combattre le coronavirus, la distanciation sociale et le confinement nous sont imposés. Pour éviter le confinement informatique, la blockchain offre un moyen d’organiser les données sensibles de manière robuste. Tirons de l’épreuve du coronavirus des enseignements utiles pour mettre en place les fondations digitales solides de notre société.

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