Le capital-risque labélisé durable, pas si simple

Anne Barrat

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Yohan Hill d’Adams Street Partners salue les initiatives de l’industrie des marchés privés pour relever le défi de la transparence et de l’accès aux données.

Dans un contexte où les marchés privés, capital-risque et capital investissement (private equity) montent en puissance, leur respect des normes de durabilité freine leur attractivité auprès d’investisseurs de plus en plus pointilleux sur ce sujet. Ce n’est pas faute de volonté des acteurs de l’industrie, souligne Yohan Yohan Hill, Directeur ESG et Investissement Responsable chez Adams Street Partners, un gestionnaire basé à Chicago et présent dans 30 pays sur les cinq continents, qui fête cette année 50 ans d’activités sur les marchés privés et gère environ 51 milliards de dollars d’actifs. La volonté est là, le problème est l’exécution.

La diffusion des normes de durabilité parmi les professionnels, acquis à la création de valeur supplémentaire qu’elles apportent sur l’horizon long terme d’investissement qui est le leur des marchés privés fait son chemin.

L’époque est révolue où performance et intégration des critères ESG n’allaient pas forcément de pair dans l’esprit des LPs (Limited Partners, qui investissent sur les marchés privés) et des GPs (General Partners, qui gèrent les investissements directs et indirects) du capital-risque et le capital investissement. A l’exception de quelques-uns, la grande majorité est acquise à la cause de la finance durable explique Yohan Hill qui a passé plusieurs années chez Trucost, la filial de S&P Global dédiée aux données environnementales avant de rejoindre Adams Street Partners. «Il n’y a aucune preuve, affirme-t-il, que l’intégration de contraintes ESG dans des investissements de capital-risque et de capital investissement réduise la performance. Certains investisseurs considèrent, au contraire, que le respect de critères ESG permet de prendre de meilleures décisions d’investissement et de réduire l’exposition aux risques non-financiers. Dans certains cas, les considérations ESG contribuent à créer de la valeur et mènent à de meilleures décisions financières ainsi qu’à de meilleurs résultats sociaux et environnementaux.» La diffusion des normes de durabilité parmi les professionnels, acquis à la création de valeur supplémentaire qu’elles apportent sur l’horizon long terme d’investissement qui est le leur des marchés privés fait son chemin. «La nette évolution de l’industrie des marchés privés vers l’adoption des critères ESG s’explique, entre autres, par la volonté d’améliorer le bilan ESG et d’éviter les risques: plus les processus décisionnels et de due diligence que nous mettons en œuvre en amont de nos investissements intégreront ces critères, plus nous pourrons mitiger les risques et identifier des opportunités d’amélioration.»

L’industrie se mobilise, des vendeurs de données aux VPs

Reste le casse-tête des données, les cibles d’investissement n’étant pas ou peu armées pour répondre aux exigences de reporting induites par les normes, existantes et en devenir. Ainsi, même si les acteurs de l’industrie, qu’ils investissent en direct ou dans des fonds de fonds, sont prêts à revoir leur allocation de capital pour privilégier des cibles en tout point conformes aux critères ESG, la réalité est têtue:«l’accès aux données ESG dans notre industrie, celle des marchés privés, est pour l’instant limité, regrette Yohan Hill. Mais cela est en train de changer, j’en suis convaincu, grâce aux récentes initiatives pour améliorer la transparence dans notre industrie, notamment l’ESG Data Convergence Project et l’Initiative Climat International (iCI), que nous avons rejointes aux côtés d’autres LPs et GPs. Elles témoignent de l’appétit croissant des investisseurs en capital-risque et capital investissement pour de meilleures données ESG et, surtout, de leur volonté d’évaluer les investissements et les portefeuilles sur la base de ces données.» Les vendeurs de données jouent un rôle majeur dans cette évolution, avec des fers de lance tels que MSCI ESG ou Preqin, qui proposent de plus en plus de solutions à l’absence de transparence des données, réduisant la part de compromis inévitable que doivent faire les LPs et les VPs en matière ESG. Plus contraignante, la pression des régulateurs et de nouveaux impôts (l’exemple des CFDs au UK), contribuent également à ce que l’industrie aille dans la bonne direction.