Le «en même-temps» des banques centrales

Nicolas Mougeot, Indosuez Wealth Management

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Les banques bénéficient d’une liquidité abondante alors que la hausse des taux continuera à restreindre les conditions d’octroi de prêts pour les particuliers et les entreprises.

Prise en étau entre une inflation toujours élevée et une crise de confiance vis-à-vis des banques commerciales, les banques centrales se retrouvent à mettre en place une politique monétaire assez inédite. En 2020 et 2021, afin de procurer de la liquidité aux marchés financiers, elles avaient opté pour une politique très accommodante grâce à des taux d’intérêt à zéro voire négatifs conjuguée à un rachat de titres obligataires. Combinée à des politiques fiscales elles aussi très accommodantes, cette approche a certainement contribué au retour de l’inflation.

L’exercice 2022 fut donc une année pivot au cours de laquelle les banques centrales sont rapidement passées de quantitative easing (QE) à quantitative tightening (QT): la Fed, par exemple, annonçait ses premières hausses de taux en février 2022. Dès l’été 2022, elle commençait aussi à diminuer son bilan, réduisant d’autant la liquidité sur les marchés financiers.

Selon les marchés financiers la situation ne sera pas tenable pendant très longtemps.

Depuis quelques semaines, le système bancaire traverse une crise de confiance avec la chute de la Silicon Valley Bank puis le mariage arrangé entre UBS et Credit Suisse. Les banques centrales se retrouvent donc devant un dilemme: comment lutter contre l’inflation tout en limitant l’impact pour les banques? La Fed a donc opté pour une nouvelle approche: augmenter les taux d’intérêt pour lutter contre l’inflation et en même temps fournir de la liquidité aux banques.

QE for wall street, QT for main street

La Fed a donc rehaussé son taux directeur de 25 bps le 22 mars et en même temps accru son bilan de près de 400 milliards de dollars en deux semaines alors qu’elle ne l’avait réduit que de 650 milliards lors des 10 mois précédents. Cette nouvelle stratégie pourrait être résumée en anglais par «QE for wall street, QT for main street» puisque les banques bénéficient d’une liquidité abondante alors que la hausse des taux continuera à restreindre les conditions d’octroi de prêts pour les particuliers et les entreprises.

Selon les marchés financiers la situation ne sera pas tenable pendant très longtemps. En effet, les investisseurs anticipent maintenant une baisse des taux directeurs de la Fed dès le mois de juin et un taux directeur inférieur de 100 bps d’ici la fin de l’année. A l’inverse, il y a seulement deux semaines, les marchés anticipaient une politique ferme de la Fed. Mais entre-temps, après la chute de deux banques aux Etats-Unis et en Suisse, le «en même-temps» s’est imposé aux banques centrales et aux investisseurs.

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