A la gestion de fond comme au football

Richard Colwell, Columbia Threadneedle Investments

2 minutes de lecture

Les investisseurs sont des sélectionneurs d’actions, ils examinent les entreprises sous toutes les coutures.

©Keystone

Désolé par avance pour ceux qui ne sont pas fan de football, mais la coupe du monde se profile à l'horizon et les analogies à faire entre gestion de fond et football sont nombreuses.

Sélectionner son équipe

Pour commencer, voici l’exemple de Pep Guardiola, entraineur de l’équipe de Manchester City. Il avait terminé la saison de 2016 sans trophée pour la première fois de sa carrière d'entraîneur et avait répondu, «J'ai gagné 21 titres en sept ans: trois titres par an en jouant de cette manière. Je suis désolé, les gars. Je ne vais pas changer». Depuis, il a remporté quatre titres. Tout comme lui, les investisseurs le sont par conviction. Ils sont des sélectionneurs d'actions. Il faut étudier les entreprises, en les examinant sous toutes les coutures. Il faut sélectionner «la» bonne entreprise. Au long terme, c’est le meilleur moyen de réussir.

Il ne faut pas avoir peur d'aller chercher dans des secteurs négligés un potentiel sous-estimé à des prix intéressants.

Aussi, il ne faut pas se limiter. Andrew Robertson illustre bien ce propos. Il a joué pour Queen's Park et Dundee United en Ecosse, et a évolué dans un club en difficulté, Hull City. Liverpool l’a racheté 8 millions de livres. Depuis, il est devenu un défenseur de classe mondiale dont la valeur avoisine les 60 millions de livres. Ainsi, il ne faut pas avoir peur d'aller chercher dans des secteurs négligés un potentiel sous-estimé à des prix intéressants. En effectuant ses propres recherches et analyses l’on peut dénicher d'excellentes entreprises là où d'autres ne regardent pas.

En termes de valorisation et de méthode de vente on peut prendre l’exemple de Ben White. Il a passé plusieurs saisons dans des ligues inférieures avant de percer avec Brighton en Premier League, ce qui a attiré l'attention d'Arsenal, qui l'a acheté pour 50 millions de livres sterling. Brighton a ensuite répété ce tour de passe-passe avec Marc Cucurella, qu'ils ont signé pour 16 millions de livres et qu'ils ont revendu après une saison pour 56 millions de livres. Dans les deux cas, il s'agissait de recrutements astucieux avec plusieurs années potentielles de contributions.

Autre leçon à tirer du football, penser au long terme. Chelsea, en particulier à un gros défaut. Il pense à court terme. Ce club aurait pu construire une équipe brillante à partir des joueurs qu'ils ont vendus à bas prix parce qu'ils n'étaient pas performants immédiatement: Romelu Lukaku, Mohamed Salah, Kevin De Bruyne, Declan Rice et Tammy Abraham. Contrairement à Chelsea, il faut acheter des entreprises pour le long terme.

Jouer en formation

En termes de stratégie, la formation en 4-4-2 est peut-être tombée en désuétude - bien que de nombreuses équipes en jouent une variante - mais elle constitue un point de contact utile pour la construction d'un portefeuille. Ainsi il y a trois catégories:

  • Les défenseurs (risque faible) 40%: des entreprises robustes, à faible risque, offrant une protection supérieure face aux crises cycliques.
  • Les milieux de terrain (risque moyen) 40%: Un large éventail d'entreprises avec des positions stratégiques fortes.
  • Les attaquants (risque élevé) 20%: des entreprises présentant des risques opérationnel et/ou financier, en situation de redressement ou en début de cycle.
«Derrière chaque coup de pied dans le ballon, il doit y avoir une pensée.»

Ensuite, il faut penser activement mais agir tranquillement. «Derrière chaque coup de pied dans le ballon, il doit y avoir une pensée», disait le maestro néerlandais Dennis Bergkamp. Oui, vous pouvez courir partout en ayant l'air occupé, en prenant des risques ici et là, mais pourquoi ne pas en faire moins en prenant un temps de réflexion? Prenons l'exemple de Nottingham Forest, qui a été promu en Premier League en mai et a entrepris de constituer une équipe pour se maintenir. Ils ont acheté 22 nouveaux joueurs! Il faut éviter les transactions excessives de ce genre. De même, si une action traverse une période difficile, rien ne sert de paniquer et d’appuyer sur le bouton vente - peut-être a-t-elle juste besoin d'une modification de gestion.

Enfin, il ne faut pas se soucier des choses sur lesquels l’on n’a pas de prise. Le football est une machine médiatique en perpétuel mouvement crachant d'innombrables articles, programmes et podcasts. Il en va de même pour l'économie et les perspectives macroéconomiques, le Brexit, le COVID, la crise de l’inflation...autant d'éléments que les investisseurs ne peuvent contrôler. Il faut éviter de perdre son énergie dans des combats inutiles et se recentrer sur ses convictions, la recherche et le long terme.

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