L’inflation ralentit aux Etats-Unis mais la prudence reste de mise

James Mazeau, UBS Global Wealth Management

2 minutes de lecture

L’économie US décélère également et la Fed n’amorcera pas de virage accommodant dans l’immédiat. L’environnement pour les actions restera difficile dans les mois à venir.

©Keystone

Aux Etats-Unis, les statistiques économiques confirment une décrue de l’inflation. L’indice global des prix à la consommation est ressorti en hausse de 5,0% en glissement annuel en mars, contre 6,0% en février. Il s’agit de sa plus faible progression depuis mai 2021. Néanmoins, l’inflation sous-jacente est remontée à 5,6% sur un an en mars, contre 5,5% en février. Quelles conclusions en tirer?

Le logement est l’un des principaux moteurs de l’inflation ces derniers mois, même si les chiffres relatifs aux nouveaux contrats de bail mettent en évidence un net ralentissement des loyers. En mars, l’augmentation des loyers de résidences principales est tombée à 0,5% en glissement mensuel, contre 0,8% en février. Compte tenu de l’inertie des données, les loyers continueront probablement de ralentir au fil des mois en 2023.

Les prix à la production aux Etats-Unis ralentissent aussi. Ils sont ressortis en hausse de 2,7% en glissement annuel en mars (au plus bas depuis janvier 2021), contre 4,9% en février. En glissement mensuel, l’indice des prix à la production a baissé de 0,5%.

La prudence toujours de mise

Cette décrue de l’inflation conforte la sensation qu’après avoir relevé ses taux de 475 points de base au total en l’espace d’un peu plus d’un an, la Réserve fédérale américaine (Fed) est en passe de mettre un terme à son cycle de resserrement monétaire.

Néanmoins, la prudence reste de mise quant aux perspectives pour l’économie américaine et pour les bénéfices des entreprises. Explications.

• L’inflation ralentit mais la Fed devrait maintenir une politique restrictive

Les chiffres du mois de mars ne permettent pas à la Fed de crier victoire sur le front de l’inflation et l’on peut s’attendre à un nouveau relèvement des taux directeurs lors de sa prochaine réunion le 3 mai. Il pourrait s’agir du dernier si les données continuent de mettre en évidence une détente du marché de l’emploi et une décrue de l’inflation.

Quand bien même la Fed choisirait de marquer une pause après la réunion du mois de mai, elle attendra probablement que l’inflation se rapproche de son objectif de 2% pour envisager une baisse de ses taux (virage accommodant).

Les baromètres des anticipations d’inflation des ménages repartent à la hausse. Selon l’enquête de l’Université du Michigan, les ménages tablaient en avril sur une inflation de 4,6% dans un an, contre 3,6% en mars.

• Le procès-verbal de la réunion de la Fed du mois de mars reflète l’impact négatif de l’incertitude quant à la santé du système bancaire

Les membres du Comité fédéral de marché ouvert (FOMC) de la Fed pensent que le durcissement des conditions de crédit est de nature à freiner l’activité économique et l’inflation, d’autant que la hausse des taux directeurs pèse déjà sur l’investissement des entreprises. Ils ont également constaté un impact sur le moral des ménages, ces derniers étant susceptibles de réduire leurs dépenses.

• L’économie américaine ralentit déjà et les conditions de crédit se durcissent

Le risque de récession augmente, comme en témoigne le dernier PMI (indice des directeurs d’achats) manufacturier de l’ISM (Institut de gestion des approvisionnements) à 46,3, au plus bas depuis mai 2020 et inférieur au seuil des 50 points synonyme de contraction de l’activité pour le cinquième mois consécutif.

Le marché de l’emploi aux Etats-Unis enregistre également une détente. Les créations d’emplois salariés non agricoles en mars et le rapport JOLTS (Job Openings and Labor Turnover Survey) de février ont mis en évidence un ralentissement de la croissance des salaires et une diminution des postes à pourvoir.

Selon l’enquête de la Fed de Dallas sur les conditions de crédit bancaire menée entre le 21 et le 27 mars, les prêts commerciaux et industriels, le crédit immobilier et les volumes de prêts sont en baisse, tandis que les conditions de crédit continuent de se durcir. Historiquement, le durcissement des conditions de crédit s’accompagne d’une contraction des bénéfices des entreprises.

Privilégier les obligations aux actions

Par conséquent, comme l’économie américaine ralentit et que la Fed n’amorcera pas de virage accommodant dans l’immédiat, l’environnement pour les actions restera difficile dans les mois à venir. La Recherche d’UBS a formulé un avis Least Preferred sur les actions mondiales, y compris sur les Etats-Unis où elle table sur une contraction des bénéfices de 4,5% cette année.

Il est recommandé de privilégier les obligations – notamment celles des segments high grade (d’Etat) et investment grade, ainsi que les obligations durables – plutôt que les actions. Outre le possible coup de pouce lié au virage dans la politique de la Fed qui finira par se produire, les obligations de qualité devraient profiter de leurs caractéristiques défensives pour un portefeuille en cas de ralentissement économique plus marqué.

A lire aussi...