L’énigme du marché immobilier chinois

Salima Barragan

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Poids lourd de l’économie, le secteur pèse 29% du PIB. Avec Michael John Lytle de Tabula Investment Management.

Le géant immobilier chinois Evergrande est sur toute les lèvres depuis que sa débâcle a jeté un froid sur les marchés chinois. Alors que la longue crise immobilière américaine de 2005 est encore bien présente dans les esprits, Michael John Lytle, CEO de Tabula, estime que le cas chinois est singulier en raison de ses hypothèques bassement valorisées.

Durant les dernières décennies, les projets immobiliers chinois étaient sortis de terre frénétiquement jusqu’à ce que l’offre dépasse la demande. Dans une tentative de rééquilibrage en 2014, le gouvernement chinois avait imposé aux les promoteurs immobiliers la politique des trois lignes rouges qui consiste à respecter les seuils de trois ratios de levier*. Mais quelques années plus tard, la demande (mais aussi les projets) reprennent de plus belle. L’immobilier qui a atteint 29% du PIB, est devenu un poids lourd de l’économie.

Si le programme de Pékin existe toujours, il se trouve que les leviers d’Evergrande, mais aussi de Guangzhou R&F et China Fortune Land, ont franchi les lignes rouges. Plus inquiétant, «tous les promoteurs reposent davantage sur les préventes des nouvelles constructions que sur la dette. Ce qui diminue leur passif, mais peut provoquer une crise sur les revenus», explique le spécialiste pour qui le risque est bien réel.

Malgré les risques chinois, le crédit asiatique n’est pas le théâtre de pressions vendeuses.

Les acheteurs qui craignent de ne jamais voir leur bien livré pourraient bien être à l’épicentre du tremblement de terre à venir. Selon Michael John Lytle, «le problème n’est pas de digérer Evergrande, mais de s’assurer que la psychologie des acheteurs n’est pas atteinte car le volume des ventes va déterminer le rythme de rééquilibrage. Mais le gouvernement chinois doit aussi s’assurer que les projets de construction soient réalisés et qu’il y ait assez de liquidité pour maintenir la demande de propriété à un niveau raisonnable», résume-t-il.

Heureusement pour les propriétaires, les valorisations des hypothèques sont basses. «Si les prix des biens immobiliers baissent, les acheteurs s’en sortiront mieux que lors des précédentes crises», affirme Michael John Lytle, balayant tout comparaison avec la chute immobilière américaine de 2005, qui découlait de conditions de crédit excessives et d’un taux de défaut élevé sur les hypothèques.

Malgré les risques chinois, le crédit asiatique n’est pas le théâtre de pressions vendeuses. «Les flux d’argent à double sens démontrent que le crédit est un investissement multi-actifs où l’Investment Grade est favorisé vis-à-vis du cash qui ne rapporte plus rien», souligne Michael John Lytle qui voit une valeur relative supérieur dans le segment les obligations à haut rendement asiatiques, la principale portion du marché obligataire asiatique de 1000 milliards de dollars US. «Le rendement qui s’est écarté de 6% à 10% compense les défauts de paiements qui reste à des niveaux historiquement pas» ajoute-il. De leur côté, les rendements des obligations pourries chinoises ont atteint des valeurs records.

 

* Politique des trois lignes rouges: liquidité sur dette à court terme, dette nette sur capitaux, actif/passif-liquidité/dette à court terme

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