Infrastructures hybrides européennes: un nouvel horizon d’investissement

Jean-François Marco, Edmond de Rothschild Asset Management

3 minutes de lecture

Faire du marché intermédiaire européen sa zone de prédilection n'est pas qu'une question de retours sur investissement, c'est avant tout une vision axée sur l'avenir.

Dans le contexte actuel marqué par l’exacerbation des incertitudes économiques et politiques, les infrastructures s’imposent comme une classe d’actifs incontournable. Leur capacité à résister aux fluctuations des cycles économiques, conjuguée à la prévisibilité de leurs flux de trésorerie, leur confère un attrait incontestable pour les investisseurs en quête d’une solide protection contre l'inflation.

Les objectifs de durabilité redéfinissent les infrastructures européennes 

Les investissements dans les infrastructures ont connu une forte dynamique de croissance au cours des cinq dernières années, évoluant deux fois plus rapidement que l'ensemble des actifs alternatifs sur le continent européen. Face à divers chocs systémiques, tels que la pandémie du Covid-19, le conflit en Ukraine et l'intensification de la rivalité économique entre les États-Unis et la Chine, l’attrait pour les infrastructures s'est renforcé. Ces événements ont mis en évidence la résilience des infrastructures qui constituent désormais une «valeur refuge» et offrent à bien des égards une protection contre la volatilité et l'incertitude géopolitique. 

A l’heure acutelle, les enjeux macroéconomiques, démographiques et climatiques bouleversent le système des infrastructures en Europe. Ce dernier est contraint d’accélérer sa modernisation pour s’adapter à trois mégatendances: la décarbonisation, la relocalisation des chaînes d’approvisionnement, la digitalisation croissante ainsi que le traitement des données.

Vers une hybridation  croissante des infrastructures 

Ces évolutions notables ont participé à l’émergence d’infrastructures plus décentralisées, digitalisées et basées sur les services. Cette hybridation redéfinit, selon nous, la nature et l’essence de certains projets d'infrastructures traditionnels, lesquels intègrent désormais des secteurs variés, tels que la mobilité, la technologie et l'énergie verte, et sont davantage pensés pour faire face à des problématiques multidimensionnelles, allant du changement climatique aux nouvelles habitudes des utilisateurs. 

Prenons l'exemple des infrastructures de mobilité, qui évoluent pour intégrer des systèmes de transport intelligents. Ces systèmes sophistiqués exploitent tous types de dispositifs connectés, des capteurs et des caméras pour des installations de recharge d'énergie verte – qui devraient être multipliées par 20 d'ici 2030 . Ils intègrent également des plateformes de «mobilité en tant que service».

Il s’agit ainsi de nous affranchir des modèles d’infrastructures obsolètes et de développer des sytèmes à la fois connectés et durables, qui nous semblent essentiels pour gérer efficacement les évolutions de la demande des consommateurs et pour atteindre les objectifs climatiques. 

Il est toutefois important de noter que ces nouvelles opportunités, plus particulièrement celles liées aux infrastructures connectées, portent en elles de nouvelles complexités, et par extension, de nouveaux risques. Les projets de type "greenfield" , bien qu'offrant un potentiel de rendement élevé grâce à une appréciation significative du capital, requièrent une expertise opérationnelle pointue et une capacité à mener des transformations concrètes.

L’évolution du paysage des infrastructures nécessite par ailleurs un financement conséquent. Les investissements publics ont néanmoins connu une contraction du fait de l'augmentation des contraintes budgétaires. Dans ce contexte, les capitaux privés sont plus que jamais nécessaires pour combler ce déficit et contribuer à financer la reconversion des infrastructures.

Saisir les opportunités du marché mid-cap pour financer la transformation des infrastructures 

Le segment du mid-cap  est un terrain propice pour financer la transformation et la modernisation des infrastructures. Moins sujet à la rude concurrence des large-caps4, ce marché offre de belles perspectives grâce à des prix d'entrée attractifs, alliant qualité et accessibilité. Il regorge ainsi d’opportunités et se distingue notamment par son flux important de transactions de taille moyenne (moins d'un milliard d'euros). En 2022, elles représentaient 88% du volume total en Europe.

Au cours des cinq dernières années, les multiples d'entrée, particulièrement intéressants sur le marché intermédiaire, ont été d'autant plus avantageux dans les sous-secteurs des transports, de l'énergie et des infrastructures sociales.

Il est également crucial de souligner que les projets de taille moyenne répondent directement  aux attentes des consommateurs et constituent le cœur même de la croissance économique et de la transition énergétique. 

Nous privilégions par ailleurs le marché des infrastructures européen qui est à la fois dynamique, vaste et diversifié, et  qui, historiquement, a généré de meilleurs rendements ajustés au risque que celui des infrastructures non cotées en Asie-Pacifique ou en Amérique.

Ainsi, faire du marché intermédiaire européen sa zone de prédilection n'est pas uniquement une question de retours sur investissement, c'est avant tout une vision résolument axée sur l'avenir. Il s’agit selon nous d’investir tôt pour transformer les infrastructures et combler le déficit de financement actuel.   

En outre, ce marché nécessite des connaissances et une expérience locales significatives. Nous pensons qu'une approche axée sur la maîtrise des risques, soutenue par une expertise opérationnelle des investissements, est indispensable. Les équipes de gestion doivent être en mesure d’accompagner le management des entreprises, tant d’un point de vue financier qu'opérationnel. Cela inclut la mise en place de partenariats solidement structurés ainsi que des échanges réguliers avec les dirigeants d'entreprise.

Cette stratégie active, couplée à une approche opérationnelle, permet d'exercer une influence concrète et de tirer parti des nombreuses sources de création de valeur sur ce marché.

En somme, les infrastructures constituent une classe d'actifs clé pour naviguer avec succès dans l’environnement économique actuel.  Afin de tirer profit des opportunités et des tendances qui se dessinent actuellement sur ce marché en constante évolution, il est indispensable de disposer d'une stratégie active, fondée sur une compréhension fine des tendances à l'œuvre, des contraintes actuelles, mais aussi des innovations susceptibles de transformer le paysage des infrastructures dans les années à venir, d’autant plus que les investissements réalisés aujourd’hui auront incontestablement un impact sur l’économie et la transition énergétique de l’Europe à moyen et long terme.

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