Fed: une hausse «dovish» - La BCE a encore du chemin à parcourir

Franck Dixmier, Allianz Global Investors

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Les dernières données sur l’économie américaine sont enfin rassurantes pour la Reserve fédérale américaine. La situation en zone euro est moins claire qu’aux Etats-Unis.

  • La Réserve fédérale américaine devrait annoncer une hausse de taux de 25 pb lors de la réunion du FOM.
  • Malgré des données rassurantes sur l’économie, et notamment une décrue de l’inflation, la bataille n’est toutefois pas encore gagnée et un ajustement supplémentaire ne peut être exclu.
  • Cette hausse ne devrait pas être une surprise pour les marchés.

Les dernières données sur l’économie américaine sont enfin rassurantes pour la Reserve fédérale américaine. La récente décrue de l’inflation totale et sous-jacente est une bonne nouvelle. En juin, l’indice des prix à la consommation (consumer price index CPI) est ressortit à +3% en juin contre +4% le mois précèdent, un ralentissement spectaculaire. L’inflation cœur (Core CPI) a elle aussi décrut à +4,8% contre +5,3% en mai. La décélération de la croissance, avec des ventes au détails qui n’ont progressé que de 0,2% en juin contre 0,5% attendu, et un marché du travail moins tendu devrait permettre de consolider ce mouvement de baisse de l’inflation.

Malgré ce contexte, nous estimons que la Fed devrait procéder à une hausse de +25pb sur ses taux directeurs. De fait, il est trop tôt pour la banque centrale pour crier victoire. La perception des ménages en termes d’anticipations d’inflation, légèrement en hausse en juillet par rapport au mois précédent (à +3,4% à 1 an contre +3,3% en juin et +3,1% à 3 ans contre +3% en juin), est un avertissement pour la Fed qu’elle doit rester vigilante. Celle-ci ne peut prendre le risque de se laisser surprendre par un sursaut de l’inflation sous-jacente, et mettre en péril des anticipations d’inflation qui restent jusqu’ici bien ancrées.  On ne peut d’ailleurs exclure un ajustement supplémentaire à l’automne.

Nous estimons toutefois que la Fed a pratiquement atteint son objectif et devrait communiquer sur le fait que les taux sont très proches d’un niveau adéquat et compatible avec sa cible de stabilité des prix. En effet, le maintien des taux sur un plateau élevé et d’une inflation totale qui devrait continuer à décroitre se traduit par une hausse des taux réels qui devrait contribuer au resserrement des conditions monétaires, enlevant la nécessité pour la Fed d’intervenir davantage.

Cette hausse de 25pb est largement attendue par les marchés. Après la forte correction intervenue en juin, le thème «higher for longer» a fini par s’imposer dans les marchés, et il n’y a plus de baisse de taux pricée en 2023.  Ces conditions de marché plus saines devraient être favorable à l’achat de duration sur la courbe US.  

 

 
La BCE a encore du chemin à parcourir
  • La Banque centrale européenne devrait annoncer une hausse de 25 points de base
  • Cette hausse est parfaitement anticipée par les marchés et ne devrait pas avoir d’impact
  • D’autres sont à attendre, ce que les marchés n’anticipent pas suffisamment.

La situation en zone euro est moins claire qu’aux Etats-Unis. Alors que l’inflation totale continue à décélérer en zone euro (avec +5,5% sur un an en juin contre +6,1% en mai), l’inflation cœur fait de la résistance et s’accroche à des niveaux élevés (à + 5,5% sur un an en juin contre +5,3% en mai). Dans un contexte où les entreprises bénéficient encore de pricing-power, et où la faiblesse du chômage non seulement soutient une demande résiliente mais nourrit les revendications salariales, le risque de voir l’inflation cœur continuer à se maintenir sur des niveaux élevés ne peut être écarté. D’autant que le mix entre politique budgétaire et politique monétaire n’est pas suffisamment restrictif. La puissance des aides des états, et l’excès d’épargne accumulé pendant la période Covid continuent de soutenir la demande.

Dans ce contexte, la BCE ne peut faire de compromis et doit continuer à resserrer les conditions financières. Il en va de sa crédibilité, alors que les anticipations d’inflation restent bien ancrées. Par ailleurs, la banque centrale a conservé des marges de manœuvres, alors que les 400 pb de hausse de taux directeurs depuis juillet 2022 n’ont pour le moment pas créé de risque sur la stabilité financière, et que les états n’ont pas de problème de refinancement.

Nous attendons donc une hausse de 25bp lors de la prochaine réunion de politique monétaire de la BCE, qui devrait être suivie par un mouvement similaire en septembre. Le nombre de hausses sera ensuite calibré sur l’évolution de l’inflation cœur, sur laquelle il n’y a pour le moment aucun élément rassurant. Lors de la réunion de politique monétaire jeudi, Christine Lagarde devrait réitérer une nouvelle fois que la BCE restera plus que jamais dépendante des données économiques.

Les marchés anticipent la hausse de juillet. En revanche, ils n’anticipent qu’une seule hausse supplémentaire d’ici la fin 2023 pour atteindre un taux de dépôt terminal de 4%. Nous estimons donc que le risque de voir la BCE continuer à resserrer sa politique monétaire au-delà de 4% n’est pas pris en compte.  Cette absence de «marge de sécurité» nous incite à la prudence sur les taux euro.  

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