Europe: plus solide, plus longtemps

Robert Lind, Capital Group

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Le redressement économique est très prononcé. Certains indicateurs macro ont atteint des niveaux extraordinaires, prenant tout le monde au dépourvu.

Les chiffres de l’activité manufacturière (indices des directeurs d’achats) atteignent des records historiques. Les derniers indices du climat des affaires (qui rassemblent activité manufacturière, distribution, services et confiance des ménages au sein d’un indicateur unique de la confiance) sont désormais proches des points hauts cycliques que nous leur avons connus au milieu des années 2000. Conjugués à plusieurs autres indicateurs clés, ces chiffres encourageants donnent à penser que le consensus tablant sur un retournement imminent de la croissance européenne pourrait s’avérer erroné cette année, tout comme il l’a été les deux précédentes. Une autre surprise est ainsi tout à fait possible en 2018, avec une croissance du PIB de la zone euro capable de s’accélérer nettement et durablement. La croissance de la zone Euro pourrait se rapprocher de 3% par an au premier semestre 2018.

Tendances sous-jacentes à l’élan de croissance

L’ampleur de ce redressement est frappante. Si l’économie allemande a longtemps été la plus vigoureuse d’Europe. Les pays auparavant à la traîne (la France et l’Italie, principalement) ont vu leur environnement économique se transformer radicalement au cours de l’année écoulée. L’économie française est soudainement sortie de la stagnation pour prendre une nette accélération. Ce phénomène découle sans doute de l’enthousiasme suscité par l’élection d’Emmanuel Macron, qui a promis de réformer le cadre économique et politique de la France. À ce jour, il a déjà mis en œuvre des changements importants accueillis favorablement par les entreprises et les consommateurs.

Il est intéressant de noter que lors de ses précédentes phases de redressement, l’économie européenne était généralement portée par ses exportations nettes, ce qui signifie qu’elle était exposée au risque de contraction de la demande extérieure.  Cette fois-ci, la reprise est soutenue non seulement par une hausse des exportations, mais aussi par un rebond marqué de la demande intérieure, à savoir la consommation et les dépenses d’investissement (des entreprises notamment). C’est ce qui a toujours manqué en Europe, et c’est l’une des principales raisons pour lesquelles je pense que la reprise en cours pourrait être davantage auto-suffisante.

Perspectives de la zone euro on matière d’inflation et de croissance des salaires

Les tensions inflationnistes restent limitées. L’indice des prix à la consommation (IPC) hors énergie et alimentation reste inférieur à 1 % en rythme annualisé, soit la moitié de l’objectif de taux de la Banque centrale européenne (BCE). Nous commençons à voir les tous premiers signes de pressions à la hausse sur les salaires. Cela dit, compte tenu de la faiblesse extrême et de longue date de la croissance des salaires dans la plupart des régions d’Europe, les augmentations auxquelles la France, l’Italie et l’Espagne assistent actuellement sont très modestes et bien inférieures à ce que l’on pourrait espérer dans le contexte actuel de forte accélération de la croissance économique.

Si les taux d’intérêt restent si bas, que ce soit en Europe ou dans le monde, c’est surtout parce que la BCE maintient sa politique monétaire non conventionnelle : les taux directeurs restent négatifs et elle a reporté son programme d’achat d’obligations de 30 milliards d’euros par mois au moins jusqu’à septembre 2018. En conséquence, la première occasion de relever les taux d’intérêt ne se présentera que vers la fin d’année, voire en 2019. Les «faucons» de la BCE poussent à un durcissement de la politique monétaire, mais c’est compter sans son président Mario Draghi, l’un des banquiers centraux les plus influents de ces vingt dernières années. Étant donné son influence incontestable, il est toutefois possible que les taux ne remontent que très graduellement en 2018.

Un redressement sur les marchés actions soutenus par les fondamentaux

À l’évidence, les marchés actions européens se sont déjà nettement redressés. Il sera certes difficile de réitérer ce genre de gains cette année, mais les marchés européens peuvent encore progresser dans cet environnement favorable de croissance économique robuste et d’inflation contenue. Depuis 12 à 18 mois, le niveau des actions européennes reflète une conjoncture plus favorable, mais aussi le recul du risque politique. Voilà qui a également dopé l’euro, ce qui explique en grande partie la surperformance des valeurs de la zone euro. Les marchés actions européens pourront progresser encore à l’horizon 12-18 mois, et qu’ils seront désormais soutenus davantage par les fondamentaux (notamment l’accélération de la croissance des résultats), et moins par une nouvelle appréciation de l’euro.