Elections européennes: enjeux et perspectives

Vincent Juvyns, J.P. Morgan Asset Management

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Il est bon de se rappeler qu’un exercice démocratique au moins aussi important que les élections américaines se tiendra en Europe du 6 au 9 juin prochain.

A l’heure où les élections américaines retiennent toute l’attention des investisseurs, il est bon de se rappeler qu’un exercice démocratique au moins aussi important se tiendra en Europe du 6 au 9 juin prochain.

En effet, plus de 350 millions d’électeurs sont appelés à choisir les 705 députés qui siègeront au parlement européen au cours des 5 prochaines années. Si lors des scrutins précédents, les européens ont quelque boudé ces élections, avec un taux de participation de 50% en moyenne, le dernier sondage Eurobaromètre indique cependant un regain d’intérêt pour celles-ci.

Dans un contexte géopolitique incertain, avec une guerre à nos frontières et une indépendance énergétique à conquérir, le sondage Eurobaromètre relève que 60% des européens estiment que le fait que leur pays fasse partie de l’Union Européenne est une bonne chose. Ce sondage, réalisé au printemps 2024, révèle en outre que 41% des européens ont une vision positive du parlement européen, contre seulement 36% il y a cinq ans, et que 61% d’entre eux se montrent optimistes quant au futur de l’Union Européenne.

Malgré cette adhésion de la population européenne aux institutions qui la représentent, on observe paradoxalement dans le même temps une remontée des «extrêmes» dans les derniers sondages. C’est principalement le cas à la droite de l’échiquier politique puisque lorsque l’on convertit les résultats des sondages nationaux en sièges au parlement européen, pour chacun des 7 groupes transnationaux qui le composent, on observe que le groupe «Identity and Democrats», qui ne cache pas son euroscepticisme, serait l’un des grands gagnants potentiels de ces élections.

Ceci s’explique vraisemblablement par le fait que comme le révèle également le sondage Eurobaromètre, la défense, la sécurité et l’immigration font partie des principales préoccupations des européens. Si le centre de gravité du parlement européen devait en effet se déplacer vers la droite, cela pourrait donc notamment conduire à davantage de support pour l’augmentation des dépenses militaires ou au durcissement de la politique migratoire.

En termes de politique étrangère, les européens ne semblent en revanche pas demandeurs de changements majeurs puisque plus de 2/3 des sondés ont une vue négative de la Chine et de la Russie, ce qui laisse supposer que le soutien à l’Ukraine ne devrait pas faiblir tandis que l’Europe devrait rester sur la défensive, sur le plan commercial, dans ses relations avec la Chine en veillant notamment à réduire sa dépendance vis-à-vis de celle-ci.

Les partis écologistes sont quant à eux généralement en baisse dans les sondages et pourraient perdre jusqu’à 25 sièges au parlement européen. Cependant, la plupart des mesures climatiques européennes existantes, à l’instar du «Green deal», ne devraient pas en souffrir car elles sont déjà entérinées dans le budget pluriannuel européen. En revanche, tout renforcement de celles-ci, comme le demandent nombre de spécialistes, sera plus difficile à réaliser. Les manifestations des agriculteurs dans plusieurs états membres ces derniers mois et la perte de compétitivité de certains pans de notre industrie devraient sans doute amener le parlement européen à «édulcorer» quelque peu ses prochaines initiatives climatiques.

L’un dans l’autre les derniers sondages d’intentions de vote et le sondage «Eurobaromètre sentiment», ne sont donc pas particulièrement inquiétants. L’adhésion à l’Europe et ses institutions reste en effet forte et un nouvel exit d’un état membre est peu probable. En ce qui concerne le déplacement du centre de gravité politique du parlement européen vers la droite, cela entrainera sans doute de légers changements dans l’ordre de ses priorités mais comme les principaux axes d’investissements stratégiques, notamment pour le climat, sont déjà intégrés dans le budget pluriannuel européen (qui couvre la période 2021-2027), tout changement majeur de cap budgétaire n’aura lieu qu’après 2027.

Pour les marchés cela ne devrait donc à priori pas être un scénario disruptif. Les enjeux de ces élections européennes n’en sont pas moins importants puisque celles-ci orienteront le cap de l’Europe dans des matières aussi variées qu’importantes, comme la politique budgétaire, climatique ou industrielle. Bref nombre de bonnes raisons pour mes concitoyens européens qui me lisent d’aller voter en juin!

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