Le retour en grâce des actions européennes

Vincent Juvyns, J.P. Morgan Asset Management

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Investir en actions européennes ne signifie pas investir dans l’économie européenne puisque les entreprises tirent plus de 50% de leurs revenus hors Europe.

Depuis le début de l’année, de plus en plus d’investisseurs s’inquiètent de la concentration de la performance au sein du S&P 500, et plus généralement de la valorisation des grandes capitalisations américaines. L’appétit pour le risque reste néanmoins élevé, dans la mesure l’atterrissage en douceur de l’économie mondiale conjugué aux baisses de taux attendues au second semestre devraient ceteris paribus continuer à soutenir les marchés d’actions. Dans ce contexte, les investisseurs cherchent plutôt à diversifier leur exposition en actions en revenant sur des marchés avec des valorisations plus attractives comme l’Europe. Ainsi, le dernier «fund managers survey» de Bank of America pour le mois de mars a révélé que l’engouement pour les actions européennes était au plus haut depuis juin 2020. Plusieurs éléments expliquent ce phénomène.

Valorisations attractives

Il faut tout d’abord reconnaître que les actions européennes affichent un écart de valorisation par rapport aux Etats-Unis qui est historiquement élevé puisque le ratio cours/bénéfices de l’indice MSCI Europe ex-UK est actuellement 30% inférieur à celui du S&P 500. Ceci est notamment dû à la différence de composition sectorielle, puisque les indices européens sont plus orientés «value», en raison du poids important de secteurs comme la finance ou l’énergie, et comptent relativement peu d’entreprises technologiques. En revanche, d’un point de vue fondamental, cet écart de valorisation ne se justifie pas puisque les deux marchés affichent des ratios de levier financier, de dette et de bénéfices similaires.

Rendement élevé

Par ailleurs, les actions européennes se distinguent plus que jamais en termes de rendement. En effet, le rendement du dividende du MSCI Europe ex-UK est aujourd’hui près de deux fois plus élevé que celui du S&P 500 (3,15% vs 1,62%). Ceci n’est certes pas nouveau mais l’écart avec les Etats-Unis continue de s’accentuer et ce d’autant plus que les entreprises rachètent aujourd’hui davantage leurs propres actions que par le passé. Depuis 2022, les rachats d’actions propres en Europe sont en effet au plus haut depuis 20 ans et ne sont plus très loin des niveaux observés aux Etats-Unis. Si l’on additionne le rendement du dividende au rendement généré par les rachats d’actions propres, l’Europe affiche aujourd’hui un rendement de 4,1% contre 3,4% pour les Etats-Unis.

Des perspectives macro-économiques relativement favorables

En 2024, la croissance économique européenne devrait rester inférieure à celle des États-Unis, comme ce fut le cas au cours des deux dernières années. Cela s’explique notamment par le fait qu’alors que l’Europe traversait une crise énergétique majeure, les Etats-Unis ont quant à eux conforté leur position de premier producteur pétrolier mondial avec une augmentation de 10% de leur production pétrolière journalière de 2022 à 2024.  Sur le plan budgétaire, l’écart entre les Etats-Unis et l’Europe a également été important puisqu’ils ont terminé l’année 2024 sur un déficit équivalent à 6,5% du PIB, soit près de deux fois plus qu’en Europe. Pour le second semestre 2024 et au-delà, on peut néanmoins raisonnablement s’attendre à davantage de convergence économique entre l’Europe et les Etats-Unis. En effet, alors que les Etats-Unis devront inévitablement réduire leur déficit l’an prochain, l’Europe devrait quant à elle bénéficier pendant encore quelques années du soutien du Fonds de relance NextGenEU doté d’une capacité de prêts et d’investissements de €723 milliards. La consommation, notamment de services, devrait demeurer relativement soutenue puisqu’on observe que les salaires augmentent désormais plus vite en Europe qu’aux Etats-Unis et qu’ils dépassent aujourd’hui l’évolution de prix à la consommation. Les perspectives macro-économiques à moyen terme de l’Europe sont donc moins négatives que ce que l’activité industrielle ou les chiffres de croissance actuels ne laissent actuellement penser.

Enfin, même si les perspectives pour l’économie européenne font encore l’objet de nombreux débats, il est bon de rappeler qu’investir en actions européennes ne signifie pas investir dans l’économie européenne puisque les entreprises tirent plus de 50% de leurs revenus hors Europe.

Pour toutes ces raisons, nous avons récemment augmenté le poids de l’Europe dans notre allocation actifs.

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