Elections américaines: relancer la locomotive

Salima Barragan

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A la veille des élections présidentielles américaines, les experts livrent leurs réflexions sur les perspectives économiques. Première partie.

© Keystone

Quel serait le résultat électoral le plus favorable à la relance américaine? Pour répondre à cette question, plusieurs experts ont passé les propositions politiques des deux candidats au peigne fin. Verdict unanime: le scrutin influencera davantage certains secteurs d’activité que l’économie dans sa globalité. Si les propositions en matière d'impôt sur les sociétés diffèrent radicalement entre les deux opposants, les dossiers sur la réglementation des méga-capitalisations et sur les relations commerciales avec la Chine sont moins discordants. Eclairages.

Feuille de route pour le rebond de 2021

Priorité absolue du futur Président, il devra manœuvrer habilement le redémarrage de la locomotive américaine. Les programmes budgétaires approuvés jusqu'à présent par l’administration Trump ont creusé les déficits publics et le prochain élu devra choisir entre la poursuite des mesures de soutien et le retour à l’austérité au fur et à mesure que l’économie reprendra des couleurs. Pour l’heure, «les deux candidats s’attachent à soutenir la relance post-pandémique, ce qui dicte la politique économique à court terme», estime Stéphane Monier, Chief Investment Officer de la Banque Lombard Odier & Cie SA dans une note récente.

Contrairement à la victoire de Trump en 2016 qui a coïncidé avec une embellie de l’économie américaine (et des marchés boursiers!), l’issue des élections prévues le 3 novembre prochain pèsera peu sur les dynamiques conjoncturelles, davantage influencées par les fondamentaux en berne d’un pays qui sort à peine du confinement.

De la même façon qu’il y a quatre ans, les nouvelles baisses d’impôts de Trump - s’il accède une seconde fois au pouvoir avec le soutien d’un Congrès contrôlé par les Républicains -, doperaient le sentiment des investisseurs et la valorisation des actions. Dans le cas d’une victoire de Biden accompagnée d’un Congrès divisé, le maintien d’un environnement de taux bas favoriserait également les marchés boursiers. En revanche, si Biden accède à la présidence et que les Démocrates gagnent les deux chambres, «on peut s’attendre à ce qu’ils mettent en œuvre les augmentations de l’impôt sur les sociétés qu’ils ont promises. Toutefois, le consensus ne table que sur une baisse à un chiffre du bénéfice par action du S&P500 se situant dans la partie moyenne de la fourchette, car les promesses de relance compenseraient l’impact négatif des augmentations d’impôts», ajoute Stéphane Monier.

Partie intégrante du paysage des années électorales, la volatilité
pourrait s’accentuer davantage si Trump conteste le résultat.
Instabilité à venir sur les marchés

Partie intégrante du paysage des années électorales, la volatilité pourrait s’accentuer davantage si Trump conteste le résultat – un risque réel selon les spécialistes consultés. D’ailleurs, Florence Pisani, économiste chez Candriam rappelle que lors des élections de 2000, lorsqu'Al Gore avait contesté la victoire de George W. Bush, la bourse avait connu une baisse marquée: «Avec une augmentation des votes par correspondance, les résultats pourraient être contestés durant de longues semaines semant le doute, ce qui ne manquerait pas d’affecter la confiance des ménages, des entreprises… et des marchés financiers».

Pour Stéphane Monier, bien que la prudence soit de mise, «ces périodes de volatilité offrent des opportunités d’investissement dans certains actifs qui pourraient bénéficier d’un rebond par rapport à leurs récents plus bas».

Relancer l’économie américaine

Si les deux programmes visent à redynamiser l’activité en creusant le déficit budgétaire, ils traduisent deux directions très différentes, estime Florence Pisani: «Le programme économique de Donald Trump reste très vague, mais il s’inscrit dans la même logique que celui de 2016: le «Make America Great Again» a été transformé en «Keep America Great». Le volet sur les infrastructures, une promesse non tenue du Président, reste à l’ordre du jour. Donald Trump continuera aussi à aller de l’avant dans la dérèglementation environnementale et poursuivra sa guerre commerciale avec la Chine… voire peut-être même avec l’Europe».

Quant à Joe Biden, son programme s’inscrit dans la tradition «sociale-démocrate»: il propose de financer des dépenses d’infrastructures, notamment dans l’économie verte, mais aussi dans l’éducation et dans la santé par des hausses d’impôts. Le clivage culturel et idéologique s’est déjà fait ressentir sur les économies des différents Etats selon leur orientation politique. «La consommation a plus chuté dans les Etats Démocrates, comme la Californie, que dans les Etats Républicains comme le Texas qui ont moins confiné leurs habitants», relève Florence Pisani.

Dans une seconde partie à publier demain, les experts passeront à la loupe les répercussions des résultats possibles sur les secteurs d’activité américains.

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