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Alan Mudie, Société Générale Private Banking

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Alors que l’espoir d’une fin proche du litige sino-US augmente, les droits de douane existants ont été maintenus et continuent de peser sur l’économie.

©Keystone

Les marchés actions mondiaux se focalisent depuis longtemps sur les effets néfastes de la guerre commerciale sino-américaine et du Brexit. Ces derniers jours ont laissé espérer une fin proche, faisant alors grimper les cours boursiers. Quelles en seront les conséquences économiques? Et quelles sont les implications pour l’assouplissement monétaire des banques centrales?

La semaine dernière, le Fonds monétaire international a souligné les effets négatifs de la guerre commerciale lorsqu’il a revu à la baisse ses prévisions de croissance du PIB mondial pour 2019 de 3,5% en avril à 3,0%. Il a prévu que le conflit sino-américain réduira le PIB mondial d’un taux cumulé de 0,8% d’ici à fin 2020 et a appelé les protagonistes à progresser vers une «paix commerciale» durable. Pour l’heure, cependant, nous assistons à un cessez-le-feu qui pourrait s’avérer fragile.

Les négociateurs ont quatre semaines pour finaliser un accord
susceptible d’être signé par MM. Trump et Xi à la mi-novembre.

Selon le Président Trump, l’issue des négociations récentes constitue un «accord très important de phase 1». De nouveaux droits de douane américains ont été repoussés et la Chine s’est engagée à augmenter les importations de denrées alimentaires et à éviter une dévaluation compétitive du yuan. Mais des questions délicates comme les subventions accordées par la Chine aux sociétés publiques et aux technologies de l’information, tout comme la répression des manifestations de Hong Kong ont été laissées en suspens pour la phase 2. Les négociateurs ont quatre semaines pour finaliser un accord susceptible d’être signé par MM. Trump et Xi à la mi-novembre. Fait important, les droits de douane existants de part et d’autre ont été maintenus en place, continuant de peser sur l’économie.

Le sommet du Conseil européen du 17 et 18 octobre a pu approuver un accord de retrait modifié du Brexit avec le Premier ministre Boris Johnson. Comme discuté avec le Premier ministre irlandais Leo Varadkar précédemment, cet accord a été rendu possible par les ajustements apportés au filet de sécurité irlandais. Ces derniers pourraient maintenir l’Irlande du Nord (IN) juridiquement dans la zone douanière britannique, mais en pratique dans l’union douanière européenne, créant ainsi une nouvelle frontière douanière entre l’IN et le reste du Royaume-Uni. Pour cela, les importateurs devront faire des demandes de remboursements chaque fois que les droits de douane britanniques seront plus favorables aux importateurs nord-irlandais que ceux de l’UE.

L’entrée en vigueur du Brexit devrait être considérée
comme un point de départ, et non comme la fin des incertitudes.

Cependant, cet accord doit encore être ratifié par un Parlement britannique encore profondément divisé et par les Parlements nationaux des 27 pays de l’UE. Par ailleurs, de nombreux détails sont encore à régler avant l’entrée en vigueur du Brexit. Une prolongation pourrait donc s’avérer nécessaire même si l’accord est approuvé. Et des élections anticipées le mois prochain restent vraisemblables quelle que soit l’issue du vote britannique.

Par ailleurs, l’entrée en vigueur du Brexit devrait être considérée comme un point de départ, et non comme la fin des incertitudes. Nous entrons alors dans la période de transition, qui pourrait durer plusieurs années, pour permettre de négocier les termes des futures relations entre l’Union et la Grande Bretagne. En outre, jusqu’à présent, le Brexit a eu des répercussions sur la confiance des entreprises et des ménages, moins sur le niveau d’activité économique. Dès que la majeure partie du Royaume-Uni aura perdu son accès au marché unique, les échanges commerciaux deviendront plus difficiles. D’après une récente étude académique conduite par The UK in a Changing Europe, l’accord de Boris Johnson fera perdre au Royaume-Uni au moins 2,3% de PIB après 10 ans (par opposition à 3,8% pour un Brexit dur et 1,9% pour l’accord de Theresa May).

A la tête de la BCE, Christine Lagarde devrait poursuivre
une politique monétaire particulièrement accommodante.

Dans ce contexte, il semble peu vraisemblable que les banques centrales mondiales changeront de stratégie. Le consensus reste quasi-unanime que la Réserve fédérale américaine procédera à une troisième baisse des taux lors de sa réunion du 30 octobre. Et malgré les dissensions entre les jusqu’au-boutistes et le président sortant de la BCE Mario Draghi, nous estimons que sa successeur Christine Lagarde devrait poursuivre une politique monétaire particulièrement accommodante. Comme nous avons pu le constater, la levée des incertitudes n’atténue pas automatiquement les difficultés économiques.

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