Les politiques fiscales ont pris le dessus sur les politiques monétaires
Sur les cinq dernières années, les taux à dix ans aux Etats-Unis et en Allemagne ont été en moyenne de 2,80% et 1,15% respectivement, avec un écart moyen de 1,65% entre les deux courbes de taux. Or, cet écart s’est réduit de 2,21% à 1,47% entre le début de l’année et le 7 mars. Ce mouvement relativement impressionnant n’est pas dû, comme on pourrait habituellement le penser, à une divergence sur les politiques monétaires de la Fed et de la BCE mais plutôt au fossé qui sépare les récentes politiques fiscales entre ces deux pays. Bien que l’approche de Donald Trump sur la taxation des entreprises américaines soit expansionniste, sa politique sur les taxes douanières et l’incertitude économique qu’elle génère ont un effet néfaste sur l’économie du pays.
En effet, le modèle de la Fed d’Atlanta - qui vise à estimer la croissance actuelle du PIB américain - projetait le 7 mars une chute de 2,4% au premier trimestre 2024. De fait, la situation a changé drastiquement de l’autre côté de l’Atlantique et paradoxalement à cause de la politique de Monsieur Trump. Alors que ce dernier émet des signaux de plus en plus négatifs sur une implication des Etats-Unis dans la défense de l’Ukraine et plus généralement sur son soutien militaire à l’Europe, les chefs de la nouvelle coalition gouvernementale allemande, composée de partis de centre-droit et de centre-gauche et dirigée par le futur chancelier Friedrich Merz, ont annoncé un ensemble de mesures sans précédent qui pourrait ajouter environ 2,5% du PIB aux dépenses annuelles. Au vu de ces récents événements, les mouvements relatifs observés sur les deux courbes de taux semblent donc tout à fait justifiés et la volatilité qui s’est installée sur le marché pourrait bien perdurer encore quelque temps.
Le rôle grandissant des taux dans la performance d’un portefeuille obligataire
Entretemps, les spreads de crédit continuent à évoluer à des niveaux extrêmement serrés. Certes, les fondamentaux le justifient en grande partie, puisque les bilans des entreprises et des banques se sont largement assainis ces dernières années. Il est également vrai qu’il reste une disparité dans certains univers de crédit qui peut profiter aux gérants de crédit long short capables de parier à la hausse ainsi qu’à la baisse sur la qualité de crédit de différents émetteurs. Néanmoins, pour une allocation obligataire plus conventionnelle, rassemblant des emprunts souverains de marchés développés et des obligations d’entreprises et d’établissements financiers de bonne qualité, les niveaux de spreads actuels représentent 37 points de base sur un rendement global de 3,98% (toutes devises confondues), soit moins de 10% du rendement total. A titre de comparaison, la moyenne des cinq dernières années se situait à près du double, soit 19% du rendement total. Au vu de la volatilité sur les différentes courbes de taux mentionnée précédemment, il est donc primordial de se montrer prudent sur son exposition sur ces dernières.
L’importance d’une gestion active de l’exposition aux différentes courbes de taux
Il existe une multitude de façons de construire un portefeuille obligataire diversifié, que ce soit en termes de risque de crédit, de duration en général ou d’exposition aux différentes courbes de taux. Sur ce dernier point, il peut être intéressant de mettre l’accent sur une stratégie flexible pouvant s’adapter aux changements de tendances structurelles, car celles-ci auront certainement un impact historiquement important sur la performance d’un portefeuille obligataire global exposé notamment aux taux américains et allemands.