Coups de poker

Engerrand Artaz & Olivier de Berranger, La Financière de l'Echiquier

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Alors que la campagne présidentielle américaine entre dans sa dernière ligne droite, les tractations autour d’un nouveau plan de relance aux Etats-Unis ont tout d’une partie de poker.

Ceux qui ont l’habitude de taper le carton le savent: plus la partie avance, plus les coups tentés deviennent audacieux, les stratégies, improbables et les résultats, aléatoires. Alors que la campagne présidentielle américaine entre dans sa dernière ligne droite, les tractations autour d’un nouveau plan de relance aux Etats-Unis ont tout d’une partie de poker.

Côté Démocrate, la main est claire. Nancy Pelosi reste inflexible sur les 2200 milliards de dollars proposés par son camp depuis plusieurs semaines. La Présidente de la Chambre des représentants est confortée dans sa position par des sondages, toujours plus favorables à Joe Biden dans la course à la Maison Blanche, et par l’espoir grandissant de voir le Sénat changer de majorité. En face, les Républicains disposent de peu d’atouts et sont divisés. Du côté de la Maison Blanche, Donald Trump multiplie les déclarations contradictoires mais semble prêt, à l’image des joueurs qui écument ses casinos d’Atlantic City, à faire tapis. Ainsi, après s’être déclaré, en fin de semaine dernière, favorable à un plan «plus important que ce que proposent à la fois les Républicains et les Démocrates», a-t-il réitéré ses propos jeudi, en réclamant un plan plus ambitieux que les 1800 milliards proposés par son propre camp.

Une vague bleue qui verrait les Démocrates remporter à la fois la présidence
et le Sénat paraît aujourd’hui la meilleure option aux yeux des marchés.

Du côté des élus, le ton est nettement plus tiède. Mitch Mc Connell, le chef de file du parti Républicain au Sénat, a systématiquement désavoué les propos présidentiels et déclaré que le Sénat considérerait, cette semaine, un plan de soutien «ciblé» de seulement 500 milliards, destiné à parer aux situations les plus urgentes (prêts garantis aux PME, supplément d’allocation-chômage…). Une posture relayée par de nombreux sénateurs, qui semblent avoir acté la perte de la présidence et vouloir concentrer leurs efforts sur la sauvegarde de leur mandat. Dans cette optique, ils ont tout intérêt à se désolidariser de la position présidentielle et de ne rien lâcher à leurs adversaires Démocrates.

Ces dissensions font les affaires des Démocrates, qui auront beau jeu de pointer les atermoiements des Républicains pour expliquer l’absence de vote d’un plan budgétaire massif avant les élections. Car, même si les discussions entre Nancy Pelosi et Steven Mnuchin, Secrétaire du Trésor américain, se poursuivent, les chances de parvenir à un accord d’ici le 3 novembre paraissaient très minces. Le jeu politique risque de durer encore plusieurs semaines et c’est malheureusement l’économie qui risque d’en pâtir, alors que les demandes hebdomadaires d’allocations au chômage repartent nettement à la hausse.

Scénario jugé très négatif il y un an, une vague bleue qui verrait les Démocrates remporter à la fois la présidence et le Sénat paraît aujourd’hui la meilleure option aux yeux des marchés. Cela permettrait de faire voter très rapidement un second plan de soutien, probablement plus élevé que les 2 200 milliards proposés dans le cadre des négociations avec les Républicains. Des résultats plus serrés risquent a contrario de repousser encore l’échéance. Avec des conséquences peu engageantes pour l’économie américaine… et pour les marchés.

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