Aperçu des réunions des banques centrales: stop, pause ou encore?

Kevin Thozet, Carmignac

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Tandis que la Réserve fédérale devrait se mettre en mode pause sur les taux, la Banque centrale européenne optera sûrement encore pour une hausse.

La Réserve fédérale (Fed): pause

La Fed est arrivée à ses fins. Elle a amené ses taux directeurs là où elle avait dit qu’elle les mènerait. Et elle est parvenue à effacer les anticipations de baisse de taux pour la suite de cette année1. Ainsi il nous apparait que la Fed devrait mettre en suspens son cycle de hausse de taux.

Nous nous attendons à ce qu’elle adopte dorénavant une approche attentiste partagée entre la vigueur des données économiques récentes et la transmission de la politique monétaire qui agit sur l’économie avec des délais longs et variables.

Et la suite? l’inflation persiste, les publications économiques sont mitigées, le marché de l’emploi reste tendu. Les marchés anticipent une hausse de taux supplémentaire pour la réunion de juillet – c’est de l’ordre du possible. Mais Jerome Powell doit s’acheter du temps. Le stress sur les banques régionales américaines semble maintenant effacé, c’est donc la macroéconomie qui reprend les commandes de la politique monétaire. Et il est dans l’intérêt de la Fed de temporiser afin d’apprécier si les services vont suivre le mouvement de ralentissement du secteur manufacturier, si le rebond récent du secteur immobilier se confirme et surtout si le marché de l’emploi finit par montrer des signes de fatigue.

Le ton adopté mercredi devrait néanmoins être ferme et cela afin d’écarter toute interprétation que le travail est fait alors que l’inflation sous-jacente n’est toujours pas repassée sous le seuil des 5%.

La Banque centrale européenne (BCE): encore

Si le cycle de resserrement monétaire européen a débuté quatre mois après celui de la Réserve fédérale, et fait notable sans accident majeur, il ne s’en fait pas moins ressentir pour autant.

Tant les indicateurs avancés (indices PMI manufacturier notamment) que le ralentissement de la demande de prêts tant aux ménages qu’aux entreprises (la demande nette de crédit du mois dernier est tombée à 0) en attestent. Tout comme l’élargissement de la désinflation – les publications des indices de prix à la consommation de la semaine dernière ont dû être un vrai soulagement à Francfort. Pour autant, la BCE devrait procéder à une nouvelle hausse des taux de dépôts de 25 points de base jeudi prochain. Le rythme de désinflation a surpris à la baisse, mais le niveau d’inflation reste élevé (6,3% en Allemagne et 5,1% en France pour l’inflation totale en glissement annuel). Des niveaux qui induisent une vigilance durable. Cinq pour cent est un seuil particulièrement important qui voit les hausses de prix être plus homogènes et qui renforce les liens prix-salaires2. La rigidité du marché de l’emploi européen induit également une inertie plus forte sur le front des salaires qui croissent également à un rythme de 5% en glissement annuel. Et ainsi de voir des salaires réels (retraités de l’inflation) se rapprocher des territoires positifs et donc soutenir la consommation.

La réunion de juillet devrait également voir l’institution monétaire européenne remonter ses taux directeurs de 25 points de base possiblement pour la dernière fois si tant est que la trajectoire de désinflation se maintienne. A ce titre on peut d’ailleurs saluer la réalisation de Christine Lagarde qui a réussi (jusque-là) à mener son cycle de resserrement monétaire sans casse, et pourtant il y a 1 an de cela il était entendu que la région était la moins prête à pouvoir faire face à un cycle de resserrement.

Conséquence pour les marchés

Le rythme de remontée des taux d’intérêt ralentit, il s’interrompt mais pour autant cela n’infère pas de facto le terme du cycle de hausse des taux. La dépendance assumée des grands argentiers aux données économiques induit la nécessité de se préparer à des scénarios divers.

Dans ce contexte, nous privilégions au sein des obligations cœur les maturités longues à intermédiaires (entre 5 et 10 ans). Les maturités les plus courtes sont trop asservis aux publications économiques volatiles (emploi, salaires, indicateurs avancés). La confirmation du ralentissement économique et du rythme de désinflation amènera les taux d’intérêt sur des niveaux bien plus bas. A l’inverse, si l’économie devait montrer des signes de résilience encore plus prononcés, cela amènera les banques centrales à remonter leurs taux directeurs et par voie de conséquence pèsera sur les taux les plus longs. Un durcissement de la politique monétaire plus prononcé augmente la probabilité de voir l’économie se contracter fortement.

 

1 Il y a peu les marchés voyaient les taux directeurs à 4% en décembre soit 1% plus bas, soit l’équivalent de 4 baisses de taux de 25 points de base. Ce qui de fait est bien plus efficace que d’avoir à remonter pour ses taux directeurs pour la onzième fois consécutive.
2 https://www.bis.org/publ/bppdf/bispap133.pdf

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