Grâce à une Allemagne moins moribonde que prévu, une Espagne en pleine forme et une France dopée par les JO, la zone euro a enregistré une croissance plus forte que prévu au troisième trimestre, mais les prochains mois pourraient être difficiles.
Le produit intérieur brut (PIB) des 20 pays partageant la monnaie unique a progressé de 0,4% de juillet à septembre, par rapport aux trois mois précédents, a annoncé mardi Eurostat.
Ce chiffre marque une nette accélération par rapport au rythme de 0,2% enregistré au deuxième trimestre.
Il est aussi bien au-dessus des attentes. Les analystes interrogés par Bloomberg tablaient en moyenne sur une croissance stable à 0,2% au troisième trimestre, un peu inférieure au 0,3% affiché de janvier à mars.
L’indicateur fait toutefois pâle figure comparé à la croissance américaine, près de deux fois plus élevée, à 0,7% sur la même période.
Les données de l’institut européen des statistiques confortent la prévision de la Commission européenne qui table sur une progression du PIB de 0,8% dans la zone euro sur l’ensemble de l’année, après 0,4% en 2023.
Ses pronostics doivent être actualisés le 15 novembre. Mais le commissaire à l’Économie Paolo Gentiloni a assuré début octobre que la croissance européenne ne serait «pas loin» des prévisions pour 2024.
Pour l’ensemble de l’Union européenne, la croissance a été un peu moins forte que dans la zone euro au troisième trimestre, à 0,3%, un rythme stable par rapport aux deux trimestres précédents.
Les divergences entre pays restent très marquées, ce qui pourrait constituer un casse-tête pour la Banque centrale européenne (BCE) engagée dans un mouvement de baisse des taux alors que l’inflation est en train de revenir sous l’objectif de 2% par an.
L’institution doit définir une politique monétaire adaptée à l’ensemble de la zone euro.
Ralentissement attendu
Si la France, dopée par un surcroit de consommation lié aux Jeux olympiques, se situe dans la moyenne du bloc au troisième trimestre, avec un PIB en hausse de 0,4%, l’Allemagne continue d’être à la traîne, avec une croissance moitié moindre (0,2%).
Certes, la première économie européenne a créé la surprise en échappant à un chiffre négatif synonyme de récession après un recul du PIB de 0,3% au deuxième trimestre, mais, au-delà des variations trimestrielles, elle stagne globalement depuis fin 2019.
Son industrie reste pénalisée par des coûts de l’énergie élevés et une réduction de ses débouchés en Chine, comme en témoigne la déroute de Volkswagen qui prépare un plan historique de fermetures d’usines et de suppressions d’emplois.
L’Italie a enregistré une contreperformance, avec une croissance nulle de juillet à septembre, tandis que l’Espagne continue de caracoler en tête, son PIB progressant de 0,8%, comme lors des trois mois précédents.
«L’Espagne vit un moment extraordinaire», s’est félicité la semaine dernière le Premier ministre Pedro Sánchez, en insistant sur le fait que la quatrième économie européenne se situait «en tête de tous les pays développés», porté par le tourisme et le dynamisme de ses exportations.
Globalement, la croissance économique de la zone euro s’est accélérée au troisième trimestre «en partie grâce à des facteurs exceptionnels», notamment les JO à Paris, tandis que «la croissance sous-jacente reste faible», estime Bert Colijn, économiste pour la banque ING.
Il s’attend d’ailleurs «pour les trimestres à venir, à un nouveau ralentissement de la croissance».
Elle «devrait ralentir dès le quatrième trimestre», estime aussi Franziska Palmas de Capital Economics qui table sur la poursuite d’une croissance lente en 2025, à 0,7%, à cause de «vents contraires structurels» en particulier en Allemagne et du «resserrement budgétaire» pour réduire l’endettement public qui s’est envolé après la pandémie.
«Avec un ralentissement attendu de la croissance et une inflation bien en deçà des prévisions», elle estime que la bonne performance de l’économie durant l’été «n’empêchera pas la BCE de réduire son taux directeur de 50 points de base en décembre» comme attendu par de nombreux experts.