La direction du groupe de coworking indique reporter son entrée à Wall Street afin de se concentrer sur son cœur de métier.
WeWork, le géant des bureaux partagés qui a multiplié les déconvenues ces dernières semaines dont la démission de son patron co-fondateur, a finalement ajourné son arrivée à Wall Street et devrait lancer une cure d’austérité passant par des milliers de suppressions d’emplois.
«Nous avons décidé de reporter notre introduction en Bourse afin de nous concentrer sur notre coeur de métier, dont les fondamentaux restent solides», ont annoncé les nouveaux co-directeurs de l’entreprise, Artie Minson et Sebastian Gunningham dans un communiqué.
S’ils se disent «plus que jamais résolus à servir» leurs clients, les propriétaires à qui ils louent des bureaux, leurs employés et leurs actionnaires», ils envisageront de nouveau la possibilité de recourir aux marchés financiers «à l’avenir», un terme plutôt vague.
En attendant, assurent les dirigeants, ils ont «bien l’intention de faire fonctionner WeWork comme si c’était une société cotée».
Même s’ils ne précisent pas si cela implique une transparence totale sur les finances de l’entreprise, ces propos sont sans doute destinés à calmer les partenaires de la société, ébranlés par le tumulte entourant actuellement l’entreprise et la situation apparemment inquiétante de sa trésorerie.
Réputé pour dépenser beaucoup d’argent afin d’alimenter sa rapide expansion, le groupe a encore accusé en 2018 une perte de 2 milliards de dollars pour un chiffre d’affaires de 1,82 milliard.
Dressant un réquisitoire sévère contre la We Company, la maison mère de WeWork, l’agence de notation SP Global Ratings a estimé la semaine dernière que la situation en termes de liquidités était «moins que suffisante».
Selon les analystes du cabinet Alliance Berstein, la société, qui avait dans ses coffres 2,5 milliards de dollars fin juin, devrait être à court de liquidités dès le deuxième trimestre 2020 si rien n’était fait.
L’arrivée à Wall Street aurait pu lui permettre de lever au moins 3 milliards de dollars et de bénéficier en plus d’une ligne de crédit de 6 milliards de dollars auprès de grandes banques.
En renonçant à s’introduire en Bourse, la We Company ne peut plus compter sur cet argent et doit sabrer dans les dépenses.
Selon une source proche du dossier, le groupe prévoit de supprimer «des milliers» d’emplois dans les prochaines semaines.
La We Company va également mettre en vente les actifs «ne faisant pas partie du coeur de métier de la société», a ajouté cette source auprès de l’AFP. Au fil des ans, et des intérêts de son patron, le groupe avait notamment investi dans l’activité de colocation avec WeLive, dans l’éducation avec WeGrow, et dans le réseau social Meetup.
La nouvelle direction va aussi revenir sur certaines dépenses luxueuses engagées par son ex-patron, Adam Neumann, comme son avion privé.
Créée en 2010 à New York, la société s’est rapidement étendue à plus de 500 sites dispersés dans 29 pays et, avec ses 12.500 salariés, sert désormais plus de 527.000 membres.
Mais les interrogations se sont multipliées sur sa capacité à gagner de l’argent et à faire face à un ralentissement économique mondial, l’immobilier étant souvent un des premiers secteurs touchés.
Prévue initialement la semaine dernière, l’introduction en Bourse de WeWork avait finalement été repoussée en raison d’un accueil réservé des potentiels investisseurs.
Ces derniers s’interrogeaient sur la valeur supposée de l’entreprise, passée de 47 milliards de dollars lors d’un dernier tour de table en début d’année, à moins de 20 milliards à l’approche de l’arrivée à Wall Street.
Mais les doutes enflaient aussi sur la gouvernance et les méthodes de management de M. Neumann, ainsi que sur son comportement parfois fantasque et d’apparents conflits d’intérêt.
Estimant que l’attention portée sur sa personne était devenue «une distraction importante», ce dernier avait décidé le 24 septembre d’abandonner ses fonctions de directeur général pour ne garder que le poste de président non-exécutif du conseil d’administration.
Sa femme a également quitté l’entreprise et M. Neumann ne dispose plus de la majorité des droits de vote, d’après une source proche du dossier