L’emploi américain n’a pas été déstabilisé par les nouveaux droits de douane en avril aux Etats-Unis, selon des données publiées vendredi. Mais les analystes s’attendent à une dégradation pour la suite.
Le taux de chômage est resté stable le mois dernier dans la première économie mondiale, à 4,2%, d’après le rapport du ministère du Travail.
Les Etats-Unis ont créé 177’000 emplois sur la période, moins qu’un mois plus tôt (185’000, chiffre révisé à la baisse), mais plus que ce qui était envisagé par les marchés (autour de 133’000, selon le consensus publié par MarketWatch).
Ce sont les premières données officielles sur l’emploi couvrant la période suivant la spectaculaire annonce du président Donald Trump d’une montagne de nouvelles taxes sur les produits importés aux Etats-Unis.
Le chef de l’Etat a partiellement fait marche arrière - sauf pour la Chine - mais les droits de douane sont nettement plus élevés qu’avant le début de son second mandat, ce qui rend nerveux consommateurs et entreprises.
Les experts prédisent moins de croissance, plus d’inflation et de chômage.
«Nous ne sommes pas surpris par la bonne tenue des chiffres de l’emploi, parce que les répercussions des droits de douane ne seront pas immédiates», a réagi dans une note Bryon Anderson, cadre du fonds d’investissement Laffer Tengler Investments.
«Mais plus cette situation durera, plus les données commenceront à être négatives», anticipe-t-il.
La Fed sous pression
Le fait qu’il n’y ait «aucune trace d’une récession naissante dans ces chiffres» ne réconforte pas le chef économiste de HFE Carl Weinberg.
«C’est coûteux de licencier, et nous pensons que les entreprises ont rechigné à le faire avant de comprendre l’ampleur des droits de douane de Trump. Maintenant que c’est le cas, nous pensons qu’elles vont maintenant commencer à réduire leurs effectifs», écrit-il dans une note.
«L’activité économique est en ce moment à l’arrêt et devrait rester au ralenti le temps d’absorber le choc des droits de douane», relève la cheffe économiste de Nationwide Kathy Bostjancic.
«Les entreprises, ajoutent-elles, doivent évaluer quels surcoûts elles peuvent répercuter aux consommateurs, leur activité future, et quelles dépenses elles peuvent réduire, notamment la masse salariale».
Peu après la publication des chiffres du chômage, Donald Trump a salué sur sa plateforme Truth Social un «(marché de l’)emploi solide» et estimé que la banque centrale américaine devait baisser ses taux d’intérêt en l’absence, selon lui, d’inflation.
La prochaine réunion de politique monétaire de la Réserve fédérale (Fed) est la semaine prochaine.
Les acteurs de la finance s’attendent à ce qu’elle laisse ses taux inchangés, le temps d’y voir plus clair sur la direction de l’économie depuis le tremblement de terre des nouveaux droits de douane.
Le dernier rapport de la Fed sur l’état de l’économie («Livre beige») brosse le tableau d’une détérioration dans tout le pays: moins de dépenses, de déplacements, de touristes, mais aussi d’embauches.
L’exécutif américain promet à ses citoyens qu’ils récolteront bientôt les fruits d’une politique visant à revitaliser l’industrie nationale et financer des baisses d’impôts via les recettes des droits de douane.
Plus tôt cette semaine, la première estimation du produit intérieur brut (PIB) des Etats-Unis pour le premier trimestre a quelque peu sidéré.
Elle montre un premier recul du PIB depuis 2022, de -0,3% (en rythme annualisé), alors que le pays connaissait encore une croissance soutenue de 2,4% fin 2024.
Bien que frappante, cette contraction s’explique avant tout par un bond inhabituel des importations (qui sont déduites de la production de richesse nationale).
Entreprises et ménages s’étaient en effet pressés d’acquérir des biens à l’étranger avant qu’ils ne coûtent plus cher avec les surtaxes aux frontières.